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MISE EN SCÈNE Pierrick Sorin, le regard décalé d’un vidéaste à l’opéra

Personne n’imaginait Pierrick Sorin, artiste vidéaste aussi drôle que désenchanté, cosigner la mise en scène d’un opéra, et surtout pas l’intéressé: c’est pourtant ce qu’il fait au Théâtre du Châtelet à Paris, où il présente La Pietra del Paragone de Rossini. Le Nantais de 46 ans a conçu avec le metteur en scène italien Giorgio Barberio Corsetti cette nouvelle production qui sera créée en France lors de six représentations jusqu’au 28 janvier, sous la direction musicale du chef d’orchestre français Jean-Christophe Spinosi. «Je n’aurais jamais pensé qu’on me proposerait un jour de travailler sur une mise en scène d’opéra», a confié l’artiste vidéaste. Et pour cause: lui qui est allé à l’opéra pour la première fois il y a quelques mois avouait encore récemment «guère aimer» le genre. «La musique, passe encore... Mais les voix qui viennent se greffer dessus avec plus ou moins de bonheur, c’est vraiment trop. En plus, je ne comprends rien aux paroles... Quant à “mettre en scène” un opéra, voilà une idée qui me paraît assez suspecte», écrivait-il avant de présenter la production à Parme (Italie) en décembre dernier. Surtout, rien dans le parcours de Pierrick Sorin ne le prédestinait à accepter de jouer le jeu d’une aventure collective aux «conventions très décalées par rapport à la réalité» et d’une «forme d’art assez bourgeoise». Né de parents «tout ce qu’il y a de très moyens» («cadre moyen SNCF, secrétaire»), mais «ouverts et très intéressés par le théâtre», ce fils unique, resté un grand timide, développe dès l’enfance un imaginaire fécond et s’épanouit dans la solitude, ce qui restera sa marque de fabrique. Dès l’adolescence, il réalise des courts-métrages en Super 8, puis fonde, étudiant, la revue poétique Chaussette, moi non plus. Ses influences se font rapidement jour: la littérature – il cite aujourd’hui volontiers Michel Houellebecq –, les mouvements dada et surréaliste, le cinéma de Georges Méliès, Jacques Tati ou burlesque à la Buster Keaton. Pierrick Sorin fait les Beaux-Arts, devient instituteur et tâte du reportage d’images à France 3 Pays de la Loire. Surtout, il réalise ses premiers «autofilmages», tel Réveils (1988), dans lequel il se filme chaque matin pendant un mois, scène du quotidien répétitive dont il tire, par le montage, un effet comique certain. Sa carrière est vraiment lancée en 1994 quand Bernard Rapp diffuse sur France 3 sa série télévisée Pierrick et Jean-Loup, que Sorin présente comme «deux individus pas particulièrement animés par des valeurs fortes». «Dans toute sa médiocrité, l’être humain me paraît assez aimable», dit l’artiste, qui estime que sa «fragilité n’est pas triste mais créative». Depuis, Pierrick Sorin est devenu un vidéaste que le monde de l’art contemporain s’arrache, en France (Centre Pompidou, Fondation Cartier à Paris, Lille 2004, etc.) comme à l’étranger (Tate Gallery de Londres, Musée Guggenheim de New York, Biennales de Venise et Sao Paulo...). Ses petits «théâtres optiques» façon hologrammes sont remarqués dans les vitrines des Galeries Lafayette: Jean-Luc Choplin, ancien directeur artistique du grand magasin parisien devenu patron du Châtelet, lui propose bientôt de donner «un peu de fraîcheur à une mise en scène». L’opéra bouffe de Rossini permettra à Pierrick Sorin, qui incruste par l’image les chanteurs dans des décors miniatures, de cultiver son «goût pour un monde un peu enfantin». Et l’œuvre pourrait bien lui avoir fait aimer l’art lyrique: il songe déjà à un film sur les coulisses de l’opéra.
Personne n’imaginait Pierrick Sorin, artiste vidéaste aussi drôle que désenchanté, cosigner la mise en scène d’un opéra, et surtout pas l’intéressé: c’est pourtant ce qu’il fait au Théâtre du Châtelet à Paris, où il présente La Pietra del Paragone de Rossini.
Le Nantais de 46 ans a conçu avec le metteur en scène italien Giorgio Barberio Corsetti cette...