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Actualités - interview

Interview - Le député de Tripoli n’est nullement impressionné par la tentative d’intimidation qui l’a visé la semaine dernière Mohammed Safadi : Halte aux atteintes à la démocratie et aux libertés (Photo)

Avec ses compagnons du Rassemblement tripolitain, Mohammed Kabbarah et Maurice Fadel, il a été la cible, vendredi dernier, d’une tentative d’intimidation initiée par des forces de l’ombre lors de l’inauguration d’un centre social dans un quartier populaire de Tripoli, et accusé d’« avoir introduit l’opposition » dans la capitale du Nord (!). Mais il en faut bien plus pour soumettre le député Mohammed Safadi, insensible aux manœuvres douteuses qui cherchent à le pousser à rentrer dans les rangs. Il est très clair, dans le discours du député de Tripoli, que ces intimidations n’ont pas de prise sur lui. « S’il existe une intention politique derrière cet incident, son objectif est de terrifier et de terroriser. Nous souhaitons que l’enquête révèle quelque chose, et si elle ne le fait, ou si nous sentons que quelque chose a été occulté ou dissimulé, nous réagirons. Nous souhaitons aussi que ce qui nous a visé ne se reproduise pas, ni avec nous, ni avec quelqu’un d’autre sur tout le territoire libanais », affirme-t-il. Mohammed Safadi cultive l’art de la politesse, de la courtoisie. Mais il ne faut pas se leurrer : même si son discours respecte les règles de la bienséance, il reste que le ton est ferme et convaincu. « Le problème dont nous souffrons est le suivant : les libertés sont sacro-saintes dans ce pays, mais il y a un groupe de profiteurs qui n’en est pas conscient, qui juge ces libertés sans importance. Le conflit en cours sur le plan national s’articule autour des libertés publiques », dit-il. Les auteurs de la lâche agression de vendredi dernier, et ceux qui les commandent, s’en seraient-ils pris au député en pensant que ce dernier ne réagirait pas ? Si c’est bien cet argument qui a été retenu pour décider de l’agression contre le député, les agresseurs ont vite été détrompés, par la conférence de presse samedi dernier du Rassemblement tripolitain. « La réponse était toute naturelle, surtout dans les circonstances actuelles, au moment où les libertés font tous les jours l’objet de nouvelles pressions. Notre devoir, en tant que députés, est de témoigner de ce que nous voyons dans le respect d’une certaine discipline. Mais le respect de la démocratie, des libertés et des droits de l’homme sont pour nous une ligne rouge. Notre régime est fondé sur ces principes. Si nous devions les oublier, nous serions en train de détruire notre système politique, de le dénaturer », indique-t-il. Une situation injuste Qui est à l’origine du démantèlement de ce système politique ? « Dans tous les pays, il y a des gens qui aiment avoir le monopole du pouvoir, ce qui va à l’encontre de la démocratie. Le pouvoir c’est l’alternance dans les démocraties, et la permanence dans les autres types de régimes. Or, il y a certaines personnes au Liban qui se demandent pourquoi le pouvoir ne serait pas permanent », précise-t-il. Et s’il a voté pour la prorogation du mandat Lahoud, au Parlement, ce n’est pas parce qu’il était favorable à cette rallonge, mais parce que l’événement s’est produit, dit-il, dans le cadre d’une conjoncture internationale qui ne permettait pas le contraire. « La conjoncture internationale et les pressions nous ont placé dans une situation injuste. La position internationale antisyrienne nous a obligé à prendre le parti de la Syrie. Si les pressions contre le Liban et la Syrie n’avaient pas été exercées, nous aurions voté contre la prorogation. Nous sommes pour le principe de l’alternance », dit-il. « On nous a promis qu’avec la prorogation, il y aurait des réformes. Mais lorsque nous nous sommes rendus compte que le nouveau cabinet n’avait été formé que pour les législatives, nous ne lui avons pas accordé la confiance. Ce gouvernement n’est pas apte à diriger le pays, avec ou sans élections », affirme Mohammed Safadi, estimant que, par là-même, l’un des instruments des services avait perdu de sa légitimité. Interrogé sur la dynamique