Documentaire « Nissa Min Turkiyya », d’Olga Nakkas

Nissa Min Turkiyya représente le dernier film en date tiré de la riche filmographie d’Olga Nakkas. Cette Libanaise, née en Turquie et qui porte la double casquette de cinéaste et productrice, nous offre là une peinture au féminin du pays qui l’a vu naître. Produit pour Arabiyya et l’Union européenne, le documentaire met le doigt sur certains problèmes bien réels auxquels fait face l’un des pays, pour ne pas dire «le» pays musulman le plus moderne du Moyen-Orient. Le choc des cultures, la quête d’identité, l’opposition entre la laïcité et l’islamisme, voilà quelques-uns des thèmes relatés par la réalisatrice. Cinquante minutes durant, des femmes turques instruites et éduquées nous donnent leur sentiment profond sur ces réalités aujourd’hui indéniables. Des idées, des convictions, des états d’âme, que de discussions qui nous interpellent tous, hommes ou femmes issus de quelque culture que ce soit, laïque ou religieuse. C’est en 1923 qu’Atatürk créa une Turquie basée sur le modèle français de la laïcité. Toute démonstration religieuse y était interdite. Le pays se voulait donc à l’image de l’Europe. Au fil des années, la Turquie préserva cette influence. Aujourd’hui, la réalité est autre. Le documentaire évoque d’ailleurs la victoire, lors des élections parlementaires de 2002, du Mouvement de justice et de développement pro-islamiste mené par Tayyib Erdogan. Certes le pays reste incontestablement un exemple de modernité, mais il voit également naître un besoin de liberté, un besoin de se sentir libre de pratiquer comme bon lui semble sa religion. Rappelons à titre indicatif que le port du voile est toujours interdit dans les lieux officiels, bien que la population musulmane soit la majorité en Turquie. Kémalistes ou laïques, les femmes interrogées partagent toutes un sentiment de fierté vis-à-vis de leur pays, mais il se dégage également de leur discours une prise de conscience que le pays vit un certain choc de civilisations et de cultures. Un problème, en Turquie, au Liban, comme ailleurs, malheureusement toujours d’actualité et filmé par une cinéaste qui a su objectivement laisser la parole aux femmes en s’effaçant derrière la caméra. Nissa Min Turkiyya, diffusé en novembre dernier sur Arabiyya, sera ultérieurement reprogrammé sur ladite chaîne télévisée. Nous vous tiendrons informés.