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Actualités - OPINION

Histoire de cœur C’est décidé, j’arrête! Sandra ABI-NASSIF AWAIDA Docteur en pharmacie

Au Liban, on la sent même dans les couloirs des hôpitaux (pour ne pas dire au chevet du malade), on nous la souffle à la figure dans les bureaux gouvernementaux, on nous dévisage comme si on venait de débarquer de Mars quand on demande si une section non-fumeurs était aménagée dans un restaurant, on prie pour que le soleil soit fort et chaud pour aérer nos costumes dehors au lendemain d’une soirée rythmée… à la cigarette. Outre ces importunités peu civilisées, la consommation de cigarette est l’une des principales causes de maladies et de décès dans le monde. Le cancer, les accidents vasculaires cérébraux, les complications de la grossesse, la maladie pulmonaire obstructive ne sont que quelques exemples des ravages de la consommation de cette toxine sachant que plus de 500 000 Américains en meurent prématurément chaque année. Tout comme la drogue, on parle de dépendance au tabac. Une dépendance qui pousse 70 % des fumeurs à déclarer qu’ils souhaiteraient arrêter de fumer. La question qui demeure est celle de savoir par quels moyens ? Faut-il arrêter du jour au lendemain, ou procéder à un sevrage progressif ? Faut-il laisser notre volonté seule relever le défi ou bien avoir recours aux médicaments ? Plusieurs options thérapeutiques ont été proposées. Les plus connues et celles qui sont actuellement approuvées par la Food and Drug Administration (FDA),aux États-Unis, sont les suppléments de nicotine (en forme de patch, de chewing-gum, de spray nasal) et le bupropion à libération prolongée. L’efficacité de ces médicaments dépend de plusieurs facteurs, notamment la volonté d’arrêter de fumer, la réponse individuelle au traitement, la prise de poids résultant de l’arrêt de fumer, les facteurs de stress, le soutien familial, etc. En ce qui concerne le sevrage, il a été depuis longtemps un sujet de controverse. Passer de 20 cigarettes par jour à 5 semble être pour tout fumeur un accomplissement digne de récompense et d’encouragement. Mais connaît-on l’impact de ce sevrage progressif sur la santé ? Est-ce qu’une réduction du nombre de cigarettes consommées par jour chez les personnes hautement dépendantes à la nicotine réduirait le risque de morbidité et de mortalité ? Le raisonnement logique pousserait à dire oui. Cependant, voici ce que démontrent les résultats de trois études publiées récemment. Une étude américaine publiée dans l’édition de décembre 2006 de Cancer Epidemiology, Biomarkers and Prevention a divisé les patients en deux groupes : les personnes peu dépendantes au tabac (groupe 1) et les personnes très dépendantes au tabac (groupe 2). Les résultats ont montré que lorsque les fumeurs du deuxième groupe ont réduit leur consommation à trois cigarettes par jour, le taux de toxines tabagiques dans leur sang (pour chaque cigarette consommée) était 6 à 8 fois plus élevé que chez les fumeurs du premier groupe, qui consommaient également le même nombre de cigarettes ! Ainsi, il a été démontré que les fumeurs qui souffrent d’une haute dépendance au tabac tiraient plus intensément et plus longuement sur leurs cigarettes et, par conséquent, inhalaient des quantités beaucoup plus élevées de substances toxiques. Ce phénomène est appelé « compensatory smoking » ou tabagisme compensatoire, afin de maintenir un taux élevé de nicotine dans le sang. Une autre étude norvégienne, publiée en novembre dernier dans Tobacco Control, a montré que le fait de diminuer le nombre de cigarettes fumées par jour ne diminue pas en conséquence et proportionnellement le taux de mortalité précoce et les maladies liées à la consommation de la cigarette. L’étude a englobé 51 000 patients, suivis durant vingt ans. Une autre étude a également prouvé que le fait de réduire la consommation de cigarettes de 73 % réduirait le taux de substances cancérigènes inhalées d’un maigre 30 %. Pour conclure, voici encore quelques chiffres : 7 est le nombre de secondes que prend la nicotine contenue dans la fumée pour arriver au cerveau, 4 000 est le nombre de produits chimiques contenus dans la cigarette, 66 000 est le nombre de décès annuels liés au tabagisme en France, 11 c’est le nombre de minutes de vie gagnées pour chaque cigarette non fumée. Et si on faisait le compte ?
Au Liban, on la sent même dans les couloirs des hôpitaux (pour ne pas dire au chevet du malade), on nous la souffle à la figure dans les bureaux gouvernementaux, on nous dévisage comme si on venait de débarquer de Mars quand on demande si une section non-fumeurs était aménagée dans un restaurant, on prie pour que le soleil soit fort et chaud pour aérer nos costumes dehors au...