RENCONTRE - Bon vent, mauvais vent, le programme d’al-Bustan est déjà fixé Myrna Boustany en est convaincue : « Les festivals sont aussi des actions humanitaires »

Événement musical attendu de la saison d’hiver, le programme du Festival al-Bustan est d’ores et déjà prévu pour le 21 février et se déroulera jusqu’au 25 mars. Aux couleurs de l’Espagne, il égaiera l’hiver morose du Liban. Encore un défi relevé pour la si déterminée Myrna Boustany ! «S’il faut que le festival s’arrête un jour (car rien ne dure éternellement), je ne voudrais pas qu’il le soit de force. Je suis persuadée qu’il prendra fin un jour, mais ce sera lorsqu’il aura accompli sa mission et qu’il devra aller se tourner vers autre chose », affirme Myrna Boustany avant d’annoncer fièrement que le festival édition 2007 aura lieu malgré tout. Et de poursuivre : « J’ai beaucoup hésité avant de prendre cette décision, mais le comité m’a beaucoup encouragée. Ayant engagé, auparavant, les contacts avec les artistes afin de confirmer leur venue, je suis parvenue à restreindre le programme. Il y avait, d’une part, ceux qui tenaient à venir, particulièrement cette année, pour affirmer leur soutien au Liban et, de l’autre, les hésitants que je me suis empressée de décourager. » La gaieté de l’Espagne Un festival n’est pas une tâche facile. Son programme se concocte un an, parfois même deux, à l’avance quand il s’agit des opéras et des grands ensembles. Et pour un pays de turbulences comme le Liban, l’agenda n’est jamais à l’abri des changements. « Depuis l’inauguration du premier festival (il y a quatorze ans), le pays a traversé différentes crises, avoue Myrna Boustany, mais jamais comme la toute dernière. Après la mort du président Hariri, l’équipe du festival ainsi que les artistes étaient dans la rue pour participer à la révolution du Cèdre. Mais aujourd’hui, après cette guerre violente, nous affrontons deux dangers très graves : d’abord le manque de confiance qu’on retrouve partout et, ensuite, une population qui se vide de sa substance. Si j’ai tenu à poursuivre l’entreprise du festival, c’est pour enrayer cette morosité qui s’installe peu à peu dans nos cœurs.» «La musique n’est pas une chose légère, dit-elle, encore moins superficielle. C’est un sujet grave qui touche toute l’humanité, qui permet de réconcilier les populations entre elles et les aide à surmonter leur dépression. Un festival est semblable à toute autre action humanitaire qui crée une chaîne permettant de fournir du travail à différents secteurs de la vie active et procure aussi de la joie.» Au départ, le Festival al-Bustan a été créé afin de donner à la musique classique le rôle qui lui échoit. « Les Libanais n’étaient pas familiarisés à cette musique qu’ils considéraient comme funèbre et morbide. » Au fil des ans, un public est né avec une écoute unanime et une compréhension de la musique, atteignant même les jeunes. Enfin, un orchestre symphonique a vu le jour. « C’était notre plus grande victoire », dit la présidente du festival. Habituée à la musique classique dès son enfance, Myrna Boustany a toujours voulu partager avec les autres ce qu’elle a considéré avoir été un privilège pour elle. « Mon père m’a appris deux choses, dit-elle. N’avoir peur de rien et essayer autant que possible de maintenir notre beau pays au rang de leader. C’est ce que j’essaye de faire. Si je considère que le festival a, jusqu’à présent, atteint son but, une seule chose pourrait cependant me faire encore plaisir, créer des salles sophistiquées du point de vue acoustique pour recevoir des formations musicales diverses. Le ministère de la Culture est prêt à nous soutenir. C’est la paix que nous attendons. » Colette KHALAF