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Les habitants de Grozny dénoncent les « villages Potemkine » La reconstruction économique en trompe-l’œil de la Tchétchénie

L’avenue de la Victoire, rue centrale de Grozny, la capitale tchétchène encore largement en ruine, a été reconstruite à une vitesse record. Symbole d’une année 2006 censée amorcer le renouveau économique d’une Tchétchénie « stabilisée » selon Moscou. Des échafaudages ont été montés, des vitres posées, les murs cimentés. Mais derrière ces rénovations de façade – et outre la réouverture d’immeubles officiels comme le siège du parti pro-Kremlin Russie unie –, la plupart restent sans toit. Derrière les façades, le vide. Une reconstruction absurde, en trompe-l’œil, ironisent les habitants, qui parlent de « village Potemkine », évoquant ces hameaux construits à la hâte par le favori de l’impératrice Catherine II pour masquer la pauvreté des campagnes. Ils racontent comment les travaux ont été menés d’arrache-pied en décembre 2005, en moins d’un mois, sur ordre du vice-Premier ministre Ramzan Kadyrov, l’homme fort du pouvoir mis en place par Moscou. Ils expliquent aussi la façon dont les travaux ont été financés par le fonds de bienfaisance Kadyrov, alimenté par le racket des commerçants par ses milices redoutées, les Kadyrovtsy, intégrées aux forces russes. Au bout de l’avenue, trônent le portrait de cet homme redouté de 29 ans et un long panneau annonçant le plan de reconstruction de Grozny, avec notamment l’édification d’une grande mosquée et d’un complexe sportif. Mais les reconstructions de logements, promises depuis des années, se font au compte-gouttes et contre forte commission à l’administration locale, dans cette ville de 200 000 habitants sur un total d’un million d’habitants de la République, selon les chiffres des autorités, jugés gonflés par l’ONG Memorial. Et l’économie reste balbutiante, avec un chômage de quelque 80 %, selon les évaluations officielles, dans cette région où les affrontements entre fédéraux et rebelles font des morts tous les jours, jusque dans les rues de Grozny. Récupération de ferraille dans les immeubles en ruine ou vente au bazar de fournitures achetées en gros à Bakou, en Azerbaïdjan voisin, font partie des expédients trouvés par les habitants, qui dépendent encore largement de l’aide humanitaire internationale. Objet d’un important trafic, impliquant notamment les militaires, le secteur pétrolier, autrefois fierté de la Tchétchénie, reste largement anéanti. « Ceux qui en ont les moyens partent à l’étranger », explique ce professeur d’université, payé 100 dollars par mois. Il ironise sur le fait que les deux secteurs les plus prometteurs pour les jeunes sont soit d’entrer dans les forces prorusses, soit de s’engager dans la rébellion. Le ministère tchétchène de l’Économie présente quant à lui la Tchétchénie comme un eldorado pour les investisseurs et annonce la prochaine présentation de « projets d’investissements » par une délégation tchétchène qui doit être invitée en 2006 en Chine à l’occasion de « l’année de la Russie ».
L’avenue de la Victoire, rue centrale de Grozny, la capitale tchétchène encore largement en ruine, a été reconstruite à une vitesse record. Symbole d’une année 2006 censée amorcer le renouveau économique d’une Tchétchénie « stabilisée » selon Moscou.
Des échafaudages ont été montés, des vitres posées, les murs cimentés. Mais derrière ces rénovations de...