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Actualités - CHRONOLOGIE

EXPOSITION - À la galerie Sfeir-Semler jusqu’au 28 mars Quand l’art et le design se font « écho »...

Cela fait un certain temps déjà que les frontières entre les genres artistiques s’estompent dans une recherche, toujours plus poussée, d’enrichissement de la créativité par l’injection dans une même œuvre de pratiques issues de différentes disciplines. Les limites de plus en plus floues entre art et design, de plus en plus difficiles à déceler, sont un exemple frappant de cette tendance. Puisant aux sources d’une inspiration commune qui s’attache à questionner la culture contemporaine, partageant les mêmes matériaux et méthodes d’expérimentation (notamment l’objet industriel ou le ready-made) les artistes et les designers se dirigent aujourd’hui, sinon vers une collaboration, du moins vers une exploration dans leurs travaux respectifs de pratiques concomitantes. Il en résulte des œuvres d’art et de design qui se font « écho ». D’où le titre de l’exposition organisée par la galerie Sfeir-Semler (La Quarantaine, immeuble Tannous) qui vise, à travers la présentation d’une sélection de travaux de huit plasticiens, à mettre l’accent sur l’interaction entre objet design et pièce artistique. Une interaction liée au processus de création, comme c’est le cas dans la série de peintures de John Armleder : six toiles abstraites, en forme de cercles de mêmes dimensions, reproduisant, ou plutôt décalquant, dans des mélanges de pigments et de matières, un même motif tiré d’une plaque de cuivre creusée de sillons, qui servait de plateau à une table basse... elle-même chinée aux puces par l’artiste. Armleder, qui est l’un des plus importants plasticiens suisses contemporains, a longtemps été lié au mouvement Fluxus (un courant qui affirme, selon le principe dadaïste, que « tout est art »), dont on retrouve l’influence dans ses œuvres récentes. Notamment par ce jeu de connivence entre peinture et objet. Ambiguïté Mais aussi, une interaction liée à l’ambiguïté des œuvres contemporaines souvent à mi-chemin entre objet fonctionnel et pièce artistique. C’est le cas par exemple des œuvres de Richard Artschwager, dont la galerie expose une étonnante boîte-sculpture en bois, à l’intérieur creusé d’alvéoles contenant des galets en métal poli... Une pièce qui évoque – comme souvent dans les créations de cet artiste américain, né en 1923, et qui a été parmi les pionniers en matière de design et d’installations – un objet utilitaire. Comme un coffret-écrin... Cette même ambivalence se retrouve chez Karen Chekerdjian, une designer libanaise diplômée de la Domus Academy de Milan, qui aime inscrire son travail au confluent du design industriel et de l’univers artistique. En témoignent : une table basse, en métal, à la forme fuselée, inspirée de la guerre d’Irak en 2003 et élaborée d’une seule pièce comme un origami ; mais aussi une étagère en aluminium, conçue sur le thème de « la disparition de l’objet » et, dont la ligne, épurée, épousant totalement le mur, pourrait donner l’illusion de faire partie intégrante de l’architecture de la pièce... ne serait-ce un poétique trio de bougies coulées, en trompe-l’œil, dans le métal même du meuble ; Ou encore une boîte-boule en bois d’érable, baptisée à juste titre Rolling Stone car, par sa forme arrondie, elle défie le dictat du meuble statique et mène sa propre vie... Il suffit donc parfois d’une étincelle De l’objet industriel à l’art : s’il suffit parfois d’une étincelle... il faut, d’autres fois, traverser les ponts de l’imagination et de la conceptualisation pour appréhender certaines œuvres, déroutantes de prime abord. Comme les mots disparates gravés sur miroir de Robert Barry, pourtant l’un des plus importants instigateurs en matière d’art conceptuel américain et dont les œuvres font partie des sélections des expositions d’art contemporain les plus pointues, comme la Documenta à Kassel ou la Biennale de Venise en 1972. Ou encore l’énigmatique Up Side Down, l’installation de Michelangelo Pistoletto, réalisée à partir de deux vieux fauteuils et d’une table basse retournés ! Plus abordables, les peintures-miroirs sur les thèmes du portrait ou de la Méditerranée, sur lesquels Pistoletto, chef de file du mouvement italien Arte Povera, revient toujours, dans une volonté délibérée d’intégrer le spectateur dans son travail en capturant son reflet dans la pièce artistique. Sculptures de néons Faire des sculptures de lumière. C’est ce que Keith Sonnier, plasticien minimaliste américain, expérimente depuis les années soixante, en développant un concept d’œuvres artistiques réalisées à partir de matériaux bon marché, comme le latex, le néon, l’aluminium, le carton et le verre... Cela donne des entortillements de néons lumineux et des quasi-tableaux : mélange de peinture sur carton et d’appliques lumineuses. Un peu dans le même registre, fixées au mur de l’une des salles de la galerie, des peintures tridimensionnelles qui ressemblent à des sculptures-cloisons, réalisées suivant la méthode de Herbert Hamak – qui mélange art et expérimentation scientifique – jouent sur les effets de lumière, d’éclairage et de pigments emboîtés dans de la résine... Plus loin, fixées au mur également, des sculptures calligraphiques de Timor Nasseri, artiste germano-iranien, reproduisent en formes tridimensionnelles sur bois recouvert de peinture métallique des mots arabes, à double-sens comme Raad ou Fajr qui, outre leur signification première (tonnerre et aube), sont les noms de deux missiles iraniens. Entre tableau, sculpture et design (les lettres pouvant supporter des objets ou des livres), Nasseri élabore un art, à la fois conceptuel et esthétique. Des œuvres aussi différentes que variées, mais qui témoignent toujours d’une fascination réciproque entre artistes et designers... Jusqu’au 28 mars. Zéna ZALZAL
Cela fait un certain temps déjà que les frontières entre les genres artistiques s’estompent dans une recherche, toujours plus poussée, d’enrichissement de la créativité par l’injection dans une même œuvre de pratiques issues de différentes disciplines.
Les limites de plus en plus floues entre art et design, de plus en plus difficiles à déceler, sont un exemple...