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Des équipes de démineurs en manque d’hommes L’armée libanaise procède au cas par cas, dans les zones à haut risque

Le colonel Mohammad Fehmi dirige le Bureau national du déminage (NDO) depuis deux mois, après avoir fait partie des services de renseignements de l’armée pendant de nombreuses années. Il estime que les opérations de déminage entreprises depuis l’année 1990 ont déjà permis de détruire 150 000 mines, sur un total estimé, selon des statistiques préliminaires, à 600 000 mines, UXOs et pièges en tout genre, dont certaines non conventionnelles. Mines dont la grande majorité est aujourd’hui principalement concentrée au Liban-Sud, autour de la ligne bleue, mais aussi dans la zone baptisée zone 6, qui regroupe 151 villages des cazas de Nabatiyeh, Jezzine, Hasbaya et une partie de la Békaa-Ouest, et qui s’étale au nord du Litani sur une superficie de 583 millions de mètres carrés. Quant au coût total du déminage sur l’ensemble du territoire libanais, il est estimé à 50 millions de dollars, compte tenu de la nécessité d’embaucher davantage de démineurs pour accélérer les opérations. Mais les fonds manquent et l’armée doit se résoudre à procéder au cas par cas, avec les moyens du bord. «Au début des opérations de déminage, en 1990, le Liban a été partagé en 6 zones, pour en faciliter le déminage. C’était la capitale, Beyrouth, qui était alors prioritaire », explique le colonel Fehmi. Avec le retrait israélien, en 2000, l’attention des démineurs s’est tournée vers le Sud, dont la partie située au sud du Litani a été déminée grâce au fonds de 33 millions de dollars débloqué par les Émirats arabes unis. Sauf la ligne bleue, dont le déminage est toujours gelé, par décision politique. Des cartes couvrant 80 % des champs de mines « Ainsi, précise-t-il, en 2005, environ 2 millions de mètres carrés ont été nettoyés, portant à 30 millions et demi le nombre de mètres carrés nettoyés des effets des mines depuis l’année 1990. Un déminage qui a été réalisé à 90 % par l’armée libanaise, avec la collaboration d’organisations humanitaires locales et étrangères, et avec l’assistance technique et logistique de la MACC SL des Nations unies. » Mais il évoque aussi l’impossibilité de déminer le pays dans sa totalité, d’autant que les cartes de l’ensemble des champs de mines ne sont pas toutes disponibles. Une grande partie du déminage se fait donc par tâtonnement, ce qui ne peut que ralentir les opérations. « Ainsi, précise le colonel Fehmi, en 2003, l’armée israélienne nous a remis des cartes des champs de mines qu’elle a plantées au Liban, et ce par l’intermédiaire de l’ONU. Mais ces cartes, dont la moitié sont fausses, ne couvrent que 80 % des champs de mines placées par cette armée. » Le colonel Fehmi cite également les milices qui ont planté des mines dans le sud du pays, mais qui n’ont jamais remis aux autorités la moindre carte, notamment la milice de Lahd et les Palestiniens. « De manière générale, ces milices confiaient la pose des mines à de jeunes combattants sans expérience, qui effectuaient l’opération de manière anarchique », explique-t-il. Et de préciser, à ce propos, qu’une armée régulière place les mines selon un principe qui lui est propre, rendant ainsi le déminage moins aléatoire. « Malgré ces problèmes auxquels nous nous sommes heurtés, nous pouvons dire que le Sud est nettoyé à 100 % des effets des mines, de même que Beyrouth, observe-t-il, même si un risque minime persiste. » Mais le colonel n’inclut certes pas, dans ces statistiques, ni la ligne bleue ni la zone 6. « Aujourd’hui, la zone 6 est notre priorité », poursuit le colonel Mohammad Fehmi. Cette zone comprend environ 130 champs de mines qui constituent une menace au quotidien pour une population de 250 000 habitants, principalement des agriculteurs et des éleveurs. « La menace est réelle », déplore le colonel, d’autant que le nombre de victimes s’est élevé en 2005 à 26, portant à 5 000 le nombre total de victimes des mines au Liban, alors qu’en 2004, ce chiffre était descendu à 14. L’armée consacre 4 millions de dollars de son budget annuel Mais qu’est-ce qui explique l’augmentation soudaine du nombre de victimes, alors que les campagnes de sensibilisation des habitants se poursuivent et que la majorité des champs minés sont désormais ceinturés ? « La population du Sud est principalement composée d’agriculteurs qui ont besoin d’exploiter leurs terres dans leur totalité, explique le colonel Fehmi. C’est pourquoi il devient urgent de déminer la zone 6 dont la concentration en mines est très importante. Si ce secteur est nettoyé, nous pouvons considérer qu’une bonne moitié du problème est résolu. Le reste pourra alors se faire progressivement. » Mais les fonds manquent, malgré les aides sous forme d’équipements, de formations ou de donations qui ont, jusque-là, été accordées par un certain nombre de pays ou d’organisations internationales. Car le déminage est coûteux. Il peut aller de 3 dollars le mètre carré en surface plane, à 6 dollars le mètre carré en montagne. C’est la raison pour laquelle la zone 6 a été partagée en 6 secteurs, le déminage de chaque secteur ne dépassant pas le coût de 3 millions de dollars. « Il serait ainsi moins difficile de collecter des fonds pour chaque secteur », espère le colonel Fehmi, ajoutant que le déminage de chaque secteur pourrait être terminé en 6 mois. « Trois années seraient donc nécessaires au déminage de l’ensemble de la zone 6 ». Mais il n’est pas très optimiste quant à la mobilisation de la population libanaise pour accélérer le déminage. Dans l’attente d’un réel financement qui réglerait le problème dans sa totalité, l’armée libanaise tente de répondre au cas par cas aux nombreuses demandes des habitants des zones minées, et plus particulièrement des agriculteurs, en déminant d’abord les terrains à plus haut risque, avec la collaboration de la MACC SL et de l’ONG britannique MAG. « L’aide à la population sur l’ensemble du territoire libanais est notre priorité, conformément aux recommandations du commandant en chef de l’armée, le général Michel Sleimane, observe le colonel Fehmi. Nous pratiquons ainsi le déminage humanitaire. Il inclut non seulement les opérations de déminage, mais également une assistance aux victimes, en cas d’accident, et des sessions de sensibilisation aux dangers des mines dans les villages les plus touchés. » Dans cette optique, l’armée libanaise a consacré, en 2005, le budget de 4 millions de dollars au déminage, sur les 10 millions de dollars donnés par le gouvernement libanais, les organisations internationales et les pays amis. L’institution militaire envisage d’en débloquer autant, sinon plus, en 2006, dans l’espoir qu’elle sera assistée dans sa mission par des donations plus substantielles.
Le colonel Mohammad Fehmi dirige le Bureau national du déminage (NDO) depuis deux mois, après avoir fait partie des services de renseignements de l’armée pendant de nombreuses années. Il estime que les opérations de déminage entreprises depuis l’année 1990 ont déjà permis de détruire 150 000 mines, sur un total estimé, selon des statistiques préliminaires, à 600 000 mines, UXOs...