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Actualités - OPINION

Majorité et minorité en Suisse

« Je suis un très ancien lecteur de votre journal : du temps presque immémorial où il s’appelait « seulement » « L’Orient »...,nous écrit ce lecteur. Et il ajoute : « Je commence donc par adresser au Liban et aux Libanais mon salut très amical. Puis, j’aborde mon propos. » Ce sont les problèmes actuels de règles de composition du gouvernement libanais qui m’incitent à vous écrire, pour attirer l’attention des Libanaises et des Libanais sur certains aspects du système suisse, qui ne leur est pas inconnu, mais qui pourrait utilement alimenter la réflexion. Je signale d’emblée que ce que je vais dire n’a rien à voir avec le système des cantons. La Suisse ne connaît pas la règle de chef de l’Exécutif « unipersonnel », ni celle de « tandem exécutif », à l’image des régimes parlementaires dotés d’un président, avec ou sans Premier ministre, ou d’un monarque avec Premier ministre. L’Exécutif suisse est collégial, selon la formule qui fut brièvement celle du Directoire en France, au temps de la Révolution. Sept personnes se répartissent les sept ministères, constituant ainsi le gouvernement et en même temps l’autorité exécutive suprême : ils sont parfaitement égaux en pouvoir. Ils sont élus par le Parlement suisse, et leur appartenance partisane reflète toujours, depuis cinquante ans, le rapport de force des principaux partis au Parlement. Ainsi, ces dernières décennies ont vu le recul des deux partis centristes et le progrès du parti de droite : ce dernier a fini par récupérer un siège gouvernemental aux dépens de l’un des deux partis centristes. Par ailleurs, les députés majoritaires avaient longtemps choisi, pour l’élire au gouvernement, une personnalité de ce parti de droite qui n’était pas forcément celle que proposait ce parti, mais qui leur semblait plus acceptable ; mais lorsque ce parti a pris du poids électoral ces derniers dix ans, il a pu obtenir que son candidat officiel obtienne le siège gouvernemental pris aux centristes, malgré la réticence très forte de la majorité. Tout cet ajustement fut une « couleuvre à avaler » pour la majorité. Quoi que l’on pense des changements d’orientation qu’il a éventuellement induits, il n’en est pas moins un signe de souplesse démocratique. Les décisions se prennent à la majorité simple, et cela pratiquement chaque fois que la majorité décide de ne pas laisser « la bride sur le cou » à un ministre minoritaire. Ainsi, un ministre minorisé est souvent obligé de faire dans son propre ministère une politique contraire à ses vœux, mais dictée par la majorité. L’avantage du système est double : les « minorisés » du moment ont le droit et l’ample possibilité de défendre leur vision sur tous les sujets extérieurs à leur ministère. Mais une décision gouvernementale est toujours possible, il n’y a pas de possibilité de blocage, pas de risque d’immobilisme. Les décisions sont soit le fait de la majorité « parlementaire », soit, sur certains sujets le fait d’une majorité de circonstance : les représentants de la minorité peuvent en effet parfois convaincre un ou deux ministres de la majorité ordinaire. Se pose la question du nombre optimal de ministres dans ce système. En Suisse, le chiffre de sept semble presque idéal : on a parfois parlé de l’augmenter, mais on y a renoncé jusqu’à présent. La nature d’autorité exécutive collégiale suprême de ce gouvernement semble justifier la petitesse du nombre. Nombre qui doit être, bien sûr, impair. Aucun système n’est parfait. Mais celui-là permet assez bien d’associer efficacement au pouvoir la quasi-totalité des forces politiques. Là où la société nationale accorde une valeur prioritaire à cette participation de tous les partis, ce système a du bon. Paul-Rémi ETTER Genève, Suisse
« Je suis un très ancien lecteur de votre journal : du temps presque immémorial où il s’appelait « seulement » « L’Orient »...,nous écrit ce lecteur. Et il ajoute : « Je commence donc par adresser au Liban et aux Libanais mon salut très amical. Puis, j’aborde mon propos. »

Ce sont les problèmes actuels de règles de composition du gouvernement libanais qui m’incitent à...