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Actualités - OPINION

Non à un Liban pour les riches

Monsieur le Président, Dans votre réponse à l’éditorial de Issa Goraïeb (L’Orient-Le Jour du 27 février 2006) il est dit que vous lisez la presse, toute la presse. Aussi ai-je pensé vous écrire quelques lignes, en espérant que vous et d’autres surtout les liront. Tout d’abord, permettez-moi de dire que ma réaction à votre lettre ne fut guère celle des monopolisateurs du 14 Mars (que j’appelle, pour me simplifier la vie, le panthéon du 14 février) ; du tout ! Malgré quelques incorrections historiques plus ou moins sérieuses, l’ensemble n’en est point affecté. Et tout le tumulte médiatique orchestré par la majorité parlementaire – qui détient la majorité médiatique – en réponse à votre lettre était aussi bruyant dans la forme que creux dans le contenu. Car je trouve, monsieur le président, que vous aviez raison dans nombre de points évoqués et je dois confesser que certaines de vos positions se trouvent être tout bonnement sensées… à mon modeste sens ! Je ne reviendrai que sur quelques-unes. En premier lieu, en ce qui concerne la prorogation de votre mandat. Les cellules estudiantines affiliées au bloc du 14 février prêchent dans leurs conférences, au nom de leurs leaders, que vous avez violé la Constitution. Un simplisme de cet ordre est irrecevable. Ceux qui ont violé la Constitution ne sont d’autre que les députés de la majorité parlementaire actuelle. Mais, nuance, argumente-t-on, la prorogation de votre mandat s’est faite sous contrainte ; car le Liban, nous rappelle-t-on, ployait en ce temps sous la poigne de fer syrienne. Les députés du 14 Mars devraient se remémorer que Walid Joumblatt en personne a avoué avoir été lâche pendant vingt-huit ans (pour ceux qui ne s’en souviennent pas, ce fut sur la Voix du Liban, au micro de Wardé, le vendredi 17 février de cette même année) et que d’autres, collaborateurs ou associés depuis vingt ans au régime syrien, se trouvent aujourd’hui glorifiés comme des résistants et des militants antisyriens de la première heure (évoquer un nom serait un blasphème). Me dira-t-on également que ce fut sous contrainte que Joumblatt ne manquait jamais l’occasion de faire l’éloge d’Émile Lahoud dans ses discours ? D’autres aussi ont subi des pressions énormes, mais ils n’ont jamais cédé, eux. Samir Geagea, en 1994, avait le choix entre la prison et l’exil. Il a choisi la prison, mais il est resté fidèle à ses convictions, qui étaient alors les bonnes. Michel Aoun, en 1990, avait le choix entre la mort sous les bombes et l’exil. Il a choisi l’exil. Il ne s’est jamais rendu aux Syriens, il n’a jamais apposé sa signature. Et ses convictions, seize ans après, c’est-à-dire depuis le 14 mars 1989 – date du début d’une résistance symbolique menée alors qu’il savait qu’il ne pourrait jamais la gagner –, se sont avérées être les bonnes, aux yeux de ceux qui avaient besoin de temps pour comprendre. Mais bien évidemment, ce temps n’est jamais trop long pour eux, il n’est long que pour le peuple qui a souffert. En second lieu, la loi d’amnistie de 2005. Ce qu’aucun des médias ne dit, c’est que la classe au pouvoir a, en un tour de passe-passe du Législatif et de l’Exécutif, établi en relation deux affaires qui n’avaient rien à voir entre elles, qui ne peuvent être reliées par aucun lien logique ou rationnel ; nommément les affaires Geagea et Denniyé. Merci, monsieur le président, d’avoir évoqué la chose, alors que rares sont les personnes qui en parlent. L’affaire Denniyé concerne des extrémistes intégristes qui ont délibérément abattu des soldats de l’armée libanaise, « et dont certains auraient pu défiler un certain dimanche de février dans les rues d’Achrafieh » (je vous cite). L’affaire Geagea est celle d’une condamnation du chef des Forces libanaises à trois reprises pour assassinat. La première inculpe des criminels, la seconde un innocent, à qui on a injustement imputé la responsabilité de l’attentat de l’église Saydet el-Najate. Jolis subterfuges politico-judiciaires ! Je salue Me Nizar Saghieh pour en avoir parlé (lire – et méditer – à ce propos son article en page 92 du supplément paru avec L’Orient-Le Jour le lundi 13 février de cette année). On a procédé à la libération de Samir Geagea et des détenus de Denniyé uniquement parce que le premier était chrétien et les seconds musulmans, indépendamment de la justice et du principe d’égalité. En situation normale, l’amnistie se fait entre des accusés ayant des peines égales ou comparables, et on aurait pu les choisir à ce moment-là – et seulement à ce moment-là – de façon à respecter l’équilibre confessionnel ; en d’autres termes, il eut fallu trouver un équivalent musulman à Samir Geagea ou des équivalents chrétiens aux assassins de Denniyé. Objection, votre honneur, amnistie n’est pas égale à amnésie ! Finalement, monsieur le président, je rends hommage à votre prise de position contre la privatisation du secteur de la téléphonie mobile. Pourquoi priver l’État d’une source de revenu incommensurable ? Les recettes issues de la vente de ce secteur sont minimes par rapport aux recettes produites annuellement. Je refuse l’idée d’un Liban modelé par et pour les riches, comme je le vois poindre depuis quelque temps. André SLEIMAN Étudiant à l’USJ
Monsieur le Président,
Dans votre réponse à l’éditorial de Issa Goraïeb (L’Orient-Le Jour du 27 février 2006) il est dit que vous lisez la presse, toute la presse. Aussi ai-je pensé vous écrire quelques lignes, en espérant que vous et d’autres surtout les liront.
Tout d’abord, permettez-moi de dire que ma réaction à votre lettre ne fut guère celle des...