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Actualités - OPINIONS

Les lecteurs ont voix au chapitre

Une même langue En écoutant M. Saad Hariri l’autre soir à la télévision, à bien comprendre ce qu’il disait, j’ai cru entendre tout ce que tous les leaders chrétiens ont martelé depuis plus de trente-cinq ans, ce pourquoi ils ont combattu, ce pourquoi, trop souvent, ils sont morts. Enfin, nous parlons le même langage ! J’en suis fort heureuse, même si cela nous a coûté cher, même si je me retrouve – comme dit un proverbe bien de chez nous – avec des poils sur la langue. Toutefois j’ai un souhait, un seul : quelles que soient les circonstances nationales, régionales ou internationales, sachons continuer à parler la même langue, celle du Liban souverain, uni et indépendant, insensible aux appels du large, du voisin proche ou lointain, quelle que soit sa confession. Randa A. MOUSSALLI Lutter pour la patrie L’été est presque arrivé. Les nuages se sont dispersés et les fleurs commencent juste à respirer. Mais hélas, les corbeaux l’ont précédé. La brise estivale, tant attendue, glace aujourd’hui le sang des martyrs libanais. Les visages, attristés, regardent la mer avec envie, les faces, figées, observent la terre avec mépris et les yeux des enfants se ferment sans faire de bruit. Les prières se sont transformées en murmures et le crayon en parjure dans un pays noirci par trop d’usure. La gloire de nos ancêtres tremble sous ces domaines bombardés qu’ils avaient tant aimés, notre fierté d’hier se terre aujourd’hui au plus profond de nos mers. Le Cèdre dans toute sa splendeur se meurt au loin, la forêt des pins, plongée dans la pénombre, pousse ses derniers soupirs et les gardénias refusent de s’épanouir. Voilà ce qui reste de la Suisse de l’Orient, piètre funambule, entre rouge et blanc. L’héritage phénicien se transforme en haine, en démence. Nos liens se délient sans aucun remord. Où autrefois résidait l’amour, domine maintenant la guerre. Où régnait hier le pardon, repose cette nuit la vengeance. Le royaume des cieux s’est effondré en un clin d’œil, notre jardin d’Éden s’est noyé dans nos pleurs. Et nous nous tenons impuissants face au destin qui s’en prend à ces innocents. À la frontière des deux mondes, ils sont là, ils ne comprennent pas, ils n’ont pas le choix. Victimes d’un complot qui les dépasse, ils ne peuvent qu’espérer que le cauchemar finira bientôt. Naïveté ou instinct de survie ? Nul ne pourra le dire. Dans ce coin déclassé, ils continuent à croire au bonheur et à tous les leurres, ils ne baissent pas les bras, ils aspirent à de nouveaux lendemains. Alors que le vent, écœuré, berce les âmes des jeunesses volées, les corps, eux, ne cessent de lutter. Lutter pourquoi ? Lutter pour rien, lutter pour tout. Lutter pour la liberté, pour vivre, pour respirer. Lutter pour ce coucher du soleil qui a accompagné leur enfance, pour cette lune qui a éclairé leur chemin, lutter pour ce pays auquel ils ont tout donné. Sabine SAADÉ Entre-temps…. Le monde entier se sera mis à cet accouchement au forceps. Après trois décennies ponctuées de crimes politiques, assiste-t-on réellement aujourd’hui au bourgeonnement d’un nouveau Liban, à un moment où la bataille de Nahr el-Bared fait rage et que l’opposition a réduit gauchement la date historique du 13 mai à un « tribunal sans accusés » ? Le ruban bleu de la vérité aura-t-il au moins été honoré, ou bien est-ce le cordon bleu d’à côté qui mijote encore quelque chose ? Quoi qu’il en soit, « mabrouk » à chaque citoyen qui a participé à la révolution du Cèdre. « Mabrouk » à chaque Libanais pour son souffle, son courage, sa détermination, son entêtement. Certes la victoire est encore timide et les sentences sont encore loin. Entre-temps, saisissons avec maturité et dépassement l’espoir d’une patrie longtemps rêvée, saluons ce « push » que nous a apporté en filigrane cet homme généreux qu’est Jacques Chirac et sachons gérer le précieux présent que nous offre le tribunal international et cette immunité, espérons intrinsèque, que nous promettent les Nations unies. Lina SINNO Un rêve libanais Je suis un Libanais de 14 ans qui souhaite continuer à vivre son rêve du Liban. C’est un souvenir qui me tient à cœur que je veux conter. Ce souvenir a toujours fait partie de moi, car je l’entretiens. Chaque année, je quitte la France pour rejoindre ma maison. Ma maison de vacances était loin de la France, de l’école, de mon petit appartement. Ma maison était celle où toute ma famille se rassemblait pendant quelques courts mois d’été. Ma famille ne s’arrêtait pas à mes parents et leurs parents, mais à tous leurs frères, leurs sœurs, les enfants de leurs frères et sœurs. Nous nous rejoignions tous dans notre demeure familiale, gigantesque, vue à mes yeux d’enfant. Cette demeure était située dans les profondeurs de l’Orient, coincée dans un petit village du nom d’une poésie libanaise qui berça mes ancêtres. Je me souviens des veillées auxquelles j’assistais. Ces moments de musique, de chants, de danse, ces banquets. Puis les réveils : chacun se levait à l’heure qu’il voulait, le petit déjeuner se prenait à la table familiale. Nous étions très nombreux, ce qui nous rapprochait toujours plus. Moi j’étais le plus petit de la famille. C’est comme si j’étais la peluche, le petit clown que les gens chérissaient. J’aimais cela… Pendant ces moments, je me sentais roi. On ne s’amusait pas comme en France. L’électricité était souvent coupée. Cela ne gênait personne, car nous nous amusions avec ce que nous trouvions. Ces moments, qui me paraissaient éternels étant petit, me rendent bien nostalgique aujourd’hui. Ma famille s’est dispersée ; elle a trouvé de nouvelles demeures ; elle a grandi aussi, alors elle a voyagé. Elle s’est agrandie, alors nous devons nous éloigner. Chaque année, je retourne chez moi et chaque année j’espère retrouver ces moments perdus dans ma demeure coincée dans un petit village du nom d’une poésie libanaise qui berça mes ancêtres. Michel RAFFOUL Paris NDLR Dans le nombreux courrier que nous recevons quotidiennement, certaines lettres comportent des passages qui seraient difficilement publiables. Pour cette raison, et aussi afin de faire paraître le plus grand nombre possible de lettres, le journal se réserve le droit de n’en reproduire que les parties les plus significatives et d’en rectifier certains termes désobligeants. En outre, chaque missive doit comporter la signature (nom et prénom) de son auteur. Les lecteurs, nous en sommes certains, le comprendront, ce dont nous les remercions par avance.
Une même langue

En écoutant M. Saad Hariri l’autre soir à la télévision, à bien comprendre ce qu’il disait, j’ai cru entendre tout ce que tous les leaders chrétiens ont martelé depuis plus de trente-cinq ans, ce pourquoi ils ont combattu, ce pourquoi, trop souvent, ils sont morts. Enfin, nous parlons le même langage ! J’en suis fort heureuse, même si cela nous a...