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Avignon : Fisbach fait un théâtre de la banalité avec les « Feuillets » de Char

Frédéric Fisbach, « artiste associé » du Festival d’Avignon 2007, a porté à la scène dimanche soir Feuillets d’Hypnos du poète de la Résistance René Char, confrontant ces fragments fulgurants à la banalité du réel et du quotidien dans la cour d’honneur du Palais des papes. Le fondateur de l’événement théâtral, Jean Vilar, l’a souvent dit : « La bonne chance voulut que tout naquit d’une rencontre avec le poète », en l’occurrence René Char, l’enfant de L’Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse) qui fit entrer le metteur en scène à Avignon. Jamais l’homme de lettres n’avait pourtant eu les honneurs d’un spectacle de théâtre à la cour, lieu emblématique de la manifestation depuis 1947. Pour ses soixante ans et à l’occasion du centenaire de la naissance du poète, le Festival d’Avignon a pu réparer cette relative injustice grâce à un projet un peu fou du metteur en scène Frédéric Fisbach, 41 ans, qui avait « envie de voir comment résonneraient aujourd’hui les Feuillets d’Hypnos ». L’aventure était a priori risquée tant ce texte est non théâtral et hétérogène. Feuillets d’Hypnos est fondé sur le journal tenu dans la clandestinité, en 1943-1944, par René Char, alors chef de maquis des Basses-Alpes. De ce texte à 237 entrées mêlant aphorismes, poèmes courts et témoignages historiques, Frédéric Fisbach a voulu faire « 237 actions pour la scène ». Annonçant les numéros des fragments telle une litanie rythmant avec peine la soirée, les sept interprètes professionnels, en costumes d’aujourd’hui, ne se contentent pas de lire la prose de Char, ils la commentent par le geste ou la vivent dans un décor blanc et transparent qui leur sert aussi d’habitat. Inévitablement, certaines situations apparaissent rapidement décalées et bien triviales. Une femme parle de « toute l’autorité, la tactique et l’ingéniosité » en grignotant nonchalamment un aliment, couché sur sa couette, un homme chante « l’intelligence avec l’ange, notre primordial souci » sur une pauvre mélodie pop, et on voit le même prendre sa douche quelques instants plus tard. De l’écrit à la scène, certaines correspondances sont certes plutôt bien trouvées, comme ces retrouvailles autour d’une table pour accompagner l’évocation par Char de ses arrêts heureux à Forcalquier ou ces confidences plus vraies que nature de l’archiduc. Mais il faut supporter des aboiements sur plusieurs fragments, une agitation récurrente sur scène, des coups de feu pas vraiment indispensables, et globalement une façon de rendre presque inaudibles – au sens propre comme au figuré – les mots de Char, le tout faisant fuir certains spectateurs. Frédéric Fisbach incorpore aussi 106 amateurs venus d’Avignon et de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), dont il dirige le studio-théâtre. Une sorte d’« armée des ombres » qui humanise le plateau : la langue du poète, sa profondeur et sa grande valeur morale y trouvent un peu de consolation.
Frédéric Fisbach, « artiste associé » du Festival d’Avignon 2007, a porté à la scène dimanche soir Feuillets d’Hypnos du poète de la Résistance René Char, confrontant ces fragments fulgurants à la banalité du réel et du quotidien dans la cour d’honneur du Palais des papes.
Le fondateur de l’événement théâtral, Jean Vilar, l’a souvent dit : « La bonne...