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Actualités - CHRONOLOGIE

Santé publique - Une crise humanitaire qui risque d’être grave Le Liban est menacé d’épidémies si les conditions de vie des déplacés ne sont pas améliorées

Des enfants qui se lavent dans des eaux de bassin, des femmes qui cuisinent avec de l’eau de robinet, des mouches qui puisent dans les aliments… Les images diffusées sur le petit écran concernant le manque d’hygiène dans les centres de réfugiés en disent long sur les risques d’épidémies qui pourraient survenir si les mesures de précaution et de prévention n’étaient pas prises dans les plus brefs délais. Le problème auquel fait face le Liban au niveau de la santé publique est énorme. Et de l’aveu de plusieurs spécialistes, le pays n’a pas été confronté à une telle crise sur le plan de la santé publique depuis la grande famine de la Première Guerre mondiale, en 1916. En effet, en plus de la crise observée au niveau des hôpitaux, dont plus de 60 % interrompront leurs activités dans les prochains jours si le problème des carburants n’est pas réglé ce week-end même, des épidémies de maladies infectieuses et respiratoires risqueraient de surgir et de « s’étendre au-delà des centres des réfugiés vers l’ensemble de la population ». Jusqu’à ce jour, des cas de poux et de galle ont été déclarés dans certains centres de réfugiés, selon l’ordre des médecins. Bien que le ministère de la Santé ait envoyé des shampooings médicaux et des crèmes spéciales, le problème persiste encore à cause du manque d’eau propre. « Sur le plan infectieux, ce sont les maladies cutanées aiguës qui vont être le plus observées », explique le Dr Jacques Mokhbat, chef du département de médecine interne à la faculté de médecine de l’Université libanaise. Ainsi, en plus des cas de poux et de galle déjà signalés, des maladies cutanées comme l’impétigo (infection contagieuse et auto-inoculable de la peau, d’origine bactérienne, le staphylocoque et le streptocoque, à titre d’exemple, ayant tendance à suppurer) peuvent survenir. Au niveau gastrique, le problème est tout aussi grave. « L’eau de bassin qu’utilisent les réfugiés est riche en microbes et en parasites, les produits laitiers et les viandes mal conservés, et les légumes lavés avec une eau souillée vont être une source de contamination entraînant des gastro-entérites, principalement dues à la salmonelle, et des fièvres typhoïdes », note le Dr Philippe Chédid, pédiatre, doyen de la faculté de médecine de l’Université libanaise. « La malnutrition, notamment le manque de lait maternisé pour les nourrissons et de lait pour enfants, va être à l’origine de carences en vitamines et en sels minéraux, poursuit le Dr Chédid. Le manque de lait chez les nourrissons pourrait de même affecter leur croissance psychique et physique. Il ne faut pas non plus oublier les troubles psychologiques qui commencent d’ailleurs à être détectés chez certains enfants. » Sur le long terme, des maladies comme la tuberculose et l’hépatite pourraient surgir, avertit le Dr Mokhbat. « Le problème de la tuberculose, c’est qu’elle n’apparaît pas immédiatement, mais plusieurs mois, voire plusieurs années, plus tard, et qu’elle est contagieuse, souligne-t-il. De plus, la surpopulation pourrait entraîner des maladies respiratoires contagieuses. » Et le Dr Mokhbat de poursuivre : « La mauvaise hygiène et la mauvaise gestion des déchets vont favoriser l’accumulation des animaux comme les rats et les souris, et la prolifération de mouches et de moustiques. Ces animaux et insectes peuvent être porteurs de germes. Les mouches, à titre d’exemple, pourraient porter les salmonelles et autres microbes dans leurs pattes et les transporter sur l’alimentation. Il faut être prêt à affronter ces problèmes, à les diagnostiquer et à les suspecter correctement. » Le Dr Mokhbat met également en garde contre les maladies sexuellement transmissibles qui risquent de se développer à cause de la promiscuité. Précisant que le problème ne se limite pas uniquement aux déplacés dans les centres répertoriés, mais s’étend aussi à ceux qui se sont réfugiés dans des immeubles en construction ou dans des abris souterrains, le Dr Mokhbat remarque que le secteur médical « risque de faire face à des épidémies de gastro-entérite, de typhoïde, de varicelle, de rougeole et, avec l’approche de l’hiver, de grippe humaine ». Existe-t-il un moyen de prévenir la crise ? Oui, selon le Dr Mokhbat, qui prône « une bonne organisation et centralisation des efforts, et une bonne répartition des responsabilités ». Pour le Dr Philippe Chédid, il s’agit en premier lieu d’assurer un environnement propre aux déplacés dans les centres où ils se trouvent, « le temps de pouvoir les placer dans des endroits plus sains ». « Mais il faudrait surtout vacciner les enfants en plus contre la typhoïde et l’hépatite A », conclut-il. Malheureusement, le ministère de la Santé s’est limité à ce jour aux vaccins contre la poliomyélite et la rougeole. Nada MERHI

Des enfants qui se lavent dans des eaux de bassin, des femmes qui cuisinent avec de l’eau de robinet, des mouches qui puisent dans les aliments… Les images diffusées sur le petit écran concernant le manque d’hygiène dans les centres de réfugiés en disent long sur les risques d’épidémies qui pourraient survenir si les mesures de précaution et de prévention n’étaient pas...