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Actualités - CHRONOLOGIE

SOCIAL - MPDL, une ONG espagnole, s’est associée à des acteurs locaux pour travailler à Nabatiyé et dans ses environs Un projet psychosocial pour sortir les enfants de la spirale de la guerre Suzanne BAAKLINI

Depuis qu’elle a perdu sa maison durant la guerre israélienne de juillet-août contre le Liban, une fillette du Sud refuse de déballer ses affaires de sa valise dans son nouveau domicile. Elle vit comme sur le départ, et craint de perdre ses objets préférés à nouveau. Un garçon un peu plus âgé a développé une tendance à l’agressivité après la guerre, décuplée par la perte de son père, tué par l’explosion d’une sous-munition quelques semaines après la fin des hostilités. Ces deux cas, évoqués par une psychologue travaillant dans le cadre d’un projet psychosocial à Nabatiyé (Liban-Sud), ne sont pas les seuls : après avoir vécu un stress insurmontable lors des événements de l’été, beaucoup d’enfants peinent à retrouver un train de vie normal. D’où l’intérêt de tels projets, comme celui, exécuté par l’ONG espagnole « Mouvement pour la paix, le désarmement et la liberté » (MPDL), financé par le programme ECHO de l’Union européenne, et mené en collaboration avec deux associations locales, Nabaa et Beit al-Talaba. Comment refaire sourire un enfant quand ses yeux ont vu l’horreur, quand la peur persistante l’empêche de dormir la nuit, quand il peine à retrouver sa concentration pour poursuivre ses études ? Une possibilité serait de lui assurer des activités récréatives dans l’objectif de canaliser les tensions et l’énergie, et en réservant un suivi psychologique plus régulier aux enfants montrant des signes de traumatisme. Les parents n’ont pas été exclus de ce programme puisqu’ils sont, de toute évidence, la clé du bien-être des enfants, sachant qu’ils ont été eux aussi sujets à des pressions énormes durant l’été. L’équipe travaille étroitement avec les professeurs et les directions des écoles, pourvoyant non seulement un apport humain avec des volontaires auprès des enfants, mais aussi une grande part d’équipements et une contribution à la rénovation de centres sociaux (où sont accueillis des enfants de trois ans et moins). Rien ne peut mieux illustrer le résultat de ce travail que son impact sur les enfants. Visiblement très amusé par notre présence, un groupe de jeunes élèves à l’école de Kfarraman nous présente la « danse des canards », sous les directives de son animateur, un professeur de musique volontaire. Ils alternent les pas consciencieusement, le sourire aux lèvres, esquissant même une valse. Une fois la musique terminée, ils se lancent volontiers et spontanément dans des pas de danse arabe, sur un air chanté par un artiste local. Dans un autre établissement à Nabatiyé, l’école Samih Chahine, une dizaine d’élèves ont formé un « orchestre ». L’initiative est très originale vu que ce sont deux élèves, qui savent se servir de plus d’un instrument de musique, qui se sont portés volontaires pour aider leurs camarades, dont plusieurs se sont découvert une âme de percussionnistes. De telles activités permettent aux jeunes de décompresser, eux qui, après avoir été surpris par la guerre, ont dû reprendre tant bien que mal leurs études à peine un mois plus tard... D’autant plus que, faute de moyens, ces activités n’existaient pas auparavant dans ces écoles. À signaler que ce sont les élèves qui décident de s’inscrire à tel ou tel cours, ceux-ci ayant été rendus possibles grâce au matériel fourni dans le cadre du projet, dont les initiateurs essayent autant que possible de le faire exécuter par des volontaires locaux, afin qu’il y ait une continuité après la fin du programme. Apport en volontaires et en matériel Alberto Bocanegra, directeur du projet à MPDL, explique que l’action s’est concentrée sur 21 écoles et dix centres sociaux, soit environ 4 000 enfants dans 14 villages, Nabatiyé inclus. « Les centres sociaux étaient en très mauvais état et devaient être rénovés rapidement, ajoute-t-il. Nous avons reçu l’autorisation du ministère de l’Éducation pour le travail dans les écoles, et celle du ministère des Affaires sociales pour les centres. » L’objectif, rappelle-t-il, est de travailler avec les enfants, tout en restant lié à leur environnement proche. Le projet devrait durer jusqu’en septembre, avec une possible extension jusqu’en décembre. M. Bocanegra insiste sur l’ampleur des besoins dans cette région, en raison des privations chroniques durant des années, mais aussi de l’impact considérable de la dernière guerre. « Nous travaillons avec les enfants, avec un élément humain, donc qui prend du temps, d’autant plus que la source de stress ne peut être dépassée avec tous ces survols d’avions de guerre israéliens qui se poursuivent, déplore-t-il. Nous espérons trouver les moyens de prolonger ce programme afin de ne pas lâcher les bénéficiaires au milieu du travail. » Le directeur du projet reconnaît que d’autres ONG sont versées dans le même domaine, et qu’elles travaillent dans d’autres établissements et avec d’autres enfants. « J’ai proposé et organisé des rencontres informelles avec des ONG locales et internationales actives sur le terrain, afin que nous échangions nos expériences et fassions une ébauche de coordination entre nous », a-t-il dit. MPDL est une ONG espagnole internationale active dans des zones en conflit dans quelque 30 pays, surtout en Afrique et en Amérique du Sud. Elle est implantée depuis 1997 au Liban, travaillant surtout dans le domaine des soins aux enfants handicapés à l’intérieur des camps palestiniens. Elle a actuellement un projet de capacitation des femmes dans des camps à Tyr et Baalbeck. Après la guerre israélienne de l’été, elle a décidé d’entreprendre cette action auprès des enfants du Sud. Sa philosophie consiste principalement à promouvoir les valeurs de paix par le développement. Les deux autres ONG locales sont actives sur le terrain depuis des années dans le milieu social. Dans le cadre de ce projet, Beit al-Talaba, qui axe son intervention dans la zone de Nabatiyé, a pourvu un grand nombre de volontaires. Plusieurs psychologues et animateurs sont, pour leur part, des membres de Nabaa, l’autre association impliquée dans le projet.
Depuis qu’elle a perdu sa maison durant la guerre israélienne de juillet-août contre le Liban, une fillette du Sud refuse de déballer ses affaires de sa valise dans son nouveau domicile. Elle vit comme sur le départ, et craint de perdre ses objets préférés à nouveau. Un garçon un peu plus âgé a développé une tendance à l’agressivité après la guerre, décuplée par la perte de...