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Actualités - OPINION

Faire des concessions Bachir BÉCHARA

«Les États ne conservent leur indépendance qu’autant qu’ils évitent des rapports trop étroits avec des puissances supérieures à eux, qu’ils ne doivent chercher leur véritable force qu’en eux-mêmes, dans l’attachement de leur peuple, dans la sagesse de leur Administration et dans le développement de leurs richesses territoriales.» Cette réflexion émise par le prince de Metternich en 1833 au sujet de la tutelle exercée par la Russie sur l’Empire ottoman menacé par Ibrahim Pacha trouve aujourd’hui au Liban son terrain d’application. Actuellement, l’homme malade est le Liban, et les responsables libanais se doivent de méditer longuement cette pensée et d’en tirer les leçons. En effet, jamais les dirigeants libanais de tous bords n’ont sollicité avec autant d’insistance les «grâces» des puissances régionales et internationales; jamais ils ne se sont montrés aussi obséquieux envers l’étranger, aussi dépendants de lui. Pourquoi blâmer cette aliénation alors que l’esprit de division, de discorde règne au sein du peuple et que les différentes formations politiques se lancent sans discontinuer des accusations haineuses, empoisonnées, se réservant chacune le monopole de la vérité. Écartelé par des intérêts opposés, le Liban est atteint de sclérose. Et comme l’inattendu peut arriver souvent quand les situations se figent, une prise de conscience générale, un ultime sursaut s’imposent, qui exigent de tous de mettre en commun leur intelligence et leur bonne volonté, de conjuguer leurs efforts pour mettre de l’ordre dans la maison libanaise, sourds aux injonctions extérieures, de redonner aux Libanais l’espoir et le goût de vivre dans un État de droit. Tandis que les Israéliens fertilisent le désert du Néguev, on en est à se quereller indéfiniment sur l’interprétation des réformes institutionnelles et à entretenir des polémiques et des surenchères stériles. L’origine de la crise réside moins dans les institutions que dans cet égoïsme et ces antagonismes virulents, dans ce climat de suspicion et de haine, dans ce dénigrement implacable de l’autre qu’alimente un fanatisme partisan débridé, bénéficiant d’un système laxiste irresponsable. Cette image de la situation politique est d’autant plus absurde que, traditionnellement, au Liban, les alliances se nouent et se dénouent en fonction des conjonctures et non sur une base idéologique, et que les retournements d’alliance, les changements de position sont courants. La recherche d’une solution à la crise commence par une volonté ferme de dépassionner les débats politiques, par le renoncement aux rassemblements et aux manifestations populistes, par l’arrêt de l’instrumentalisation des jeunes, par le bannissement des formules extrémistes, par la suppression des symboles partisans, par l’interdiction des affiches publicitaires à connotation sectaire, par la prohibition de toute activité politique dans les enceintes universitaires, par la contribution effective des chaînes de télévision à la modération, au rejet dans leurs émissions de toute outrance verbale, à une place plus grande aux personnalités éminentes non alignées, à des programmes éducatifs et culturels. Bref, les chaînes locales doivent faire prévaloir un climat social serein et réellement démocratique pour rendre possible le dialogue et paver la voie à la réconciliation et à la confiance. Pourquoi s’obstiner à conserver ce qui est contreproductif, à s’attacher à ce qui attise les rancœurs, à ce qui ébranle les assises du pays? N’avons-nous donc rien appris des horreurs des années de guerre, quand le combat démentiel pour le pouvoir et l’esprit de défi et de domination poussé jusqu’à la démesure ont fini par jeter le pays dans l’abîme. Des hommes de religion lancent tous les jours des appels à la concorde, à la fraternité, au don de soi; d’autres personnalités nationales et étrangères font entendre la voix de la sagesse, de la raison pour débloquer la crise. Quand le salut de la patrie est l’enjeu, on n’est jamais perdant à faire des concessions réciproques. Bachir BÉCHARA Colonel à la retraite Article paru le Samedi 14 Avril 2007
«Les États ne conservent leur indépendance qu’autant qu’ils évitent des rapports trop étroits avec des puissances supérieures à eux, qu’ils ne doivent chercher leur véritable force qu’en eux-mêmes, dans l’attachement de leur peuple, dans la sagesse de leur Administration et dans le développement de leurs richesses territoriales.»
Cette réflexion émise par le...