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Actualités - ANALYSE

ÉCLaIRAGE La direction palestinienne veut ouvrir une nouvelle page avec Beyrouth Liban-olp : des changements certains, mais le problème de fond reste sans solution

La visite est certainement un événement. En voyant les images de l’accueil officiel réservé aux dirigeants palestiniens, Mahmoud Abbas et Ahmed Qoreï, à l’AIB, on a du mal à se souvenir du lourd contentieux qui a longtemps opposé les autorités libanaises à la direction palestinienne. Pourtant, ce contentieux existe et une simple visite, aussi importante soit-elle, ne peut suffire à le régler, malgré toutes les déclarations de bonnes intentions. Pour le Liban, le fond du problème reste celui de l’avenir des réfugiés palestiniens sur son sol. Or, aujourd’hui, aussi bien le Liban que l’Autorité palestinienne savent que l’heure n’est pas venue de lui trouver une solution définitive et, en attendant, toutes les décisions ne peuvent être que partielles. Mais elles n’en sont pas moins concrètes et nécessaires. En se rendant à Damas et à Beyrouth, dans le cadre d’une vaste tournée arabe, la nouvelle direction palestinienne a voulu confirmer la tendance au rapprochement avec ces deux pays, dans le cadre d’une éventuelle relance du processus de paix dans la région ou, en tout cas, dans l’esprit d’une certaine coordination face aux menaces qui pèsent sur la région. Yasser Arafat avait lui-même entamé ce rapprochement, mais le contentieux personnel qui existait entre lui et le régime syrien l’empêchait de le concrétiser réellement. Farouk Kaddoumi (Abou Lotf) avait certes conservé d’excellentes relations avec les Syriens et les Libanais même pendant la période de crise, mais, aujourd’hui, la nouvelle direction peut elle aussi prendre le chemin de Damas et Beyrouth et être accueillie avec tous les honneurs dus à une délégation présidentielle d’un pays frère. Les conditions de vie dans les camps au cœur des entretiens Mais la visite n’est pas seulement symbolique. Elle a aussi abordé des questions importantes, notamment sur les conditions de vie des réfugiés palestiniens. Le sujet avait d’ailleurs été évoqué lors de la venue, il y a une dizaine de jours, de Farouk Kaddoumi à Beyrouth et à Damas. Et les autorités libanaises avaient alors décidé d’autoriser l’utilisation du ciment dans les camps palestiniens. Ce qui devrait permettre aux réfugiés de construire des maisons en béton, donc d’améliorer leur situation sur le plan de l’habitat. Cette tendance s’est confirmée hier, lors des entretiens de Mahmoud Abbas (Abou Mazen) et Ahmed Qoreï (Abou Alaa) avec les responsables libanais. Et la partie libanaise a rappelé aux dirigeants palestiniens que les réfugiés ont depuis 1999, et cela grâce à une décision du président Lahoud strictement exécutée par la Sûreté générale, le droit d’entrer et de sortir du Liban sans autorisation préalable, contrairement à ce qui se passe dans de nombreux pays arabes. Au Liban, peu de gens le savent, mais c’est une réalité, les Palestiniens munis d’un document de voyage peuvent se déplacer librement à l’instar des citoyens locaux. Les autorités libanaises ont toutefois promis d’alléger le dispositif sécuritaire autour des camps, afin de permettre aux réfugiés de respirer un peu. En contrepartie, les différentes organisations palestiniennes devraient faire un effort pour que ces camps ne servent plus de refuge aux hors-la-loi. La direction palestinienne a, de son côté, proposé l’ouverture d’une ambassade palestinienne au Liban, qui s’occuperait des réfugiés et serait l’interlocuteur officiel et légal des autorités libanaises. Mais celles-ci ont préféré prendre leur temps pour étudier ce projet, car il pourrait avoir des conséquences stratégiques pour le Liban. À la recherche d’une légitimité interne Apparemment, la nouvelle direction palestinienne souhaiterait réellement ouvrir une nouvelle page avec le Liban et la Syrie, et surtout s’imposer sur la scène palestinienne, notamment dans les camps hors des territoires occupés. Car, s’il y a certes un volet politique important dans cette visite, elle comporte aussi un aspect interne aux Palestiniens. Depuis des années, en fait depuis le conflit ouvert entre le Fateh de Arafat et les organisations palestiniennes prosyriennes, les camps du Liban (sauf ceux de Aïn el-Héloué et de Rachidiyé) et de Syrie échappent au contrôle effectif du Fateh, qui avait d’ailleurs décidé d’arrêter les subventions que l’OLP verse aux différentes organisations palestiniennes qui en sont membres. Cela avait d’ailleurs provoqué de nombreux conflits entre les différentes factions dans les camps. Or, depuis la dernière visite de Farouk Kaddoumi à Damas et Beyrouth, la voie en vue du règlement de ce contentieux avait été ouverte et la nouvelle direction s’y est engouffrée, confirmant la tendance et promettant de recommencer à verser les subventions dues aux organisations prosyriennes, en contrepartie d’une reconnaissance de l’autorité du Fateh dans les camps du Liban. Contrairement à ce que l’on aurait pu croire, les deux visites successives de Kaddoumi d’abord et de Mahmoud Abbas et Ahmed Qoreï ensuite, à Damas et Beyrouth, ne seraient pas contradictoires, mais complémentaires, surtout depuis que Kaddoumi a ouvertement et officiellement demandé à Marwan Barghouthi de retirer sa candidature à la présidence de l’Autorité palestinienne. Cette complémentarité toute neuve marque le début d’une coordination effective entre les différentes factions palestiniennes, mais aussi entre l’OLP et les autorités libanaises et syriennes. Et elle ne peut que se répercuter positivement sur la situation des réfugiés palestiniens dans les camps du Liban, longtemps la proie des luttes intestines palestiniennes. À la recherche d’une légitimité interne et régionale, la nouvelle direction palestinienne a voulu se rapprocher de tous les régimes arabes, et plus particulièrement de ceux qui poursuivent, directement ou non, la lutte contre Israël afin de gagner de la crédibilité auprès des réfugiés dans les camps, souvent plus radicaux que les Palestiniens intégrés dans la société. Le Liban et la Syrie ont accueilli favorablement cette initiative. Et s’il est encore trop tôt pour sauter aux conclusions, il semblerait qu’une nouvelle page serait en train de s’ouvrir entre ces trois parties qui ont encore un contentieux direct avec Israël. Scarlett HADDAD


La visite est certainement un événement. En voyant les images de l’accueil officiel réservé aux dirigeants palestiniens, Mahmoud Abbas et Ahmed Qoreï, à l’AIB, on a du mal à se souvenir du lourd contentieux qui a longtemps opposé les autorités libanaises à la direction palestinienne. Pourtant, ce contentieux existe et une simple visite, aussi importante soit-elle, ne...