actuelle de l’opposition et sur ce qui le sépare encore des congressistes du Bristol, le député de Tripoli évoque immédiatement et avec insistance la nécessité d’être au côté de la Syrie dans le contexte de la crise israélo-arabe. « Mais cela ne veut pas dire pour autant que nous sommes d’accord avec les pratiques syriennes au Liban. Nous voulons que les relations bilatérales se développent, deviennent plus globales, notamment sur le plan de la politique étrangère, mais sur la base de l’équilibre. Le lien organique qui unit nos deux pays doit se traduire par des relations équilibrées », souligne-t-il, avant de s’en prendre au pouvoir, qui, pour ses intérêts propres, n’exprime pas, dans ses relations avec Damas, l’image réelle du pays. Le député s’élève ensuite contre les ingérences des services dans la sphère publique et dans le privé, notamment lorsqu’elles sont liberticides. Pour l’armée syrienne dans le respect de la souveraineté S’attend-il à davantage de pressions sur les opposants du Nord, à la veille des législatives ? « Le pouvoir ne pense qu’aux élections et aux moyens d’imposer des députés loyalistes et d’annihiler l’opposition. L’opposition libanaise, de son côté, ne demande pas des choses insensées. Il y a des revendications justes, notamment l’application de Taëf, même s’il est vrai aussi qu’il faut trouver le bon timing pour certaines d’entre elles, comme par exemple le retrait des forces syriennes. L’armée syrienne ne pose pas de problème, quel que soit l’endroit où elle se trouve sur le territoire libanais. Sa présence est protectrice dans le cadre du conflit régional. Mais je suis pour la souveraineté, le respect des libertés et de la démocratie, et les réformes au Liban. L’armée syrienne peut stationner au Liban dans le respect de la souveraineté libanaise », dit-il. Ce que Mohammed Safadi prône c’est le dialogue interlibanais et avec la Syrie. Dans ce cadre, dit-il, c’est à un rôle de promoteur du dialogue que le Rassemblement tripolitain se consacre. Mais il n’admet pas toutefois la logique actuelle du pouvoir, et dénonce le slogan du référendum sur la 1559 lancé par le Premier ministre Omar Karamé pour désigner les prochaines législatives. « Nous sommes contre la 1559. Aucun Libanais rationnel ne peut être pour. Mais cela ne veut pas dire que la résolution n’existe pas ! Elle existe, les circonstances ont conduit à sa naissance. Nous devons nous unir pour limiter les dégâts. Un accord avec la Syrie est fondamental pour l’avenir du Liban », dit-il. Interrogé sur une responsabilité syrienne dans la mauvaise gestion du pays par les cabinets qui se sont succédé au pouvoir, M. Safadi répond : « Si la Syrie me demande de faire quelque chose de faux et que je le fais, je serai en train de commettre une erreur. Si je ne le fais pas, je serai en train de servir l’intérêt national. C’est moi qui assume la responsabilité. » Ce qui le retient de s’aligner sur les congressistes du Bristol, ce n’est pas un désaccord sur le fond avec ces derniers, mais plutôt un climat général qui fait que l’opposition plurielle a pour l’instant une teinte trop hostile à la Syrie, dit-il. « J’aurais souhaité que cette opposition se retrouve contre le pouvoir », ajoute-t-il, en reconnaissant cependant que ce dernier essaye, par intérêt, de braquer l’opposition contre la Syrie. Concernant les prochaines législatives, Mohammed Safadi affirme d’ores et déjà qu’il n’exclut de son champ d’alliances que « les extrêmes politiques et religieuses ». Il met en garde contre toute tentative de pressions et d’ingérences dans le cadre du processus électoral, d’autant que le cabinet, depuis sa formation, n’a pas fait preuve de sa capacité à gérer l’échéance électorale. « Ce que nous avons vu et entendu ne nous rassure guère », souligne-t-il enfin. Michel HAJJI GEORGIOU
Avec ses compagnons du Rassemblement tripolitain, Mohammed Kabbarah et Maurice Fadel, il a été la cible, vendredi dernier, d’une tentative d’intimidation initiée par des forces de l’ombre lors de l’inauguration d’un centre social dans un quartier populaire de Tripoli, et accusé d’« avoir introduit l’opposition » dans la capitale du Nord (!). Mais il en faut bien...