Internet propose même des sites communautaires... Vitrines virtuelles pour saisir l’amour au vol : bienvenue dans la jungle des sites de rencontres

Peut-on vraiment prendre son destin amoureux en main ? Est-il possible de choisir de trouver l’âme sœur rien qu’en surfant sur Internet ? Sur la toile, les sites de rencontres pullulent. Tout n’est plus qu’une question de « clics »… Que ceux qui croient encore que la société libanaise est conservatrice se détrompent. Les sites libanais sont nombreux à proposer leurs services, à l’instar de « Lebanese Hearts ». D’autres, plus pragmatiques, s’adressent à une communauté bien précise et qu’ils espèrent attirer : « Lebanese Christian Singles », accessible depuis le site « ArabLounge.com », va droit au but, tout comme « DruzeDate » ou encore « Druze Café ». L’un de ces deux derniers sites garantit des rencontres rapides en « quelques mois », au lieu d’attendre « des années » pour rencontrer son âme sœur communautaire… Les sites de rencontres permettent de faire la connaissance de nouvelles personnes, de ne pas continuer à croire que « tout le monde est parti et qu’il ne reste plus personne dans ce pays de fous », comme aime à le rappeler Waël, qui a 28 ans et vient d’entrer dans la vie active. Une phrase qui revient souvent parmi les jeunes Libanais : « Il y a 7 filles pour chaque garçon dans ce pays. » Même s’il est impossible de vérifier la véracité de ces propos, les filles qui choisissent de rester au pays se plaignent de plus en plus du « comportement » des « quelques garçons » qui vivent encore au Liban. « Ils se croient tout permis, ils savent que de nombreuses filles sont célibataires. Pourquoi donc s’engageraient-ils dans quelque chose de sérieux s’ils savent qu’ils peuvent changer de fille comme de chaussettes ? » s’interroge celle que nous appellerons Roula, une étudiante de 25 ans. Partant de là, les sites de rencontres permettent de « rechercher » le profil de l’homme « que l’on a envie de rencontrer », une manière comme une autre de limiter en amont les mauvaises surprises. À ces raisons s’ajoutent d’autres, bien entendu. Les sites de rencontres sont un moyen pratique de faire la connaissance de nouvelles personnes, sans avoir à sortir chaque soir. Ce moyen est très utile pour celles qui se retrouvent cloîtrées chez elles pour cause de « parents trop stricts en matière de sorties »… Vive Internet ! Certaines personnes se sont aimées et engagées à vie après s’être rencontrées sur la toile. D’autres auront sans doute vécu des déceptions dont elles se seraient bien passées… Zoom sur certains sites phares, tant internationaux que bien de chez nous. Au Liban, il est a priori facile de faire des rencontres. La vie sociale y est riche, les restaurants et boîtes de nuit sont la plupart du temps pleins à craquer et constituent, le plus souvent, des lieux privilégiés pour y rencontrer, au mieux, l’âme sœur. Cependant, les difficultés économiques, l’instabilité sécuritaire, mais aussi un mal-être quasi permanent poussent une large tranche de la population à chercher du réconfort dans l’univers virtuel et si rassurant d’Internet. Ceux qui rêvent de rencontres bouleversantes ou de lendemains meilleurs avec un/une compagne/compagnon plus approprié ou encore plus exotique se lancent corps et âme dans une recherche effrénée d’un « autre » fantasmé et façonné au gré de l’imaginaire des uns et des autres. D’abord, « le » site mythique s’il en est, l’irremplaçable et l’inimitable Meetic.fr ou, dans sa version internationale, Meetic.com. La « Rolls Royce » des sites de rencontres, c’est lui, à condition d’avoir le souffle et la motivation suffisants pour remplir les quatre questionnaires d’au moins 10 questions chacun, que nécessite l’inscription sur ce site. Après avoir rempli votre « CV amoureux », il vous est alors permis de