L’incohérence souveraine

Le groupe du 8 Mars, qui se déclare ouvertement « allié de la Syrie », bénéficie de l’appui total du président Lahoud. À tel point qu’au sommet de Khartoum, lorsque le Premier ministre a voulu préciser que la résistance (à l’ennemi) est le « fait de tout le Liban » et que la protection du pays n’est pas l’apanage d’un seul groupement, M. Lahoud s’est immédiatement récrié, protestant contre M. Siniora. Or, le président a perdu de vue les propos qu’il avait autrefois tenus à des journalistes de passage : « Je le répète, sans la Syrie, je n’aurais pas réussi à réédifier le pays et l’armée, forte aujourd’hui de soixante-quinze mille militaires, qui peut seule prendre en main la situation lorsque quelqu’un osera porter atteinte au pays » (L’Orient-Le Jour du 11/5/2000, p.2). L’ancien commandant en chef de l’armée se vantant de l’avoir réédifiée, semble avoir oublié l’existence de celle-ci. Pire, dans sa prestation à la station TV al-Jazira il y a quelques jours, une émission qui a fait grand bruit, il a demandé par trois fois : « Comment protéger le Liban si l’on retire les armes au Hezbollah ? » Monsieur le Président, tout autre que vous qui aurait émis une telle interrogation en public (sans que ce soit devant des millions de téléspectateurs) aurait vu déclencher contre lui des poursuites pour outrage à l’armée. Incohérence ! Incohérence ! …Cependant que le dialogue national poursuit sa réunion hebdomadaire, en attendant, comme disait un humoriste, qu’elle devienne trimestrielle. Car, grâce à la prorogation d’une présidence devenue non seulement inefficace mais aussi délétère, et ce par la grâce d’une partie des « dialogants » qui se déclarent ouvertement (officiellement) « alliés de la Syrie », nous finirons par regretter l’époque où le dialogue n’était que d’une « périodicité hebdomadaire ». Albert SARA