SOUVENIR Le Concertgebouw commémore le centenaire du « déprimant » Chostakovitch

Alors que le monde célèbre le 250e anniversaire de Mozart, l’orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam commémore le centenaire de Chostakovitch (1906-1975), nettement moins populaire en raison d’une œuvre jugée dépressive et dédiée en partie à Lénine et Staline. «En Union soviétique, Chostakovitch était connu et populaire parce que sa musique évoquait des sentiments proches de ceux des gens qui vivaient (...) sous la dictature», a expliqué le chef letton Mariss Jansons lors d’une rencontre avec des journalistes. «En Occident, les gens demandaient : pourquoi est-il si déprimant ? Mais aujourd’hui, la vie devient de plus en plus difficile dans le monde entier et sa musique est devenue plus proche », a-t-il ajouté, qualifiant le compositeur russe de « génie du XXe siècle ». « Cela m’aide d’avoir vécu en Union soviétique pour diriger Chostakovitch », souligne-t-il. « Le plus important pour un chef d’orchestre, c’est de pénétrer la musique. Avec Beethoven ou d’autres, je dois essayer d’entendre l’histoire que raconte l’œuvre... avec Chostakovitch c’est plus facile», ajoute-t-il, tout en précisant immédiatement qu’il n’avait jamais été un dissident et que sa vie en URSS était «beaucoup plus facile que celle de (l’écrivain Alexandre) Soljenitsyne ou (du violoncelliste Mstislav) Rostropovitch». Sans défendre mordicus les affinités politiques présumées du compositeur, qu’il a connu alors qu’il était étudiant au Conservatoire de Leningrad, M. Jansons estime, comme certains historiens, que son lien avec le Parti communiste était ténu. Des dédicaces à Lénine étaient écrites avant même la partition, ce qui tend à prouver selon lui qu’il n’y avait pas de lien réel avec le message de la musique. Mais des débats sont prévus à Amsterdam sur cette face plus obscure du compositeur. Pour célébrer ce centenaire, l’orchestre du Concertgebouw va présenter, jusqu’à fin juin, neuf programmes différents avec notamment les symphonies qui ont fait la réputation de Chostakovitch, des films dont il a composé la musique, dont Le cuirassé Potemkine, pour finir avec son opéra Lady Macbeth de Minsk.