surfer sur le site afin de jeter un coup d’œil aux profils des célibataires disponibles. Le site est destiné à l’international, il est possible de choisir le pays de résidence qui intéresse le surfeur, en l’occurrence le Liban. À la grande surprise de la plupart des jeunes Libanaises, ce site renferme un nombre insoupçonné de jeunes et moins jeunes hommes libanais célibataires à la recherche de l’âme sœur. Dès qu’une personne est repérée par un prétendant potentiel, un e-mail est envoyé automatiquement à sa boîte mail. Tous les sites offrent gratuitement ce service, très pratique pour s’informer des derniers développements de sa vie sentimentale, sans avoir à rentrer dans tous les sites auxquels on s’est abonné. Sur Meetic, l’abonné reçoit donc des e-mails de ses admirateurs, mais il peut également, tout aussi bien faire confiance aux services du « matchmaker » électronique qui lui indique avec qui il est le plus susceptible de passer le restant de sa vie. Ce « matchmaker » croise en effet vos critères avec ceux des autres abonnés et vous informe des profils les plus proches du vôtre... Si ce n’est pas beau la technologie ! Pour revenir aux sites proprement locaux, il faut signaler Lebanese Hearts, Rencontres francophones.net. Les communautés s’y mettent aussi : Lebanese Christian Singles ou encore DruzeDate, Druze Café, de même que Aramatch (pour la communauté sunnite), Shiamatch (pour la communauté chiite), même si ces deux derniers sites sont plus orientés sur les communautés irakiennes et iraniennes de la diaspora. Plus diversifié, le site Lebanonlinks.com assure des rencontres en tout genre, entre Libanais recherchant « l’amitié, l’amour », mais quelques fois purement et simplement « le sexe », tels qu’ils le signalent en dessous de leur photo. Le site le dit très clairement, on peut y rencontrer « l’amour, le sexe, des hétérosexuels, des bisexuels et des homosexuels hommes et femmes ». Un internaute assidu témoigne Nous l’appellerons Tony. Marié, il dit surfer sur les sites de rencontres pour « s’amuser ». Il fréquente plus des sites internationaux type badoo.com ou adultfriendfinder.com. Le premier est un site de rencontres classique, le second est à la limite du site pornographique. On y trouve des photos d’hommes et de femmes dénudés, dans des poses lascives. Ces deux sites comprennent des abonnés libanais qu’il est facile de repérer en choisissant dans le menu déroulant des pays le Liban, et ce au début de la recherche. Tony a fait peu de rencontres sérieuses sur le Net. À deux reprises, explique-t-il, « j’ai rencontré deux femmes avec lesquelles j’ai eu des relations de quelques mois. Ça n’a pas duré, même si au début c’était bien. Ensuite, plus le temps passe, plus les différences apparaissent. L’une d’entre elles ne voulait pas, d’ailleurs, de relation sérieuse. Elle cherchait juste à s’amuser, contrairement à moi. Avec l’autre, nous avons rapidement parlé mariage, mais cela ne s’est pas fait. » « Le truc avec Internet, c’est que tout et n’importe quoi peut être dit, lorsqu’on est assis confortablement derrière son écran. Certaines personnes se font passer pour d’autres, des hommes se font passer pour des femmes, et inversement. Il n’y a pas de règles, pas de garanties. C’est un monde virtuel. Impossible de trouver le grand amour de cette manière-là, ça ne réussit pas à 100 % comme ils le disent si bien sur les sites », explique Tony. Il se souvient ensuite d’une fois où il a pu piéger un ami : « J’étais dans la chambre d’à côté et nous étions chacun en train de surfer sur Internet. Je savais qu’il était sur un des sites de rencontres. Je me suis fait passer pour une femme. Nous avons bavardé pendant un bon moment. Ensuite, il a surgi victorieux de l’autre pièce en disant qu’il avait réussi à draguer une femme. Il a été très déçu lorsqu’il a su qu’en