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L’ex-numéro un soviétique dénonce « un complexe de supériorité » des États-Unis Après avoir brisé le mur de Berlin, Gorbatchev se méfie de l’Occident

Mikhaïl Gorbatchev, âgé de 75 ans, l’homme qui a brisé le mur séparant le bloc soviétique de l’Occident, semble aujourd’hui déçu par les partenaires étrangers de Moscou. « Certains en Occident voudraient que la Russie soit à moitié étouffée », pense-t-il. « La Russie avec son énorme potentiel intellectuel et militaire, et propriétaire de 42 % des réserves naturelles mondiales, fait peur à l’Occident, et même nos amis craignent aujourd’hui une renaissance de l’Empire russe », a déclaré récemment le prix Nobel de la paix 1990 devant la presse. Initiateur au milieu des années 80 d’un rapprochement avec l’ennemi idéologique capitaliste, l’ex-numéro un soviétique dénonce « un complexe de supériorité » des États-Unis. « Cela répond aux intérêts de nous tous que cet immense pays d’Amérique sorte de cette maladie », a-t-il dit en rencontrant cette semaine la presse étrangère à Moscou. Promoteur de la « glasnost » (transparence) et de la liberté d’expression, M. Gorbatchev n’en dénonce pas moins « l’erreur » du Danemark et d’autres pays européens ayant publié les caricatures de Mohammad. « Visiblement, la vie des Danois est trop tranquille et ils en avaient assez de s’ennuyer », explique-t-il. Souvent qualifié dans son pays de « cheval de Troie de l’Occident », il fustige également Tokyo qui « aggrave » le problème du différend territorial sur les îles Kouriles avec Moscou. « Gorbatchev est profondément déçu par l’Occident et surtout par Washington qui n’ont presque rien réalisé de leurs promesses après toutes ses concessions », estime l’historien russe Anatoli Outkine, spécialiste des États-Unis. « Personne ne l’a vraiment remercié : ni à l’étranger ni chez lui », dit-il à l’AFP. En six ans de son « règne », de 1985 à 1991, Gorbatchev a fait 40 visites à l’étranger, dont quatre en France et trois aux États-Unis, et « a presque toujours cédé à ses partenaires occidentaux », estime notamment l’auteur de l’encyclopédie russe Elita, Nikolaï Zenkovitch. Lundi, à l’occasion de son 75e anniversaire, l’ancien chancelier allemand Helmut Kohl a rendu hommage à M. Gorbatchev pour sa contribution à la chute du mur de Berlin et à la réunification allemande le 3 octobre 1990. « Gorbatchev se rappelle bien que Washington lui avait alors promis de ne plus avancer vers l’est la frontière de l’OTAN », estime M. Outkine, ajoutant qu’il s’agissait de « promesses verbales » faites à l’ex-président soviétique. « Il voit également que l’Occident n’a pas tenu ses engagements officiels, dont celui prévu par l’accord signé à Vienne en octobre 1990 sur la création d’une Europe sans alliances : le pacte de Varsovie a bien disparu, mais pas l’OTAN », dit M. Outkine, expliquant que « tout cela a dû changer l’attitude » du réformateur soviétique envers l’Occident. C’est pourtant à l’époque de M. Gorbatchev qu’avait commencé en URSS une adoration quasi religieuse de l’Occident, notamment chez l’intelligentsia soviétique. « Idéalistes et manichéens de nature, les Russes avaient à cette époque volontairement renversé un ancien schéma, et désigné l’Occident comme le bien incarné, et eux-mêmes comme le mal », selon M. Outkine, auteur de 40 ouvrages historiques publiés en Russie et à l’étranger. La situation a évolué depuis. En mars dernier, moins d’un quart des Russes (22 %) soutenaient la perestroïka de M. Gorbatchev, alors que 56 % se disaient contre, selon un sondage du Centre Levada. 40 % des personnes interrogées estimaient pourtant que les réformes de M. Gorbatchev avaient été indispensables, et évoquaient ses principales conquêtes : la transparence et la liberté d’expression (40 %) et la possibilité de voyager à l’étranger (34 %).
Mikhaïl Gorbatchev, âgé de 75 ans, l’homme qui a brisé le mur séparant le bloc soviétique de l’Occident, semble aujourd’hui déçu par les partenaires étrangers de Moscou. « Certains en Occident voudraient que la Russie soit à moitié étouffée », pense-t-il. « La Russie avec son énorme potentiel intellectuel et militaire, et propriétaire de 42 % des réserves...