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ÉCLAIRAGE La Chine à la croisée des chemins dans le dossier iranien

La Chine, qui n’a cessé ces derniers mois de prôner la voie diplomatique pour résoudre la crise nucléaire iranienne, se trouve dans une position de plus en plus difficile, tiraillée entre le jusqu’au-boutisme de Téhéran et les menaces de sanctions des Occidentaux. Pékin et Moscou, qui ont tous les deux des intérêts économiques et énergétiques en Iran et sont membres permanents du Conseil de sécurité avec droit de veto, ont finalement soutenu la décision de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) de renvoyer Téhéran devant le Conseil de sécurité. Selon certains analystes, cette décision ne signifie pas pour autant que Pékin dévie de sa voie traditionnelle. Pour Jean-Pierre Cabestan, directeur de recherches au Centre national de la recherche scientifique français, « la Chine a une position très attentiste ». « C’est une coopération a minima », dit-il, la perspective de sanctions étant renvoyée au mois de mars. « Ce n’est pas en contradiction avec la politique chinoise inébranlable de non-ingérence dans les affaires intérieures, compte tenu que l’Iran a violé un accord international », considère pour sa part Paul Harris de l’Université Lingnan à Hong Kong. « Nous n’avons aucun problème avec le contenu principal de cette résolution, car la Chine estime qu’elle est en accord avec le principe essentiel selon lequel l’autorité et le sérieux du régime de non-prolifération doivent être maintenus », a d’ailleurs déclaré hier le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Kong Quan. Comme en écho à ces analyses, le ministre chinois des Affaires étrangères, Li Zhaoxing, a réaffirmé que Pékin espérait régler la question nucléaire iranienne par « la voie diplomatique », après un entretien hier avec le président français Jacques Chirac à Paris. De son côté, M. Chirac a souligné l’importance qu’il attache à poursuivre la concertation étroite avec la Chine « afin de trouver une solution diplomatique concernant l’Iran ». Mais l’épreuve du feu reste à venir, lorsque le temps des sanctions deviendra possible, en mars, indiquent les experts. Pékin sera alors confronté à un dilemme, disent-ils : si la Chine agit en tant que grande puissance responsable sur la scène internationale s’opposant à la prolifération nucléaire, elle mettra en péril ses relations avec l’Iran, l’un de ses partenaires stratégiques pour le pétrole et le gaz naturel, deux ressources naturelles dont elle a besoin pour nourrir sa prodigieuse croissance. La République islamique représente 13 % des importations chinoises de pétrole, ce qui place l’Iran en troisième position. Et des entreprises comme Sinopec, deuxième groupe pétrochimique chinois et premier pétrolier, ont des intérêts en Iran. Dans un commentaire publié lundi dans le Wall Street Journal, deux chercheurs de la Brookings Institution, un « think tank » de Washington, ont estimé que la diplomatie chinoise devait agir avec la même responsabilité que dans un autre dossier nucléaire, celui de la Corée du Nord. « La volonté actuelle de la Chine de transmettre le dossier iranien au Conseil de sécurité de l’ONU est un bon début. Mais il remet à plus tard les vraies questions », ont écrit Jeffrey A. Bader et Richard C. Bush III. En effet, « se ranger du côté des Occidentaux contre l’Iran pourrait créer un précédent dangereux qui nuirait aux relations de la Chine avec les pays en développement du Sud », comme le Soudan, le Venezuela et l’Angola, note Jing-dong Yuan, directeur de recherches au programme de non-prolifération en Asie de l’Est à l’Institut des relations internationales de Monterrey (États-Unis). « Dans les semaines à venir, Pékin va soigneusement évaluer une décision finale en pesant ses intérêts de sécurité énergétique, ses relations avec les États-Unis et les autres puissances occidentales et son image comme puissance émergente responsable sur la scène internationale », affirme Jing-dong Yuan. « C’est quelque chose que Pékin n’apprécie guère », dit-il. François BOUGON (AFP)
La Chine, qui n’a cessé ces derniers mois de prôner la voie diplomatique pour résoudre la crise nucléaire iranienne, se trouve dans une position de plus en plus difficile, tiraillée entre le jusqu’au-boutisme de Téhéran et les menaces de sanctions des Occidentaux. Pékin et Moscou, qui ont tous les deux des intérêts économiques et énergétiques en Iran et sont membres...