fait, c’était moi qu’il avait dragué ! » Des expériences agréables qui tournent ensuite au vinaigre, cela est fréquent, comme le relève Tony. « Une amie à moi, libanaise, avait rencontré un Français sur un site de rencontres. Ils ont “chatté” ensemble durant quatre ou cinq mois. Il est venu la voir au Liban, il est resté quelques semaines. Puis elle est partie en France pour un mois. Au bout d’un an, ils se sont mariés. Cela fait quatre ans qu’ils sont ensemble, ils ont eu un enfant, mais elle n’en peut plus et envisage sérieusement de le quitter. Il s’est montré sous son vrai jour peu de temps après le mariage, un vrai goujat ! » Mais il cite, en contrepartie, cet ami libanais qui a rencontré une Mexicaine via le Net. « Il est parti la rejoindre au Mexique. Je pense que cela se passe bien pour eux. » Lélia MEZHER *** Pour vous, « L’Orient- Le Jour » a testé… Pour les besoins de ce tour d’horizon des sites de rencontres, je me suis inscrite sur plusieurs sites, sous différents pseudonymes : Tatiana (qui est blonde, très grande de taille, très mince et qui a les yeux bleus), Mireille (qui est rousse, de taille moyenne, les yeux miel) et Loulou (ma vraie photo à l’appui). Les réactions des abonnés mâles diffèrent selon le site visité, et j’ai choisi d’axer sur un site, Lebanese Christian Singles, parce qu’il y a peu de temps une publicité vantait en boucle les mérites de ce site sur l’une des stations de radio. Sur Lebanese Christian Singles, les rencontres virtuelles pleuvent. Il faut s’y abonner pour le croire, et c’est ce que j’ai donc fait. Sous le pseudonyme très peu aguicheur de « Loulou_beirut 1979 », photo (réelle) de mon auguste personne à l’appui, j’ai pu tester en temps réel (et virtuel) et au grand dam de mon compagnon dans la vie (réelle) les bienfaits de ce havre de rencontres communautaires. Deux points sont à signaler. Contrairement à ce qui se fait sur les sites « normaux », sur les sites communautaires, au lieu du mot « célibataire », il faut en fait cocher la case « never married », comprendre « jamais marié » (vivre encore chez ses parents semble aussi être un plus…). De plus, la case religion doit être remplie, au risque de ne pas se faire aborder du tout par son éventuelle âme sœur coreligionnaire. L’origine ethnique est aussi importante. La plupart des femmes abonnées à ce site sont d’origine ethnique libano-américaine. On comprend tout de suite que le but de ce site est de favoriser des rencontres entre chrétiens d’origine libanaise et vivant aux États-Unis. Une fois abonnée, les e-mails pleuvent dans ma boîte aux lettres. Je reçois des « flirts » à n’en plus finir. Pour lire tout ce que je reçois, il me faudrait d’ailleurs passer la journée devant mon écran d’ordinateur. Les pseudonymes des hommes qui me contactent varient en finesse et en originalité : « niceman » me semble plus attentionné que les autres, alors que « zb169 » ne m’inspire pas confiance… Une synthèse des messages que je reçois me permet d’affirmer sans ciller que je suis « sweet », que j’ai l’air « nice » et que je semble être l’âme sœur potentielle d’environ une vingtaine de personnes. Tous me disent qu’à l’avenir, nous devrions « chatter » ensemble. S’il fallait uniquement se fier au « feeling », impossible de faire un choix et d’opter pour l’un d’eux plutôt que pour un autre. Même après avoir lu avec attention le profil de chacun, seuls l’âge et la photo influencent réellement le choix final. Deux critères qui ne sont absolument pas significatifs d’ailleurs, puisque la photo peut très bien ne pas être celle de la personne qui tente de vous convaincre qu’il est l’homme de votre vie et l’âge peut tout aussi bien être faussé. Résultat des courses ? J’ai encore 30 e-mails à lire, il est tard, j’ai mal à la tête et je ne sais plus très bien si je m’appelle Tatiana, Loulou ou Mireille.