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Olé ! Dr Maria BASSIL

J’avais fait de la résistance pendant mes dix années de vie à Montpellier, ville du sud de la France, mitoyenne d’Arles et de Nîmes, où sévissaient les corridas durant l’été. Par principe et par amour des animaux, je m’étais toujours élevée contre cette violence gratuite qu’offraient ces spectacles à des aficionados survoltés. Mais un jour, pendant un séjour à Madrid, je me laissais convaincre et j’allais à ce rendez-vous, jugé incontournable par mes compagnons de voyage de l’époque. Mal m’en a pris, car je fus prise d’un malaise à la vue de  l’agonie de ce malheureux taureau lâché dans l’arène, qui n’avait rien demandé à personne, encerclé, condamné d’avance, démuni face à la cruauté d’un toréador transcendé par les « olé » d’un public déchaîné et totalement acquis à sa cause. Ce spectacle sordide et inhumain me revient ces jours-ci à l’esprit face au calvaire de mon peuple. Grand peuple attaqué de toutes parts, poignardé, lacéré, encerclé, lâché dans l’arène du  terrorisme. Grand peuple démuni face à ce  déferlement de haine et de cruauté, jalousé, envié et menacé par ses voisins. Grand peuple  terrorisé, sacrifié sur l’autel des conflits géopolitiques et éternel  bouc émissaire de par son tissu social unique qui devrait pourtant être source de richesse, d’ouverture et de tolérance et non de malheurs et de divisions. Grand peuple qui courbe à chaque fois l’échine, mais ne rompt jamais, qui paye désormais tous les  soirs dans sa chair, ses biens, son présent et son futur un lourd tribut face à la démagogie et la folie meurtrière de ses ennemis. Mais pour que mon parallélisme avec la corrida soit complet, manque à l’appel le public. Et c’est là que le bât blesse le plus, car le public est, entre autres, constitué honteusement de certains de nos politiciens qui, non contents de malmener le premier  gouvernement souverainiste du Liban depuis des années, de le ligoter politiquement, de l’asphyxier économiquement, regardent le pays sombrer dans le chaos. À défaut d’ « olé » indécents – encore que… –, ils se répandent en critiques acerbes et se gargarisent de piques déplacées et douteuses qui n’honorent en rien ceux qui les profèrent. Ils manifestent une mauvaise foi évidente au lieu de faire l’union sacrée, à l’heure où  le pays ploie une nouvelle fois, et à son corps défendant, sous le joug implacable des desseins diaboliques de ses voisins. Il est dans la tradition barbare de la corrida une seule et unique coutume « noble ». Elle consiste à gracier le taureau si durant le corps à corps sanglant, ce dernier se révèle très courageux face à son bourreau. Sa grâce est alors bruyamment et unanimement demandée par un public subjugué par la bravoure et la ténacité de la bête. Son courage honoré, sa vie sauvée, il  finira tranquille et en sécurité dans les pâturages. N’avons-nous pas montré, en trente ans de sacrifices collectifs, de martyres et de résistance à des complots machiavéliques en tout genre, que nous méritions aussi d’être graciés ? N’avons-nous pas, enfin, gagné notre ticket pour une vie sereine, paisible, prospère  et digne, à mille lieues des conflits et tiraillements de la terre entière ? Nos politiciens, censés nous protéger, nous défendre et surtout nous servir, ne pourraient-ils pas faire preuve de clémence, de conscience  et de décence à l’égard d’un peuple qui continue de donner au monde, et ce malgré son calvaire, une magistrale leçon de vie, de courage, de pugnacité, d’ingéniosité unique à rebondir et d’optimisme impénitent ? Il est à croire que parfois, sous d’autres cieux, la vie d’un taureau a plus de valeur et de poids que celle de tout un peuple au pays du Cèdre… Dr Maria BASSIL Article paru le Mercredi 6 Juin 2007
J’avais fait de la résistance pendant mes dix années de vie à Montpellier, ville du sud de la France, mitoyenne d’Arles et de Nîmes, où sévissaient les corridas durant l’été. Par principe et par amour des animaux, je m’étais toujours élevée contre cette violence gratuite qu’offraient ces spectacles à des aficionados survoltés.
Mais un jour, pendant un séjour à...