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Actualités - OPINION

LE POINT Aggiornamento

L’affiche était prometteuse. À droite, un « Cavaliere », comme on les aime au pays de l’Arioste, brandissant sa flamboyance comme une flamberge, le verbe haut, doté d’un arsenal de talonnettes, implants de cheveux et teint bronzé par les UV à longueur d’année. À gauche, ma non troppo, un « Professore » sorti tout droit d’un film de l’ère néoréaliste avec son sourire triste, ses lunettes de fort en maths, mal à l’aise devant les caméras et les micros, mais capable de disserter des heures durant sur les raisons véritables de la mauvaise santé économique italienne. Il eût été aisé, avec un tel générique, d’élaborer un scénario capable d’enflammer les foules et de donner un tonus, inégalé jusqu’alors, à une campagne électorale qui menaçait à tout moment de sombrer dans la morosité. Au lieu de quoi, ce fut une véritable foire d’empoigne, marquée de coups bas et d’accusations invraisemblables, assortie aussi des promesses les plus délirantes. Avec, en point d’orgue, cette exigence digne – que l’on se rappelle de l’exemple floridien – d’un George W. Bush cuvée 2000 : une nouvelle vérification des comptages et des procès-verbaux en raison de l’existence de 43 028 bulletins contestés. Auparavant, l’homme de la rue avait eu droit à une histoire délirante de bébés chinois ébouillantés avant d’être utilisés comme engrais – et toc pour i communisti ! –, à un appel à la rescousse lancé aux observateurs des Nations unies, à une qualification que la décence empêche de reproduire pour désigner les partisans de l’autre camp, à une comparaison avec Jésus-Christ puis carrément à des injures à l’adresse des magistrats. Il paraît que même dans les cafés populaires, on n’en est pas encore revenu. Le résultat, désastreux, est à l’image d’une désolante campagne : une victoire de L’Unione étriquée, aussi bien à la Chambre des députés qu’au Sénat, une coupure du pays en deux politiquement, socialement, culturellement, la perspective peu réjouissante d’un blocage institutionnel et même d’une absence de légitimité, enfin une situation qui risque de se répercuter de manière négative sur le reste de l’Europe. C’est que, aussi, la victoire en début de semaine du centre-gauche aura été celle d’une coalition au sein de laquelle les petits partis ne pourront manquer de céder à la tentation du chantage. Difficile, d’un autre côté, de prétendre qu’il en aurait été autrement si la Maison des libertés (CDL) l’avait emporté. D’où le jugement de Salomon formulé par le peuple, qui a élu, certes, un Premier ministre, mais s’est prononcé, en même temps, pour une opposition forte. En somme, c’est Prodisconi ou, si l’on préfère, Berlusprodi – ce qui, d’une façon, ou d’une autre, n’est pas fait pour arranger les choses. Et que sa défaite, le président du Conseil sortant la doive à une loi électorale concoctée en décembre dernier par les soins diligents de… son état-major n’est pas de nature à le consoler de ses nouveaux déboires. D’autant plus qu’il lui est difficile d’oublier qu’en 1996 déjà, il avait été battu par ce même adversaire, lequel avait été débarqué du palais Chigi deux ans plus tard après son lâchage par ses alliés communistes lors du débat sur le projet de budget. Aujourd’hui, la fiche de santé de « l’homme malade de l’Europe » inquiète tout le monde. En 2004, la croissance a enregistré un étique chiffre de 1,1 pour cent, suivi en 2005 d’un taux zéro. Dans l’intervalle, les dépenses se sont accrues et la dette publique représente désormais 108,5 pour cent du PIB tandis que les recettes atteignent leur niveau le plus bas et que l’industrie perd de précieuses places au classement de la compétitivité. Contre toutes ces métastases, le diplômé de la London School of Economics est l’homme indiqué pour redresser la situation. L’ancien ministre de l’Industrie, qui a présidé aux destinées de l’Institut pour la reconstruction avant de diriger, avec plus ou moins de bonheur, la Commission européenne, semble être, à l’heure présente, « the right man ». Tout au long des semaines écoulées, il n’a cessé de faire entendre la voix de la raison, prêchant pour un retour de la morale, un assainissement des finances publiques et un juste équilibre entre une présence de l’État dans le social et un certain libéralisme économique. Le hasard faisant bien les choses (pas toujours), l’arrestation mardi du dernier cappo di tutti cappi va représenter un inattendu coup de pouce à celui qui se plaît volontiers à se définir comme un être serein. Et de la sérénité, l’Italie va en avoir grandement besoin après la tornade « Sua Emittenza » qui aura duré cinq interminables années. À condition de mettre à profit l’ère qui s’ouvre pour amorcer une indispensable période de convalescence. En se rappelant qu’il y va aussi de la bonne santé des Vingt-Cinq. Christian MERVILLE
L’affiche était prometteuse. À droite, un « Cavaliere », comme on les aime au pays de l’Arioste, brandissant sa flamboyance comme une flamberge, le verbe haut, doté d’un arsenal de talonnettes, implants de cheveux et teint bronzé par les UV à longueur d’année. À gauche, ma non troppo, un « Professore » sorti tout droit d’un film de l’ère néoréaliste avec son sourire...