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Actualités - CHRONOLOGIE

EXPOSITION - À la galerie Alice Mogabgab, jusqu’en septembre Fadia Haddad, en apesanteur

Période oiseaux, période masques, mais également période transitoire et période paysages, voilà en quelques exercices de style, sûrs et volontaires, et en signes colorés et formes poétiques en apesanteur, le langage pictural de Fadia Haddad. Cette artiste libanaise installée à Paris expose à la galerie Alice Mogabgab, jusqu’en septembre, une série de toiles illustrant une rétrospective de vie et de travail confondus, allant de 1992 à 2007. Quinze ans de papiers, souvent de forme verticale, où s’élaborent d’abord des compositions graphiques, un peu abstraites, sans thèmes précis, laissant venir peu à peu les époques différentes en jets, en flots ou en nuées. Comme ces nuées d’oiseaux qui envahissent les canevas en 1995. Tendant leurs becs, leurs cous longs ou déployant leurs ailes et s’envolant très haut, ils ressemblent à ces peintures rupestres exprimant les angoisses collectives de l’humanité. En noir et gris que seule la couleur ocre vient colorer, ce travail évoque, à l’image des hiéroglyphes, un certain langage intemporel. Curieusement, cette période poétique qui fait penser aux travaux de Juan Miro sur le thème « Femmes et oiseaux » s’achève par la crucifixion du volatile. Ce symbole de vie, d’énergie ascendante et de liberté laisse la place, dans une seconde période, à un autre vocable : le masque. Ainsi, l’oiseau autrefois trucidé demeure en exergue sur le canevas comme en second plan. Le masque apparaît et engloutit le papier. L’oiseau est toujours là, mais les taches disparates de pigments et de liants acryliques finissent par l’envahir. Les papiers de comptabilité jaunis, constituant la trame, évoquent par leurs compositions quadrillées les barres de prisons où s’instaure le masque et les volières d’où s’échappent les volatiles. Il y a également ces paysages reproduits avec vue du ciel, comme si on les survolait. L’artiste se serait-elle prise à son tour pour un oiseau ? Des vues plongeantes de Jezzine, où Fadia Haddad est venue s’installer quelques jours pour travailler car il y a toujours chez cette artiste assoiffée de travail un besoin de peindre comme d’exister. Entre l’enfance et l’âge adulte Jets de couleurs et lignes affirmées comme un questionnement plus profond et plus grave. Ce n’est pas l’expression humaine qui intéresse Haddad, mais la poésie et le côté dramatique derrière la figure humaine. À travers ces élucubrations poétiques, c’est le drame de l’humanité qui se joue en plusieurs actes, comme dans les tragédies grecques ou extrêmes-orientales. C’est également l’univers de l’artiste qui se dévoile. Un monde fait de becs durs et de plumes légères, de masques tristes ou gais. Un parfait équilibre entre la matière et la couleur, rendu par des compositions subtiles et un graphisme puissant. Sombre dans la représentation des paysages, la palette devient, ailleurs, colorée et vive sur ces surfaces tantôt translucides, tantôt mates. Ses travaux évoluent même vers l’anonymat. Rejetant la vanité des titres, comme si on ne peut mettre un travail pictural dans la cage des mots, l’artiste baptisera la série Songeurs de synonymes. À la lisière de l’enfance et de l’âge adulte, Fadia Haddad ne rejette pas le passé, mais l’authentifie par de simples indices parsemés sur ses papiers jaunis. Éprise de matière, elle sait en exprimer la beauté, sa simplicité et sa richesse, en l’appliquant avec toutes ses nuances, sa puissance et sa vision particulière. Colette KHALAF
Période oiseaux, période masques, mais également période transitoire et période paysages, voilà en quelques exercices de style, sûrs et volontaires, et en signes colorés et formes poétiques en apesanteur, le langage pictural de Fadia Haddad. Cette artiste libanaise installée à Paris expose à la galerie Alice Mogabgab, jusqu’en septembre, une série de toiles illustrant...