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Actualités - OPINION

La tentation de la dictature Par Carlos EDDÉ *

L’histoire a prouvé que la pire des démocraties est toujours préférable à la meilleure des dictatures ! L’exemple de l’Allemagne des années trente en est l’illustration la plus fidèle. La montée de Hitler et du parti nazi La crise économique de 1929 prive l’Allemagne et l’Autriche des capitaux américains investis après-guerre, et ces deux pays sont encore plus durement touchés que les autres, créant un chômage sans précédent. L’activisme du parti nazi attire à lui une très importante clientèle électorale. Aux élections générales de septembre 1930, le parti nazi obtient 18,3 % des voix du corps électoral et remporte 107 sièges au Parlement allemand. Début 1932, le parti compte 1,5 million d’adhérents, dont 350 000 SA et SS qui multiplient les exactions et les démonstrations de force. Les formations nazies utilisaient des chemises de couleurs, brunes pour les SA et noires pour les SS… Après une campagne électorale sans précédent sur le plan de la propagande agressive et démagogique, Hitler obtient aux élections présidentielles 37,3 % des suffrages, mais il est battu par le vieux maréchal Hindenburg. Aux élections générales de novembre, le parti nazi remporte 33,1 % des voix. Il insiste pour former un gouvernement d’union avec la majorité, mais le maréchal Hindenburg refuse. Touché par sa défaite, Hitler comprend que, pour arriver au pouvoir, il doit pactiser avec les milieux d’affaires. Et ce sont les barons de l’industrie allemande qui incitent le maréchal Hindenburg à nommer Adolf Hitler, le 30 janvier 1933, au poste de chancelier du Reich. La collaboration avec le maréchal Hindenburg et le poste de chancelier ne sont qu’un prétexte pour prendre le pouvoir. Par les menaces, le chantage et la violence, un parti minoritaire réussit à s’imposer à la majorité et, une fois au pouvoir, à éliminer toute autre force politique. L’arrivée des nazis au pouvoir Le but du parti nazi est l’instauration d’une dictature, seule capable, selon Hitler, de reconstruire l’Allemagne et de lui permettre de retrouver sa place dans le concert des grandes nations en développant un gigantesque programme de conquêtes militaires nécessaires à son espace vital. Dès le 1er février 1933, le nouveau chancelier Hitler obtient du vieux maréchal Hindenburg la dissolution du Parlement. Pendant la campagne électorale, le 27 février, le bâtiment du Reichstag est totalement détruit par un incendie criminel attribué aux nazis. Dès le lendemain, un nombre de leaders de la gauche sont assassinés ou envoyés vers les premiers camps de concentration, les journaux suspendus de parution et les meetings interdits. Les libertés fondamentales sont abolies. Peu à peu, tous les partis et syndicats, autres que ceux d’inspiration nazie, sont dissous, et le 14 juillet, le NSDAP est proclamé parti unique. La dictature de Hitler Un régime de terreur s’installe rapidement sous l’action conjointe des SA et des SS auxquels se joint la nouvelle police d’État, la Gestapo. Une vaste épuration est conduite dans les administrations et dans les organes judiciaires, où les fonctionnaires indépendants sont remplacés par des nazis dociles. En janvier 1934, les assemblées régionales sont remplacées par des gouverneurs dépendants directement du chancelier Hitler. Le 2 août 1934, le vieux maréchal Hindenburg meurt. Hitler supprime immédiatement la fonction de président et se fait plébisciter, le 19 août, comme Führer, le chef unique et tout-puissant de l’État qui va agir sur tous les aspects de la vie sociale et politique des Allemands. L’élite intellectuelle allemande, comme Albert Einstein, Thomas Mann, Stefan Zweig, quitte le pays. Au sein de son parti, Hitler commande seul et impose à ses collaborateurs une soumission absolue. Nul ne se hasarde à le critiquer de peur d’une réaction violente, ce qui plus tard entraînera des revers militaires qui conduiront l’Allemagne à la défaite. Le 30 juin 1934, Hitler fait assassiner plusieurs de ses partisans. Parmi eux Gregor Strasser et Ernst Röhm, chef de la SA. Comment Hitler a pu séduire le peuple allemand ? D’abord par un culte du chef et une structure psychologique de masse qui se basent sur la concordance psycho-politique entre les structures caractérielles autoritaires des individus, notamment celles des meneurs, et les bases psychologiques de masse des régimes totalitaires. Elle consiste dans la manipulation des frustrations existantes de la société. Pour cela, il faut détourner l’attention des gens des problèmes internes en créant des ennemis domestiques et externes. Cette stratégie fonctionne particulièrement parmi la population humiliée, frustrée, revancharde et haineuse. Et surtout il détient le contrôle absolu des médias, évitant les critiques et s’assurant que seul son message sera diffusé. Le ministère de la Propagande, dirigé par Joseph Goebbels, utilise les moyens de communication les plus modernes, comme la radio ou le cinéma pour diffuser l’idéologie nazie. Des rassemblements spectaculaires et impressionnants de militants habillés d’une même couleur sont organisés à la gloire des nazis. Hitler écrivait : « Si vous désirez la sympathie des masses, vous devez leur dire les choses les plus stupides et les plus crues. » (Mein Kampf, 1925). Ses discours, ponctués d’injures et émaillés de propos vides de sens ont enflammé un peuple pourtant intelligent, mais qui voulait croire en un messie plutôt qu’à un chef d’État. Hitler disait aussi qu’un mensonge répété mille fois devient une vérité. La psychose paranoïaque De plus en plus, les spécialistes sont d’accords qu’Hitler souffrait de graves troubles psychologiques ; il avait toutes les caractéristiques d’un grand paranoïaque mégalomane, méprisant et haineux. Se prenait-il réellement pour le « sauveur » de l’Allemagne ? Une chose est sûre : un personnage qui suscite ce type de questionnements a de sérieuses chances d’être atteint de « psychose paranoïaque », une « maladie de la haine », comme l’a définie la psychanalyste Micheline Enriquez. Mais attention : il ne faut pas confondre cette pathologie avec la « parano » ordinaire (tendance à se sentir observé, méprisé, insulté sans raison tout en restant capable de faire la part des choses). La psychose paranoïaque est un authentique trouble de la personnalité, avec délire (essentiellement délire de persécution et mégalomanie sans limite, souvent assorti de délire mystique). Ces caractéristiques donnaient à Hitler sa verve quand il parlait en public, et faisaient en sorte que les discours violents basés sur la haine et le mensonge triomphent sur les propos rationnels. L’aveuglement des Allemands qui l’ont soutenu a conduit l’Allemagne à la ruine et le monde à la guerre la plus sanglante de tous les temps. « Pour que le mal triomphe, il suffit que les gens bien ne fassent rien », écrivait Edmund Burke (1729 – 1797). Toute ressemblance avec un homme politique libanais serait fortuite. À bon entendeur, salut. * « Amid » du Bloc national.
L’histoire a prouvé que la pire des démocraties est toujours préférable à la meilleure des dictatures ! L’exemple de l’Allemagne des années trente en est l’illustration la plus fidèle.

La montée de Hitler
et du parti nazi
La crise économique de 1929 prive l’Allemagne et l’Autriche des capitaux américains investis après-guerre, et ces deux pays sont encore plus...