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Selon les villages, les habitants balancent entre hostilité et hospitalité

«Pour eux, nous sommes et nous resterons à jamais des agents d’Israël… Pourquoi donc faire semblant que le Liban est uni ? Ils ne nous aiment pas et ne peuvent pas supporter la vue d’un Casque bleu européen à proximité de la frontière », indique Ghaith, un druze du village frontalier de Ibl es-Saki (caza de Marjeyoun). Ghaith parle des partisans du Hezbollah et le « nous » qu’il utilise désigne les communautés chrétienne et druze. Mais Ghaith, comme d’autres habitants des cazas de Marjeyoun et de Hasbaya appartenant aux communautés minoritaires du la ligne bleue (druze, chrétienne et sunnite), dit qu’il « se sent plus en sécurité qu’en juillet dernier, grâce à la présence de la Finul renforcée et de l’armée libanaise ». Dans une épicerie de Ibl es-Saki, village druzo-chrétien qui a accueilli depuis 1978, année de l’adoption de la résolution 425 donnant naissance à la Finul, les premiers Casques bleus, Ghassan et Raji parlent surtout de l’argent dépensé par les forces de maintien de la paix dans la zone. « Les Espagnols emploient chez eux une centaine de Libanais qu’ils paient au moins 500 dollars par mois. Faites un simple calcul : c’est 50 000 dollars d’entrée d’argent dans la zone. Cela sans compter les dépenses des soldats au Liban-Sud », indique Ghassan. Naji renchérit : « Il faut compter aussi toutes les associations qui nous aident avec des dons, notamment la World Vision. Elles nous fournissent des bons d’essence, des bons de mazout pour le chauffage… » « Que ce soit bien clair, tout le monde est en train d’aider la région… ça n’a jamais été comme ça. Notre situation économique est de loin meilleure que durant les sept dernières années (l’armée israélienne s’étant retirée de la bande frontalière en mai 2000) », indique Ghassan. « Désormais, je peux aller dans mes champs », raconte Samer, un druze du village de Mari, non loin de la frontière. Ce n’était pas le cas avant juillet dernier, le Hezbollah ayant petit à petit transformé des terrains agricoles des villages frontaliers en zones militaires, interdisant aux propriétaires d’aller dans les champs. Samer parle aussi des appels d’offres, ouverts à tous, que les Casques bleus espagnols ont lancés, et les offres d’emploi. « Ils ont été corrects et équitables, allant même jusqu’à tirer au sort pour des emplois ou des projets », raconte-t-il. C’est le même son de cloche que l’on entend à Klaya, village exclusivement maronite de la frontière ; les habitants parlent de la sécurité, avec la présence de la Finul et de l’armée libanaise, « que l’on attend depuis trente-cinq ans ». Ils mettent l’accent aussi sur la relance au plan économique. Rania parle avec enthousiasme des cours de langue dispensés par les soldats espagnols. « Nos villages (chrétiens) sont tous pourvus de locaux pour les cours, les Espagnols déploient tous les efforts possibles et imaginables pour être acceptés : ils se sont rendus auprès de toutes les municipalités pour proposer de donner des cours de langue ; ils ont distribué des cadeaux pour al-Adha… Ce n’est pas facile pour eux… Il y a des gens ici qui leur sont très hostiles, qui ne veulent pas voir des Européens. La situation est plus facile pour les Casques bleus asiatiques, qui sont majoritairement musulmans, notamment les contingents indonésien et malaisien déployés dans le secteur est », raconte-t-elle. Toujours à Klaya, Michel parle aussi de la sécurité, de la croissance économique et dénonce : « À Khiam et à Kfarkila (villages chiites abritant beaucoup de partisans du Hezbollah), les enfants jettent des pierres en direction de certains Casques bleus et leur font des grimaces… » À Kfarkila, la porte de Fatmé a désormais été baptisée par le Hezbollah la porte de la libération. Ici, dans la rue, beaucoup de personnes préfèrent ne pas donner leur avis. Certaines personnes interrogées lancent : « Que l’on ne croie pas que la Finul désarmera le Hezbollah », ou « la présence des Casques bleus n’influe pas sur la situation. Rien n’a changé. Nous, c’est le Hezb qui nous protège. » « Depuis qu’elle s’est déployée en 1978, la Finul n’a rien fait. Que les Casques bleus soient présents ou absents, c’est la même chose », indique un individu à bord d’une voiture. Dans une épicerie, des hommes prennent le café. « Il faut que tout le monde se mette en tête que les Casques bleus sont là pour nous protéger des Israéliens. Nous ne voulons pas être envahis encore une fois par les Israéliens. Nous voulons vivre dans le calme et la paix », affirme l’un deux. Mais on lui coupe vite la parole : « Ici, nous avons vécu depuis un peu plus de six ans en sécurité. Nous n’avons pas attendu la Finul pour ça. » Dans une rue de Kfarkila, un sexagénaire regarde autour de lui avant de chuchoter : « Regardez le mont Hermon, nous sommes à la frontière. Et depuis des années, un parti a installé toute son infrastructure militaire et humaine ici… Si seulement je pouvais vous dire librement ce que j’en pense... » Pat. K.
«Pour eux, nous sommes et nous resterons à jamais des agents d’Israël… Pourquoi donc faire semblant que le Liban est uni ? Ils ne nous aiment pas et ne peuvent pas supporter la vue d’un Casque bleu européen à proximité de la frontière », indique Ghaith, un druze du village frontalier de Ibl es-Saki (caza de Marjeyoun). Ghaith parle des partisans du Hezbollah et le « nous...