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Actualités - CHRONOLOGIE

Un taux de participation relativement élevé, le vote chrétien fera la différence Tyr, ou l’étalage de force de Nabih Berry (Photo)

C’est à un véritable étalage de force que s’est livré hier le mouvement Amal à Tyr. Portraits innombrables du président de la Chambre, Nabih Berry, et de l’imam disparu Moussa Sadr, calicots, drapeaux verts de l’organisation par centaines, scrutateurs en masse, chants partisans à tous les coins de rue : la machine électorale d’Amal est omniprésente. C’est dire si Nabih Berry accorde de l’importance à cette bataille, dont les enjeux sont nombreux et divers. Pour le mouvement Amal, Tyr est la forteresse imprenable. Sur le plan symbolique, la ville est le patelin du fondateur du mouvement, Moussa Sadr. Mais elle est surtout source de richesses, de services, un fortin économique, un paradis touristique qu’il est indispensable de conserver. Une défaite serait inadmissible. Aussi a-t-il investi toute la puissance du mouvement dans la ville, encouragé en cela par ses adversaires, notamment le Hezbollah et l’ingénieur Riad el-Assaad, qui ont stratégiquement déplacé l’œil du cyclone du Liban-Sud jusqu’au sein même du bastion amaliste ; ce qui leur a donné la possibilité de mener librement la bataille contre Amal partout ailleurs dans la région, avec de grandes chances de victoire. L’entrée de Tyr annonce d’ailleurs la couleur. On peut y voir un grand portrait de Nabih Berry, les bras levés, acclamant la foule, avec, écrit au bas, en grosses lettres : « Oui au Lion (Assad) du Liban. » Et ce n’est que le début du « plébiscite », qui se poursuit à travers toute la ville. De son côté, le Hezbollah a opté pour la prudence et la discrétion. Les drapeaux jaunes et verts du parti de Dieu sont quasi inexistants. Le « Hezb » a préféré s’effacer derrière le drapeau de la liste d’opposition, blanc, avec, dessus, l’ombre des vestiges de Tyr. « Nous n’avons pas besoin de faire des démonstrations de force et nous voulons éviter les incidents. Nous sommes très présents au niveau de la base. Ce sont ceux qui ont peur qui ont recours à ce genre de stratagèmes », affirme l’un des scrutateurs du parti de Dieu, l’un des rares à rompre le silence. Mais selon une autre version, plus logique celle-là, le Hezbollah « a préféré éviter d’être voyant pour ne pas effrayer l’électorat chrétien ». Devant tous les bureaux de vote, les consignes de sayyed Nasrallah sont respectées : « Amal est un concurrent, pas un ennemi. Les objectifs nationaux des deux formations sont les mêmes. » Par conséquent, si la rivalité existe et se manifeste, surtout devant les bureaux de vote réservés aux électeurs chiites, c’est toujours sans incidents, dans le strict respect d’une consultation sportive et démocratique. Le vote chrétien qui tranche L’électeur chiite est très discipliné et, partant, les comportements électoraux étaient prévisibles au sein de la communauté, dans la mesure où l’élection se déroulait sur des bases partisanes. Le taux de participation côté chiite a frôlé les 50 %. Mais l’attention s’est reportée, dès les premières heures de la matinée, vers les quartiers chrétiens de la ville. « Nous avons mis tout notre poids ici, parce que le vote chrétien est le plus important. C’est lui qui fait toute la différence », affirme Kazem el-Khalil, fils de l’ambassadeur Khalil Kazem el-Khalil, qui s’est posté devant le bureau de vote des maronites. C’est pourquoi l’enjeu de la bataille entre Amal et le Hezbollah a été hier de gagner le vote chrétien. La « hara masihiyé », le quartier chrétien. De toutes petites ruelles labyrinthiques, prises entre des murs blanc, et où la pauvreté règne en maître. Des odeurs nauséabondes remplissent l’air. L’on se croirait dans les rues d’Alger-la-Blanche ou d’une petite ville marocaine. Près de 6 000 chrétiens sont inscrits sur les registres de Tyr, mais la quasi-totalité d’entre eux n’habite pas la ville. Ceux d’entre eux qui constituent l’électorat actif, près de 3 000 électeurs, surtout grecs-catholiques et maronites, ont fait hier le chemin depuis Beyrouth. Conduits jusqu’aux bureaux de vote dans des bus et des vans de la municipalité pro-Amal de Tyr, comme des naturalisés. « Ne les perdez pas de vue, gardez-les en groupe, veillez à ce qu’ils ne se dispersent pas », dit un partisan d’Amal dans le cadre d’une conversation au téléphone cellulaire, en parlant d’eux : le mouvement de Nabih Berry sait bien qu’il tient avec les électeurs chrétiens son atout majeur, et il n’entend pas les lâcher. Le taux de participation côté chrétien (catholiques, orthodoxes et maronites) a d’ailleurs quasiment atteint les 40 %. Le député du Hezbollah, Abdallah Kassir, dénonce des achats de voix dans ces quartiers, accusations que lui renvoie à son tour le député d’Amal Ali el-Khalil. À Chabriha, enfin, le quartier qui a été annexé à la municipalité de Tyr cette année et qui compte une multitude de cadres pro-Amal originaires des sept villages de la bande frontalière, près de 70 % des électeurs ont été aux urnes. Mis à part le vote chrétien, ce deuxième élément pourrait bien jouer en faveur du mouvement de Nabih Berry. Berry, prisonnier hier de cette célèbre phrase de Napoléon : « Il n’y a pas de si, il n’y a pas de mais, il faut réussir. » Michel HAJJI GEORGIOU
C’est à un véritable étalage de force que s’est livré hier le mouvement Amal à Tyr. Portraits innombrables du président de la Chambre, Nabih Berry, et de l’imam disparu Moussa Sadr, calicots, drapeaux verts de l’organisation par centaines, scrutateurs en masse, chants partisans à tous les coins de rue : la machine électorale d’Amal est omniprésente. C’est dire si...