Les lecteurs ont voix au chapitre

En attendant la paix L’affluence des foules aux manifestations et sit-in aggrave la situation libanaise. Déconcertés, les Libanais cherchent désespérément le fil d’Ariane qui les sortira de l’impasse, confrontés qu’ils sont à une crise économique, sociale et financière dont l’ampleur les dépasse. En dépit de cette instabilité, la promptitude de la riposte est remarquable. De toute part, des hommes politiques formulent désormais à haute voix leurs griefs en dépit de l’insécurité et de la fragilité dans le pays. Le Liban avait subi naguère une série de secousses qui avaient failli l’emporter. En tant que citoyenne libanaise patriote, j’implore l’indulgence de nos hommes politiques : « S’il vous plaît, mettez un terme à vos jeux stériles. Vous nous aideriez ainsi, ainsi que le pays, à renaître et à réaffirmer notre souveraineté sans cesse bafouée. » Malgré le désordre et le chaos, nous n’aspirons qu’à la paix de l’âme, à la liberté d’esprit, à la sérénité. Rita KASSIS Pas d’avant-première pour moi La soirée avançait hésitante au début, titubante dans ses premiers pas, mais avec de plus en plus d’assurance par la suite. Plus l’année 2007 approchait, plus les heures perdaient en lourdeur et gagnaient en allégresse. Soudain, le regard fixe, la voix haletante, il apparut sur l’écran. À ses propos, la lumière des bougies faiblit, la salle se refroidit, le brouhaha et le bruit des conversations devinrent agaçants. Tunnel, explosions, tentatives d’assassinat,disparitions, danger, sang, agressions, vengeances et même suicides…Macabres visions de l’avenir et dangereuses prédictions pour un peuple qui se sent piégé et entraîné dans des sentiers hasardeux. Rationaliste ? Je le suis peut-être aux yeux de certains. Je pense que l’avenir de mon pays, ce sont des hommes et des femmes qui le forgent ou le modifient activement et volontairement, et qu’ils ne sont pas de simples figurants dans un film capté en avant-première par des « visionnaires ». Roula DOUGLAS Ce qui lie les aounistes au Hezbollah L’alliance, jugée contre nature, entre les partisans du CPL et le Hezbollah a été maintes fois soulignée et disséquée. Il est toutefois nécessaire de conseiller aux aounistes de visionner le documentaire de la série Ahzab Loubnan consacrée au Hezbollah pour mieux connaître la vraie idéologie de ce parti, et pouvoir ainsi décider en toute âme et conscience du bien-fondé de cette alliance. Ce documentaire présente de manière très claire, et avec l’aval des dirigeants du parti, les aspirations et les objectifs réels du Hezbollah. On apprend par exemple que le parti déclare haut et fort allégeance et obéissance inconditionnelle et systématique au wali el-fakih iranien, successeur de l’ayatollah Khomeyni. Le Hezbollah dévoile aussi ses rêves d’aboutir à une république islamique au Liban, calquée sur le modèle iranien, même s’il prend soin de souligner que cela devrait se faire de manière démocratique. Quant à l’objectif ultime du parti, il apparaît très clairement qu’il s’agit de la libération de la Palestine (et non de quelques fermes perdues au Liban-Sud). D’ailleurs, la journée dédiée à la gloire du parti ne se dénomme-t-elle pas « Yom el-Qods », allusion claire à la libération espérée de Jérusalem? On nous souligne par ailleurs que la guerre fratricide qui a opposé le parti au mouvement Amal à la fin des années 80 a été en grande partie provoquée par l’approbation implicite par le mouvement Amal de l’accord de paix signé entre les Palestiniens et le gouvernement israélien, alors que cet accord avait été totalement rejeté par le Hezbollah. À ce titre, rappelons que ce triste épisode de la guerre du Liban vient contredire les affirmations de Michel Aoun, qui rappelle continuellement que les armes du Hezbollah n’ont jamais été dirigées vers l’intérieur. Que les aounistes sachent que leur alliance avec le Hezbollah va au-delà d’une simple fraternisation – ô combien louable – avec une autre communauté libanaise, mais qu’elle suppose une adhésion au plan régional de ce parti ou du moins une approbation de son idéologie affichée. Fawzi EL-HAJJ Une société civile... et civilisée Courage, mes frères, cela va aller mieux. Que ceux qui vont m’accuser, je les vois venir, d’optimisme béat et romantique accordent un regard plus incisif sur ce qui se passe aujourd’hui au Liban. Survolons un instant les campements d’infortune qui obstruent toute normalité et attardons-nous sur ce formidable dynamisme qui pousse les Libanais à ne jamais faiblir. De l’avant, encore de l’avant dans un mouvement vers la vie que les menaces de certains politiciens ne ralentissent plus. Dans les pays civilisés, la société active est le moteur, les hommes politiques rien de plus que des représentants du peuple. Chez nous, pour des raisons qui seraient trop longues à énumérer, les politiciens sont le moteur et le peuple leurs représentants. Dans les pays civilisés, l’intérêt de la patrie pousse à tous les sacrifices. Chez nous, c’est toujours un Liban sacrifié à l’autel d’une quelconque idéologie qui ne nous ressemble pas, d’un combat singulier qui nous dépasse, d’intérêts voisins qui violent les nôtres et de conjonctures régionales dans lesquelles nous ne sommes qu’une monnaie d’échange. Mais aujourd’hui, et depuis ce magnifique mouvement non télécommandé du 14 mars, doucement mais fermement, les choses évoluent, changent et font basculer le Liban vers son destin de pays ouvert, civilisé et pacifique. Les masques tombent, les mythes se désacralisent, les tabous se débrident, les initiatives personnelles mettent de l’huile dans les moteurs et font avancer la machine, et enfin la société civile prend le pas sur le politique. Les Libanais veulent s’exprimer, travailler, produire, s’ouvrir, et faire ce qu’ils font le mieux, vivre pleinement et librement cette exception qu’est leur pays. Courage, mes frères, on est sur le bon chemin. Tania HADJITHOMAS MEHANNA