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Actualités - REPORTAGE

Les Asiatiques et les Africaines sont les premières victimes du trafic d’êtres humains Vers une féminisation des migrations internationales Rania MASSOUD

Aujourd’hui, environ un être humain sur 35 est un travailleur migrant. Selon les dernières estimations de l’ONU, ils sont entre 185 et 192 millions à quitter leur pays afin de trouver un emploi à l’étranger. Presque la moitié de ces migrants sont des femmes venant de pays asiatiques et africains. À l’occasion de la Journée mondiale des travailleurs migrants, « L’Orient-Le Jour » revient sur la situation de ces femmes qui émigrent à la recherche d’un travail domestique bien payé et décent, et se retrouvent, trop souvent, forcées de vivre dans des conditions déplorables, voire inhumaines. Durant la dernière décennie, les tendances migratoires ont varié, note l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), avec notamment une féminisation du monde du travail migratoire. Selon les dernières estimations de l’ONU, près de 49 % des travailleurs migrants sont des femmes. Bien que la plupart d’entre elles émigrent volontairement à la recherche d’un travail à l’étranger, beaucoup de ces femmes tombent également entre les mains de trafiquants avant d’être « vendues » comme domestiques ou esclaves sexuelles dans des pays asiatiques, comme la Thaïlande, ou dans des pays du Golfe, comme le Koweït ou les Émirats arabes unis (EAU). Selon l’OIM, près d’un million de femmes, soit le tiers des femmes prises dans les mailles du trafic d’êtres humains dans le monde, viennent du continent asiatique. Le ministère vietnamien de la Sécurité publique estime que des milliers de Vietnamiennes font l’objet d’un trafic vers la Chine, chaque année. Un sixième d’entre elles sont âgées de moins de 18 ans. L’Unicef rapporte de son côté que les femmes « vendues » en Chine – pour environ 500 USD – ont entre 15 et 45 ans, et son majoritairement célibataires, divorcées, voire veuves. Le trafic des êtres humains ne se limite pas à l’Asie. Selon l’OIM, plusieurs femmes et enfants ont été également « vendus » au Koweït, au Bahreïn et aux Émirats arabes unis pour l’exploitation sexuelle ou pour des travaux domestiques sous-payés. L’Unicef souligne en outre que de nombreux garçons du Bangladesh sont envoyés vers les EAU et le Qatar où ils sont forcés de mendier ou de travailler en tant que jockeys dans les courses de chameaux. Pour un meilleur contrôle Les autorités asiatiques craignent cependant que la féminisation du travail migratoire affecte le tissu social de leurs communautés. En effet, étant donné la durée des séjours des travailleuses asiatiques à l’étranger, le rôle traditionnel de femmes au foyer évolue. Aujourd’hui, ce sont elles qui subviennent aux besoins de leurs familles, avec ou sans l’aide d’un mari. Face à ces changements sociaux majeurs, plusieurs gouvernements asiatiques, comme le Bangladesh, le Népal et le Pakistan, ont pris des mesures restrictives contre le travail des femmes à l’étranger. Le Pakistan, par exemple, qui n’encourage déjà pas ses citoyennes à émigrer à la recherche d’un emploi, a interdit aux femmes de moins de 45 ans de quitter le pays pour un travail domestique à l’étranger. À cause de cette loi, les Pakistanaises ne représentent plus que 0,04 % du nombre total de travailleurs migrants originaires du Pakistan. Dans cette partie du continent asiatique, seul le Sri Lanka adopte ouvertement une politique encourageant ses citoyennes à émigrer à la recherche d’un emploi. En Afrique, le problème des travailleuses migrantes est aussi important qu’en Asie. Étant donné la croissance du nombre de femmes qui émigrent à la recherche d’un emploi en Europe, aux États-Unis ou au Moyen-Orient, le rôle traditionnel des femmes dans la culture africaine commence également à changer. Bien que les Africaines soient moins payées que leurs concitoyens mâles, elles participent activement à la croissance de leur économie nationale à travers le reversement d’une partie de leur salaire à leurs familles. Il est estimé qu’environ 4 milliards de dollars américains ont été envoyés en 2002 à l’Afrique subsaharienne. Un problème majeur pour le continent noir Concernant le trafic d’êtres humains, l’Unicef note que le continent noir est le plus touché par ce phénomène puisque 32 % des enfants victimes de trafics dans le monde sont des Africains. Par ailleurs, de plus en plus d’infirmières et de médecins africains choisissent d’émigrer pour un travail à l’étranger, ce qui pose un véritable problème pour ce continent qui manque de plus en plus de personnel médical qualifié. Le British Medical Journal estime que 23 000 professionnels dans les services de santé émigrent annuellement du continent noir. Le magazine britannique spécialisé note qu’entre 1993 et 2002, le Ghana a perdu près de 630 médecins, 410 pharmaciens, 87 scientifiques et 11 325 infirmières. En Grande-Bretagne, la majorité des infirmières qui ont reçu un permis de travail en 2001 sont originaires de l’Afrique du Sud et du Zimbabwe, où le sida tue chaque année près de 180 000 personnes. Plus de 40 % d’entre elles sont des enfants de moins de cinq ans. Comme le note l’OIM dans son dernier rapport sur les travailleurs migrants, il est nécessaire, surtout pour les pays développés, de favoriser un mécanisme basé sur le principe d’une immigration légale encadrée en fonction des besoins de leur marché de travail. Aujourd’hui, de plus en plus de pays affectés par les migrations internationales, comme la France, l’Espagne et l’Italie, souhaitent mieux contrôler leurs frontières à travers la signature de traités internationaux. Début décembre, le chef du gouvernement espagnol José Luis Rodriguez Zapatero s’est accordé avec les autorités sénégalaises sur le renforcement des voies d’émigration légales entre les deux pays. Une mesure nécessaire puisque, depuis janvier, plus de 30 000 émigrants clandestins africains ont débarqué sur l’archipel espagnol des Canaries, soit près de trois fois plus que le dernier chiffre record, qui remonte à 2002.
Aujourd’hui, environ un être humain sur 35 est un travailleur migrant. Selon les dernières estimations de l’ONU, ils sont entre 185 et 192 millions à quitter leur pays afin de trouver un emploi à l’étranger. Presque la moitié de ces migrants sont des femmes venant de pays asiatiques et africains. À l’occasion de la Journée mondiale des travailleurs migrants, « L’Orient-Le Jour...