Rechercher
Rechercher

Actualités

La descente aux enfers s’achève pour Ioukos, désormais privé de siège

Le groupe pétrolier russe déchu Ioukos, déjà dépouillé ces dernières semaines de ses principaux actifs pour le plus grand profit de son rival public Rosneft, a symboliquement achevé sa descente aux enfers hier en cédant son siège à un groupe inconnu. Une fois n’est pas coutume, Rosneft, fréquemment dépeint comme le bras armé du Kremlin dans sa reconquête de l’industrie pétrolière après le bradage des années 90, n’a pas emporté le lot numéro 13, comme il avait gagné la plupart des autres lots déjà mis en vente. Il s’est fait damer le pion au terme d’enchères très disputées par un groupe inconnu, Prana, qui n’était jamais encore apparu lors des neuf tours précédents (deux enchères ont été annulées faute de postulants). Les deux rivaux se sont affrontés pendant près de trois heures et ont surenchéri plus de 700 fois, du jamais-vu jusqu’ici chez Ioukos, où les lots étaient généralement attribués en quelques minutes. Le prix a plus que quadruplé, atteignant 3,88 milliards de dollars. Le lot numéro 13 était composé d’une quinzaine de participations dans diverses sociétés, dont le siège de Ioukos, situé au centre de Moscou et où se déroulaient justement les enchères. Ioukos avait emménagé en 2003 dans ce bâtiment, une tour moderne de 22 étages. Il est équipé de 1 300 postes de travail et compte 28 600 mètres carrés. Moscou est l’une des villes les plus chères du monde en matière d’immobilier. Du temps de sa splendeur, avant le début de la campagne lancée en 2003 contre le groupe de Mikhaïl Khodorkovski, les murs du hall d’entrée de Ioukos étaient ornés de photos de leur patron serrant des mains lors de ses déplacements sur le terrain. Aujourd’hui, l’ancien homme le plus riche de Russie est en prison en Sibérie pour huit ans et risque quinze ans supplémentaires si les nouvelles charges qui viennent d’être retenues contre lui ne sont pas annulées. « Si Ioukos n’avait pas défié l’État, on n’aurait pas du tout le même tableau aujourd’hui », souligne Chris Weafer, analyste de la banque Alfa à Moscou, qui rappelle l’implication de Mikhaïl Khodorkovski dans la politique russe de l’époque et ses liens avec des firmes énergétiques étrangères. La descente aux enfers du groupe a commencé en 2003 avec une série de contrôles fiscaux et a conduit en août dernier à sa mise en liquidation judiciaire. « Sa destruction résume parfaitement le retour de l’État comme acteur principal de l’économie. En ce sens, l’histoire de Ioukos est l’histoire de la Russie », estime encore M. Weafer. Le groupe, autrefois chouchou des investisseurs étrangers, n’est virtuellement plus qu’une coquille vide, même si trois enchères sont encore programmées pour les semaines à venir, pour un prix de départ cumulé de 12,83 milliards de roubles (environ 500 millions de dollars). La prochaine aura lieu le 16 mai, avec un prix de départ de 65,74 millions de dollars. Les enchères qui se sont tenues jusqu’ici ont d’ores et déjà permis de recueillir 30,68 milliards de dollars, soit bien plus que le montant des dettes tel qu’il avait été estimé en février (27,5 milliards de dollars). Ioukos compte 68 créanciers dont les plus importants sont le fisc russe (pour plus de la moitié) et Rosneft. Malgré cela, les enchères devraient se poursuivre jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien à vendre, a indiqué jeudi Nikolaï Lachkevitch, porte-parole du liquidateur judiciaire de Ioukos. Rosneft apparaît au final comme le grand vainqueur de toute la procédure, grâce à laquelle il s’est hissé au rang de numéro un russe du pétrole, un titre qu’il a pu ravir à son rival, le groupe privé Loukoïl.

Le groupe pétrolier russe déchu Ioukos, déjà dépouillé ces dernières semaines de ses principaux actifs pour le plus grand profit de son rival public Rosneft, a symboliquement achevé sa descente aux enfers hier en cédant son siège à un groupe inconnu.
Une fois n’est pas coutume, Rosneft, fréquemment dépeint comme le bras armé du Kremlin dans sa reconquête de...