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Actualités - REPORTAGE

CORRESPONDANCE - « Churchill et la grande République », sur les cimaises de la Librairie du Congrès L’Amérique de sir Winston (photos)

WASHINGTON-Irène MOSALLI Lors d’un voyage à New York en 1895, Winston Churchill, alors âgé de 21 ans, avait écrit à son frère: «C’est un très grand pays, mon cher Jack… Ni beau, ni romantique, mais grand et utile». Si utile, que le grand homme qu’il sera plus tard a eu d’importants liens et rapports avec ce pays, comme en témoigne une exposition organisée par la Librairie du Congrès à Washington, en collaboration avec les « Churchill Archives » sous le titre: «Churchill et la grande République.» Cette exposition donne à voir plus de 200 documents ayant trait aux relations qu’entretenait le grand homme d’État britannique avec le pays de l’Oncle Sam : une correspondance privée et publique (dont quinze lettres inédites), des photos, des caricatures, des manuscrits, des objets dont un globe terrestre utilisé pour mettre au point sa stratégie durant la guerre. « Il est impossible de condenser toute la vie de Churchill en une seule galerie, a expliqué Allen Packwood, historien britannique et directeur du Churchill Archives Center, à Cambridge (Angleterre). Nous avons alors tenté de la relater à travers ses connexions américaines, ses nombreuses visites aux États-Unis, ses impressions sur ce pays. Et aussi la manière dont il était perçu en Amérique ». C’est là « une histoire d’amour mutuelle », a dit la fille de Churchill, Mary Soames (81 ans), présente lorsque le président Bush a visité l’exposition. De la première (1895) à la dernière visite (1961) Il a fallu trois ans pour mettre sur pied cette exposition. Elle couvre une époque allant de la première visite de sir Winston aux États-Unis, en 1895 – lorsque jeune officier de cavalerie il se rendait à Cuba – jusqu’à la dernière, remontant à 1961. Entre-temps, il avait fait, en 1900, une tournée de conférences portant sur ses fameuses aventures durant la guerre des Boers. Et en 1929, il était arrivé à New York avec sa provision de whisky qu’il avait fait passer sous le nez des douaniers alors que la prohibition battait son plein. Par la suite, il avait assisté au grand crash de la Bourse. Par ailleurs, «bien avant la Seconde Guerre mondiale, note Allen Packwood, il était parfaitement informé sur les affaires américaines et a été le premier à voir le potentiel industriel des États-Unis». Des connaissances qui lui seront vitales lorsque la Grande-Bretagne entrera en guerre. En sens inverse, et avant qu’il ne devienne Premier ministre en 1940, le président Franklin Roosevelt avait établi avec lui une communication directe, car il avait vu en lui une personnalité qui s’imposait et l’homme de l’heure avec lequel l’Amérique pouvait collaborer. En 1954, Dwight Eisenhower le voit ainsi : «Churchill est en train d’atteindre la grandeur, plus que quiconque que j’ai connu. » Inoubliables étaient aussi pour les Américains ses appels à la radio durant la guerre. Selon son petit-fils Winston, présent à l’exposition, il préparait lui-même ses discours avec une grande minutie. L’un de ses secrétaires raconte qu’il mettait une heure pour préparer chaque minute de ce qu’il allait dire. Ce qui équivaut à 30 heures de préparation pour un discours de 30 minutes. Citoyen américain honoraire Seul le président Theodore Roosevelt a trouvé à le critiquer. Témoin une lettre rédigée en 1908 : « Churchill est un personnage quelconque. À l’image de son père Randolph, il manque de sérieux, de sobriété et de principes permanents. De plus, il a cette soif démesurée de cette forme d’admiration bon marché qui va de pair avec la notoriété. » Était-ce une pique de Roosevelt, le républicain, contre Churchill, ami des démocrates ? Toujours est-il que pour commencer, Winston Churchill avait outre-Atlantique des liens de sang. Son père, alors âgé de 24 ans, lord Randolph Churchill, avait eu le coup de foudre pour une très belle et très riche New Yorkaise de 19 ans, Jennie Jerome, rencontrée à un bal en 1873. Malgré la réticence de son père, le duc de Marlborough, il l’épouse un an plus tard, à Paris. Leur correspondance fait partie de cette exposition. Un autre document digne d’intérêt : un carnet scolaire où il est dit qu’à 9 ans, le Premier ministre avait des notes peu satisfaisantes: «Moyen en grammaire. Pas très bon en français. Conduite: méchant et chahuteur.» Il est aussi rappelé que ses Mémoires intitulés My Early Life ont inspiré les «mauvais garçons», car Churchill s’y étalait sur ses espiègleries et ses turbulencesd’écolier. En fait, dit son historien, enfant, il n’était pas aussi mauvais qu’il aimait à le proclamer. Il a toujours excellé dans les sujets qui l’intéressaient. Notamment l’histoire. L’exposition s’achève par une vidéo où l’on voit le président Kennedy prononcer ces mots au moment où Churchill était nommé citoyen américain honoraire: «En ajoutant son nom à nos registres, nous voulons, certes, l’honorer, mais son acceptation nous honore davantage. Car aucune déclaration ou proclamation ne peut, à présent, enrichir son nom. Le nom de Winston Churchill est déjà une légende.»

WASHINGTON-Irène MOSALLI
Lors d’un voyage à New York en 1895, Winston Churchill, alors âgé de 21 ans, avait écrit à son frère: «C’est un très grand pays, mon cher Jack… Ni beau, ni romantique, mais grand et utile». Si utile, que le grand homme qu’il sera plus tard a eu d’importants liens et rapports avec ce pays, comme en témoigne une exposition organisée par la Librairie...