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Actualités - CHRONOLOGIE

Le ministre du Travail met en garde contre une confrontation régionale Trad Hamadé : Le pari israélien de dresser les Libanais contre le Hezbollah a échoué

Le ministre du Travail est désormais un déplacé. Depuis que les accès à son ministère sont la cible de bombardements, il s’installe, avec son équipe, là où il trouve de la place dans les bâtiments officiels, en espérant retrouver au plus vite ses propres locaux. Entre les sollicitations diverses et le déjeuner offert hier par le Premier ministre en l’honneur du ministre français des Affaires étrangères, Trad Hamadé trouve le temps de discuter avec quelques journalistes. Selon lui, la trêve actuelle annoncée par l’armée israélienne est une sorte de cessez-le-feu qui ne veut pas dire son nom. D’une part, elle vise à permettre aux Israéliens d’absorber le choc provoqué par ce qu’on appelle désormais le second massacre de Cana, en donnant un peu de temps aux esprits pour se calmer, et à l’opinion publique internationale pour être moins négative à l’égard de l’État hébreu. D’autre part, selon M. Trad Hamadé, les Israéliens estiment que la trêve permettra aux habitants du Sud de quitter leurs villages. Ainsi, ils pourront poursuivre leur plan de destruction qui prévoit de brûler la région en toute tranquillité et sans craindre de nouveaux massacres qui pourraient voir se retourner contre eux l’opinion publique. Ils pourront ainsi utiliser en toute impunité les « bombes intelligentes » qui suivent leur cible avec précision, même lorsqu’elle est souterraine. Trad Hamadé est toutefois convaincu que les Israéliens se trompent s’ils croient que les habitants vont quitter leurs maisons. « Ceux qui voulaient partir l’ont déjà fait et les autres resteront sur place. Mais le fait d’accorder cette trêve donnera une sorte de bonne conscience à Israël. » Le ministre du Travail, proche du Hezbollah, estime toutefois que si Israël peut encore provoquer des dommages terribles au Liban et à son infrastructure, il pourra difficilement vaincre militairement le Hezbollah. Selon lui, mercredi est une date butoir. « Il faut guetter ce qui se passera au Conseil de sécurité. Si un cessez-le-feu est décrété, cela signifiera qu’un compromis est en cours. Sinon, les affrontements reprendront de plus belle, Israël croyant pouvoir enregistrer une victoire sur le terrain contre le Hezbollah. » Selon le ministre, il faudra alors envisager des tentatives d’invasion terrestre, en plus des bombardements aériens. Mais rien ne laisse prévoir que cette nouvelle opération aura plus de succès que la précédente. Toutefois, M. Hamadé est convaincu que si les négociations au Conseil de sécurité échouent mercredi, il se pourrait bien que l’affrontement s’élargisse et devienne une véritable guerre régionale. « Tout dépendra de ce que veulent les Américains. S’ils se contentent d’une confrontation entre l’armée israélienne et le Hezbollah, un compromis pourra être trouvé, sur la base des propositions du Premier ministre, Fouad Siniora. Mais s’ils veulent réellement, comme l’a déclaré dimanche encore le président américain, faire du Liban l’échantillon, voire le modèle à suivre du Nouveau Moyen-Orient, l’affrontement pourra s’étendre à la Syrie et peut-être à d’autres pays. » Le plan de Siniora, avec des nuances... Trad Hamadé rappelle que le Hezbollah a appuyé globalement les sept points du plan Siniora, avec quelques petites nuances. Le Hezbollah voudrait par exemple ajouter au premier point qui concerne la conclusion d’un cessez-le-feu immédiat le retour tout aussi immédiat de tous les déplacés. Le Hezbollah souhaite aussi des précisions sur la nature de la force internationale appelée à se déployer au Sud. Selon M. Hamadé, il est hors de question d’accepter une force relevant de l’OTAN ou même de l’Union européenne. La seule force envisageable pour le Hezbollah travaillerait sous la bannière de l’ONU. Mais il faudrait définir son mandat, sa mission, ses effectifs et les moyens qui lui seront accordés. « Il faut une force qui règle les problèmes en suspens, non une force qui en pose de nouveaux », ajoute M. Hamadé. Le ministre du Travail insiste sur le fait que chaque point devra faire l’objet d’un débat au sein du Conseil des ministres et, selon lui, la position du Hezbollah est plus forte sur le plan interne, puisque les affrontements ont montré la nécessité d’adopter une véritable stratégie de défense face à la menace que représente Israël. M. Trad Hamadé s’empresse d’ajouter que les membres du Hezbollah ne sont pas férus de combats et ne tiennent pas à conserver leurs armes éternellement. « Les membres du Hezbollah préfèrent la prière au combat », affirme-t-il, avant d’ajouter que contrairement aux Israéliens, ils n’aiment pas la violence. « Les Israéliens eux, bombardent intentionnellement les civils, précise-t-il, car leur stratégie consiste à terroriser la population, à partir du moment où ils ne parviennent pas à enregistrer des victoires militaires. » Il cite à cet égard le général Michel Aoun qui a déclaré récemment que le Hezbollah, c’est pratiquement toute la communauté chiite et c’est pourquoi, selon lui, Israël se venge sur les civils. Le ministre rejette totalement l’argument selon lequel le Hezbollah utiliserait les civils comme boucliers humains. « Ces civils, déclare-t-il, sont leurs proches, puisque les combattants sont originaires des villages du Sud et les habitants sont leurs parents, leurs cousins, etc. Je vois mal comment ils pourraient les utiliser comme boucliers. De plus, les Israéliens possèdent des bombes d’une grande précision. Comment pourraient-ils, dans ce cas, faire des erreurs aussi évidentes ? Je suis convaincu qu’ils ont sciemment bombardé le bâtiment de Cana en sachant qu’il abrite des civils, car leur stratégie est d’effrayer la population. Le massacre de Cana n’est d’ailleurs pas le premier, même si c’est le plus atroce. Mais chaque jour, depuis le début des affrontements, une famille entière est décimée par les bombardements. » Trad Hamadé affirme aussi que l’unité nationale est aujourd’hui plus solide que jamais. Selon lui, s’il y a eu, au début, quelques hésitations, aujourd’hui, la plupart des Libanais sont convaincus qu’Israël avait un plan préparé à l’avance. De plus, la façon dont l’armée israélienne touche les civils soude la population autour du Hezbollah et du gouvernement. « Le pari israélien de dresser les Libanais contre le Hezbollah a échoué. Et à mesure que le temps passe, les rangs se resserrent encore plus », affirme le ministre du Travail. Scarlett HADDAD
Le ministre du Travail est désormais un déplacé. Depuis que les accès à son ministère sont la cible de bombardements, il s’installe, avec son équipe, là où il trouve de la place dans les bâtiments officiels, en espérant retrouver au plus vite ses propres locaux. Entre les sollicitations diverses et le déjeuner offert hier par le Premier ministre en l’honneur du ministre...