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Actualités - CHRONOLOGIE

RÉLEXION - À propos du film de Jocelyne Saab Dounia, ou l’initiation

Récemment sorti sur les écrans libanais, Dounia de Jocelyne Saab retrace le parcours de Dounia, jeune fille égyptienne qui tente de vivre sa féminité dans une société stricte et très conservatrice. En développant sa passion pour la danse, Dounia rend hommage à une mère dont la profession et le souvenir font honte à la famille. Défiant les préjugés de sa société, elle essaie d’y trouver sa place. Toujours habillée de rouge, rouge couleur de la passion, rouge couleur de sang, Hanane Turk incarne Dounia, la femme sensuelle qui se bat dans un monde hostile à la sensualité, montrant son corps quand tout le monde cherche à le voiler, étudiant la poésie érotique quand tout le monde cherche à l’occulter. Dounia se démarque donc par un non-conformisme qu’elle n’a pas peur d’afficher. Accompagnée de deux femmes qui cherchent chacune à sa manière à vivre ce non-conformisme, elle erre dans la ville à la recherche de son identité. Qui est Dounia vraiment? Est-elle la réincarnation symbolique de sa mère? Est-elle poétesse? Est-elle danseuse? Est-elle une femme traditionnelle au sens où elle se conforme aux normes que sa société lui impose, ou bien est-elle libérée de ses normes?... En fait, Dounia est un peu tout ça en même temps, elle est à la fois traditionnelle et libérée. Dounia est le modèle de la fille arabe, moyen-orientale d’aujourd’hui, une fille coincée entre les attentes d’une société conservatrice et l’ouverture vers l’Occident, et les cultures dites plus «libérées». Dounia soulève le problème de la sensualité et du plaisir féminin dans une société qui occulte le corps féminin et refuse à la femme le droit au plaisir, notamment par l’excision. Dans le courant du film, nous apprenons que Dounia et l’une de ses compagnes en ont été victimes, et voilà ce qui les empêche de jouir pleinement de leur corps. C’est alors que nous comprenons pourquoi Dounia s’acharne tellement à travailler son corps. C’est une façon pour elle de renouer avec son intimité, de se sentir à l’aise dans ce corps si longtemps bafoué. Dans le même ordre d’idées, Dounia choisit de travailler la poésie arabe érotique. Ce choix n’est pas anodin. Il lui permet d’appuyer sa propre quête de sensualité et de trouver des réponses à son éveil sensuel dans les livres et chez les grands poètes. Car, à ses yeux, nul mieux que ces grands génies n’a su décortiquer les mystères de l’amour et de la passion. Mais tout le monde ne perçoit pas la poésie et la littérature de cette façon... En effet, accusés d’outrage aux bonnes mœurs, des ouvrages tels que Les Mille et Une Nuits sont censurés, et le professeur de lettres incarné par Mohammad Mounir est mutilé parce qu’il s’est opposé à cette censure. D’ailleurs, le film a lui-même failli être interdit parce qu’il touche à des sujets tabous dans les sociétés arabes… Finalement, Dounia est un film d’initiation à la vie, à l’amour et à la sensualité. À la fin du film, Dounia a mûri, elle a compris la vie, elle a expérimenté l’amour et la sensualité ; elle a découvert qui elle était. L’ombre de sa mère ne lui pèse plus et c’est sans regret qu’elle laisse s’envoler le dernier souvenir qu’elle avait d’elle. Dounia a coupé le cordon. Zeina ANTONIOS

Récemment sorti sur les écrans libanais, Dounia de Jocelyne Saab retrace le parcours de Dounia, jeune fille égyptienne qui tente de vivre sa féminité dans une société stricte et très conservatrice. En développant sa passion pour la danse, Dounia rend hommage à une mère dont la profession et le souvenir font honte à la famille. Défiant les préjugés de sa société, elle...