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Actualités - REPORTAGE

De la Libye à l’Irak, en passant par l’Égypte et la Syrie… Les républiques héréditaires, dernière mode dans le monde arabe ? Dossier réalisé par antoine ajoury

«Toi aussi, tu seras président, mon fils. » C’est en ces termes que le journaliste tunisien Ridha Kéfi sous-titre son article dans Jeune Afrique en l’an 2000, consacré aux régimes arabes qui ont institutionnalisé des « monarchies républicaines » de fait. En effet, de la vingtaine de pays arabes nés après le démembrement de l’Empire ottoman au XXe siècle, la grande majorité sont des émirats ou des monarchies. Les autres sont des républiques dont certaines ont été créées suite à des coups d’État contre le monarque en place. Aujourd’hui, la plupart des dirigeants de ces régimes préparent leur fils pour leur succéder… La première république arabe à avoir inauguré officiellement la transition héréditaire du pouvoir a été la Syrie après la mort du président Hafez el-Assad le 10 juin 2000. Son fils Bachar lui a succédé après la modification de la Constitution pour qu’il puisse accéder au poste suprême. En principe, c’était son frère Bassel qui devait prendre les rennes du pouvoir. Durant des années, il fut préparé ouvertement sur le plan politique et même militaire, jusqu’à sa mort dans un accident de voiture. Bachar fut alors rappelé d’urgence de Londres où il faisait ses études en ophtalmologie pour être parachuté dans les sphères du pouvoir, afin d’être rapidement formé en vue de son éventuelle succession à la tête de l’État. Ainsi, depuis presque six ans, le jeune président apprenti gouverne sous l’influence de la vieille garde de son père. En Libye, le colonel Moammar Kadhafi, au pouvoir depuis 1969, prépare tranquillement son fils Seif el-Islam, 36 ans, pour lui succéder « à la syrienne ». Son entrée en politique commence en 1997 avec la création d’une association caritative, la Fondation Kadhafi. Il fait ensuite ses débuts sur la scène internationale quand il négocie la libération d’Occidentaux pris en otages par des extrémistes musulmans aux Philippines. On le retrouve également lors des discussions sur les indemnisations des victimes des attentats contre les vols de la PanAm en 1988 et d’UTA en 1989. Ces débuts prometteurs lui valent déjà le respect de plusieurs dirigeants occidentaux et d’experts en relations internationales qui voient en lui « l’homme providentiel » de la Libye de demain, surtout que Seif el-Islam semble résolument tourné vers l’Occident. Gamal Moubarak, dit Jimmy, la quarantaine, semble suivre un itinéraire similaire en Égypte, bien que, avant 2001, rien n’indiquait que le fils cadet du président égyptien Hosni Moubarak soit destiné à succéder à son père. En effet, professionnellement, le fils du « raïs » était plutôt tourné vers les finances et semblait plus intéressé par le business que par la politique. Mais, peu à peu, Gamal a commencé à occuper des postes à responsabilité au sein du Parti national démocrate (PND), au pouvoir, en montant en grade. Il assiste en outre aux réunions du gouvernement, et accompagne son père lors de ses visites officielles à l’étranger. Mais, contrairement à la Libye, la montée en puissance du fils Moubarak est vivement critiquée en Égypte par l’armée et par les islamistes. C’est surtout ces derniers qui font entendre leur voix chaque fois que les circonstances se présentent pour dénoncer la dérive monarchique du régime égyptien qui n’a pas connu durant son histoire moderne un tel cas, ni avec Nasser ni avec Sadate, qui avaient tous les deux des fils. L’Irak de Saddam Hussein a suivi la même démarche avec quelques différences. En effet, les héritiers du dictateur de Bagdad étaient deux. D’abord son fils aîné Oudaï qui avait une réputation de cruauté affirmée. Il dirigea une chaîne de télévision et un journal, Babel. Il présida en outre le Comité olympique qui lui a servi de paravent à la contrebande durant l’embargo sur son pays. Plusieurs histoires ont circulé autour de son comportement violent : du viol jusqu’à l’assassinat à bout portant de l’un des gardes du corps de son père. Ses excentricités lui ont valu d’être mis en disgrâce par Saddam Hussein qui désigna son fils cadet Qoussaï comme son éventuel dauphin. Ce dernier a ainsi contrôlé l’appareil de sécurité du dictateur irakien et est devenu son secrétaire particulier. Il avait également une forte influence sur la diplomatie de son pays durant les dernières années du règne de son père. L’invasion américaine et la chute du régime de Bagdad balayèrent évidemment les espoirs de Saddam de voir l’un de ses enfants lui succéder. Oudaï et Qoussaï furent tués lors d’une opération militaire américaine à Mossoul. Ils avaient respectivement 39 et 36 ans. Comme le souligne Ridha Kéfi, « un demi-siècle après son apparition dans le monde arabe, le système républicain n’est pas encore entré dans les mœurs ». Alors que les cas de république héréditaire se multiplient, on peut en conclure qu’il s’agit là d’un principe et non d’une exception. En effet, ces formes « pathologiques » du régime républicain semblent être la dernière mode, la dernière trouvaille d’un monde arabe en crise.
«Toi aussi, tu seras président, mon fils. » C’est en ces termes que le journaliste tunisien Ridha Kéfi sous-titre son article dans Jeune Afrique en l’an 2000, consacré aux régimes arabes qui ont institutionnalisé des « monarchies républicaines » de fait.
En effet, de la vingtaine de pays arabes nés après le démembrement de l’Empire ottoman au XXe siècle, la grande...