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Morceaux de rêves à travers les siècles

«Je ne fais pas de rêves, il se peut que je ne m’en souvienne pas. Je n’en ai retenu qu’un seul, il m’a vivement intriguée, non seulement parce qu’il n’a rien à voir avec mon état actuel, mais surtout parce que je ne me suis jamais intéressée ni à Hitler ni aux chiens. » Vassilis Alexakis, tiré du roman Talgo. Grèce, 2003 «J’ai fait ce cauchemar d’une personne aimée qui avait un malaise dans la rue et demandait avec angoisse un médicament ; mais tout le monde passait et sévèrement le lui refusait, malgré mes allées et venues affolées ; l’angoisse de cette personne prenait un tour hystérique, dont je lui faisais reproche. Je compris un peu plus tard que cette personne était moi – bien sûr ; de qui d’autre rêver ? » Roland Barthes, Fragment d’un discours amoureux, France 1977. «Mon cher ami, Puisque les rêves vous amusent, en voilà un qui, j’en suis sûr, ne vous déplaira pas. Il est cinq heures du matin, il est donc tout chaud. Remarquez que ce n’est qu’un des mille échantillons des rêves dont je suis assiégé, et je n’ai pas besoin de vous dire que leur singularité complète, leur caractère général, qui est d’être absolument étrangers à mes occupations ou à mes aventures passionnelles, me poussent toujours à croire qu’ils sont un langage hiéroglyphique dont je n’ai pas la clef. » Charles Baudelaire, Correspondance, France 1856. «Elle sentit qu’elle s’endormait pour de bon et elle venait de commencer à rêver qu’elle marchait avec Dinah, la main dans la patte, en lui demandant très sérieusement : “Allons, Dinah, dis-moi la vérité : as-tu jamais mangé une chauve-souris ” quand, brusquement, bing ! bing ! elle atterrit sur un tas de feuilles mortes, et sa chute prit fin. » Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles. «Je rêve. Fond noir enfumé de nues d’un bleu très sombre, sur lequel passent des ornements géométriques auxquels manque toujours un fragment, soit du cercle parfait, soit de leurs trois angles, de leurs spirales rehaussées de feu. Fleurs flottantes sans tige ou sans feuilles. Jardins inachevés ; partout règne l’imperfection du songe, son atmosphère de supplique, d’attente et d’incrédulité. Point de personnages. — Silence, puis un aboiement triste, étouffé. » Colette, Les vrilles de la vigne 1908. «Au petit matin, lorsqu’il put enfin s’endormir, un rêve baroque le troubla : Lila se tenait devant lui, sans qu’il puisse l’atteindre et, avec son même sourire, elle lui offrait dans ses mains, tirées de son ventre entrouvert, ses propres entrailles. » Assia Djebar, Les enfants du nouveau monde. «Parfois les choses les plus futiles l’exaspéraient et la mettaient hors d’elle. Par exemple, Alexandra Ivanovna aimait à dormir longtemps et faisait habituellement beaucoup de rêves ; mais ces rêves se distinguaient toujours par une rare insignifiance ; ils étaient aussi innocents que ceux d’un enfant de sept ans ; or, cette innocence même irritait, on ne sait trop pourquoi, sa maman. » Fédor M. Dostoïevski, L’idiot, Russie, 1868. «D’étranges rêves le visitèrent vers le matin. Il se trouvait dans un jardin qu’il avait souvent parcouru tout enfant, il reconnaissait avec joie les allées, les haies, les parterres de fleurs ; Marianne venait à sa rencontre, il lui parlait tendrement et sans la moindre réminiscence de leur querelle passée. Aussitôt après, son père s’approcha d’eux, en costume d’intérieur ; d’un air familier qu’on lui voyait bien rarement, il dit à son fils d’aller chercher des chaises dans le pavillon, prit Marianne par la main et la conduisit vers un berceau de feuillage. » Johann Wolfgang von Goethe, Wilhelm Meister (Allemagne, 1796) «Clytemnestre : Et dans mes songes, le vol léger et harcelant du moucheron m’éveillait, les yeux encore pleins des maux que je t’avais vu assaillir, plus nombreux que les minutes de mon rêve. » Eschyle Agamemnon, Grèce, 458. Illustration : « La nuit », de Gustave Moreau.
«Je ne fais pas de rêves, il se peut que je ne m’en souvienne pas. Je n’en ai retenu qu’un seul, il m’a vivement intriguée, non seulement parce qu’il n’a rien à voir avec mon état actuel, mais surtout parce que je ne me suis jamais intéressée ni à Hitler ni aux chiens. » Vassilis Alexakis, tiré du roman Talgo. Grèce, 2003

«J’ai fait ce cauchemar d’une...