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Actualités - CHRONOLOGIE

Société - Recherche de « sensations fortes » plus que d’histoire véridique Ras-le-bol de la plage ? Allez dans une prison du KGB en Lettonie

Certains pays sont prêts à tout faire pour attirer les touristes. La Lettonie a de belles plages et une excellente cuisine, mais pourquoi ne pas y aller goûter aux brimades et aux insultes, voire à une exécution, dans une ancienne prison du KGB ? Par une chaude journée de juillet, une vingtaine de « prisonniers », 15 étudiants et enseignants lettons, ainsi que quatre Américains dont un garçon de huit ans, se font écrouer à Liepaja, une ville dans l’ouest de la Lettonie. « Savez-vous à quoi sert cette prison ? » lance le gardien chef, incarné avec un réalisme terrifiant par Einars Meiris. « Elle est pour les espions capitalistes qui cherchent des informations sur nous. Mais ici, ils vont nous avouer tout ce que nous voulons savoir sur eux et leurs pays occidentaux comme l’Allemagne, la France et bien sûr les États-Unis, notre plus grand ennemi », affirme-t-il. « C’est facile, on vous enferme dans une cellule noire pour 24 heures et vous devenez coopératifs. Sinon, on a d’autres exercices physiques pour vous, par exemple deux nuits sans sommeil », ajoute-t-il, alors que la porte d’une cellule noire privée d’air se referme brusquement. Les Américains Brandon Fowler, 28 ans, et sa sœur Arielle, 27 ans, se laissent enfermer dans une pièce humide, sentant la putréfaction et le corps humain après le précédent groupe de « prisonniers » qui a passé dans la cellule 10 minutes, les mains en l’air. Une fois à l’extérieur, Brandon, originaire de Los Angeles, se confie à l’AFP : « Nous sommes là en mission pour notre gouvernement. Je suis venu avec ma sœur pour avoir l’air de touristes et nous avions des cigarettes à offrir en pot-de-vin pour essayer de s’en sortir. » Jouant bien son rôle d’espion américain, il continue : « Quand ils nous ont attrapés, ils ont immédiatement demandé d’où nous étions et ce que nous sommes venus faire ici. Ils ont fumé nos cigarettes et nous ont enfermés dans une pièce noire pour trois minutes. » Les Fowlers et les autres « prisonniers » se sont rencontrés devant les portes de la prison. Ils ont ensuite été rapidement conduits par les « gardiens » dans la cour intérieure et obligés d’exécuter tous leurs ordres. Pas d’exception pour quiconque, même pas pour le garçon de huit ans. Des escaliers à monter, une attente dans un couloir mal éclairé et plein d’odeurs de la sueur humaine et de lourds souvenirs. La prison a été construite en 1905 pour des marins révoltés de la Russie tsariste. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a été utilisée par l’Allemagne nazie pour y détenir des déserteurs et des résistants. Les Soviétiques qui occupèrent la Lettonie pendant cinq décennies après la guerre y gardaient des opposants au régime communiste. Brusquement, un coup de feu retentit. Le garçon pousse un cri. Les « gardiens » l’autorisent à quitter le bâtiment. Les autres sont obligés de brosser le plancher, de rester les mains en l’air, appuyées contre les murs noirs de cellules où les nazis et les Soviétiques entassaient jusqu’à 34 prisonniers sur quatre mètres carrés. « Ils nous ont dit que nous irons nettoyer les toilettes, si nous baissons les mains. Je ne sais pas si vous avez vu ces toilettes... », raconte Arielle, la sœur de Brandon, l’espion américain. Les toilettes, ce sont des trous dans le plancher de cette prison en briques rouges, définitivement fermée en 1997. « Quand nous en avons pris la gestion, elle était en piteux état », explique Einars Meiris, une fois terminé le tour d’attractions. La transformation d’une prison en attraction touristique a suscité des controverses, reconnaît Einars Meiris, qui avait huit ans en 1991, quand la Lettonie avait recouvré son indépendance vis-à-vis de Moscou. Il est lui-même sceptique quant à la leçon d’histoire que peuvent en retenir les amateurs du passage dans une prison du KGB, moyennant cinq euros. « Ils cherchent des sensations extrêmes et non une leçon d’histoire. Ils téléphonent à la maison et disent : hallo, chérie, je suis en prison. »
Certains pays sont prêts à tout faire pour attirer les touristes. La Lettonie a de belles plages et une excellente cuisine, mais pourquoi ne pas y aller goûter aux brimades et aux insultes, voire à une exécution, dans une ancienne prison du KGB ?
Par une chaude journée de juillet, une vingtaine de « prisonniers », 15 étudiants et enseignants lettons, ainsi que quatre Américains dont un...