Rechercher
Rechercher

Actualités

La cause de la pierre

En ces temps où les crimes contre l’humanité viennent, comme à plaisir, achever les atrocités de la nature, où les politiciens «de chez nous» prennent grand soin de tout rater, où – excusez le malheureux cliché – les riches s’enrichissent toujours et les pauvres continuent à s’appauvrir, ignorer l’homme et sa misère pour clamer haut et fort la cause de la pierre, cela relève-t-il de l’inconscience? Alors, je l’affiche, mon inconscience, pour chanter les louanges de la pierre, la pierre de Beyrouth qui porte en elle la mémoire d’un peuple éternellement jeune, toujours en quête de maturité. Une maturité que nous avons longtemps cru pouvoir puiser dans la pierre. Celle, ancienne, des occupants, du Romain au Français, des performances grandioses de Baalbeck aux dîners huppés de la Résidence des Pins. Comme nous avons cru puiser notre unité dans la pierre phénicienne de Byblos et de Tyr. Le résultat décevant – ni maturité ni union – ne nous a pas découragés. Nouvelle recette au menu libanais: la jeune pierre beyrouthine vient à la rescousse. Et pour un moment, l’illusion est là: le centre-ville, éclatant de modernité à l’ancienne, semble réussir cette union tant recherchée. On accourt de toutes les régions pour recueillir les offrandes de la nouvelle pierre beyrouthine, et on oublie tous les Beyrouth enfouis sous terre. Les Libanais sont désormais convaincus que la pierre jeune a réussi là où la pierre historique s’est avouée vaincue. À bas l’histoire, et que vive la révolution de la pierre moderne! On s’apprête encore dans quelque temps à raser la mémoire de quelques familles et de quelques talentueux architectes au quartier de Gemmayzé. À la place de maisons au charme traditionnel – supposées être des bâtiments classés... –, émergeront des tours dignes d’une grande métropole. Des anciennes bâtisses, il n’en restera que quelques photos que prendront les amoureux de Gemmayzé, qui accourent déjà pour faire leurs adieux à la pierre. Louange à la pierre de Beyrouth, fragile gardienne de la mémoire de l’homme. Diana KALLAS

En ces temps où les crimes contre l’humanité viennent, comme à plaisir, achever les atrocités de la nature, où les politiciens «de chez nous» prennent grand soin de tout rater, où – excusez le malheureux cliché – les riches s’enrichissent toujours et les pauvres continuent à s’appauvrir, ignorer l’homme et sa misère pour clamer haut et fort la cause de la...