Karamé menace les médias français au Liban de mesures de rétorsion

Les réactions hier des responsables libanais vis-à-vis de l’interdiction d’al-Manar en France étaient contradictoires. Le Premier ministre, Omar Karamé, a menacé les médias français de mesures de rétorsion sans pour autant préciser les mesures envisagées. Interrogé par L’Orient-Le Jour, le président du Conseil national de l’audiovisuel (CNA), Habdelhadi Mahfouz, a lancé, de son côté, un appel à la tolérance, invitant le Conseil national de l’audiovisuel français (CSA) « à donner du temps à la chaîne afin qu’elle s’adapte aux changements ». M. Karamé donc a menacé les médias français émettant au Liban de mesures de rétorsion. « Si la décision du Conseil d’État français est mise en application, nous appliquerons le principe de réciprocité », a déclaré M. Karamé lors d’une conférence de presse à Doha, sans préciser les mesures envisagées. « Certains responsables français ont reconnu l’existence de pressions israéliennes exercées sur eux. Al-Manar n’a pas commis d’erreur », a poursuivi M. Karamé, rejetant ainsi implicitement les griefs lancés par le Conseil d’État contre al-Manar. La commission parlementaire des Affaires étrangères a, pour sa part, appelé à l’issue d’une réunion tenue place de l’Étoile hier à annuler les privilèges accordés aux chaînes françaises. Elle a également proposé de demander l’intervention de la Ligue arabe pour soutenir la chaîne. Mais le président du Conseil national de l’audiovisuel (CNA), Abdelhadi Mahfouz, a lancé hier un appel à la tolérance, en attendant la réunion qui se tiendra vendredi, à Paris, entre le CSA français et les représentants d’al-Manar. Soulignons que M. Mahfouz avait menacé, lors de la réunion de solidarité avec la télévision du Hezbollah, vendredi dernier, les chaînes françaises d’un traitement réciproque. Dans un entretien téléphonique avec L’Orient-Le Jour, le président du CNA, qui fait également partie du comité de suivi de l’affaire al-Manar, a indiqué que « le Liban compte sur la solidarité arabe pour défendre la chaîne, car le dossier concerne tous les médias de la région ». Soulignant qu’al-Manar est « un média engagé qui défend une cause », il a relevé que la télévision du Hezbollah, « qui est une chaîne religieuse, ne peut en aucun cas être qualifiée de raciste envers les juifs car elle respecte et défend les trois religions monothéistes ». « Elle ne s’en est jamais prise à la religion israélite, mais à la politique israélienne », a-t-il dit. Indiquant que chaque chaîne est susceptible de commettre des erreurs notamment dans le cadre de la diffusion en direct, M. Mahfouz a appelé le CSA français « à donner plus de temps à al-Manar afin de s’adapter et d’effectuer quelques changements pour respecter les obligations de la convention signée en novembre dernier, surtout que la chaîne a exprimé sa disposition à respecter les clauses de cette convention ». Il a également souhaité que « le CSA revienne sur sa décision et fasse prévaloir le dialogue et la tolérance ». Interrogé au sujet des mesures restrictives vis-à-vis des chaînes françaises qui diffusent leurs programmes au Liban, M. Mahfouz a indiqué que de telles dispositions ne peuvent être prises par le CNA libanais, car la diffusion de ces chaînes – à travers des canaux libanais et non via satellite – est régie par des accords entre les gouvernements libanais et français. Dans une question relative aux privilèges accordés aux chaînes audiovisuelles françaises, le président du CNA a précisé qu’ils se rapportent aux émissions de RFI et de TV5 diffusées respectivement par Radio Liban et le Canal neuf. Évoquant ces programmes, il a conclu que « le Liban tient à la francophonie autant que la France ».