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Métiers D’art Aubusson à la rescousse du «nôl» de Zouk Mikael (photos)

Aubusson – Zouk Mikael. Leurs métiers à tisser sont presque similaires, leurs techniques ancestrales également. Mais l’une est célèbre dans le monde entier pour ses tapisseries et l’autre se bat pour préserver une tradition qui périclite. Anciennement réputé dans la région pour son tissage au «nôl» de vêtements, de tissus d’ameublement et de tapis, l’artisanat de Zouk Mikael décline faute d’artisans et de débouchés. Pourtant, il y a quelques décennies, les lissiers de Zouk s’étaient attelés, avec succès, à l’art de la tapisserie. Ils s’étaient même illustrés par leur dextérité à représenter le visage humain. Précieusement conservée par la municipalité, une lettre – signée de sa main – du général de Gaulle, dont ils avaient fait le portrait, en témoigne: «Je fais honneur à cet artisan libanais qui a su non seulement tisser mon portrait mais également mon caractère», avait-il écrit. Des quelque deux cents lissiers de cette époque, on est passé aujourd’hui à une petite vingtaine, dont à peine trois jeunes recrues. Le métier est en perdition. Pour sauver ce savoir-faire séculaire, Nouhad Naufal, l’énergique président de la municipalité de Zouk, a fait appel, avec l’Unesco, à un intervenant d’Aubusson (le centre de production de tapisseries le plus célèbre au monde) pour essayer de mettre en place des échanges techniques entre Zouk et Aubusson, et établir un plan de solutions marketing. La première constatation de Bernard Petit, gérant d’une société de fabrication de tapisseries et chargé des affaires culturelles auprès du maire d’Aubusson, venu au Liban pour une première mission d’état des lieux, est que les artisans de Zouk ont «une qualité de travail et une maîtrise technique qui n’ont rien à envier à celles d’Aubusson». «Je pensais tomber uniquement sur le tissage des vêtements, alors qu’il y a des artisans ici qui connaissent parfaitement la technique de la tapisserie. Et qui travaillent sur le même principe qu’à Aubusson: chaîne en coton et trame en laine. Après, au niveau des matériaux de base, il y a des différences, notamment au niveau de la qualité de la laine qui doit être améliorée et de la palette de couleurs qui, en l’absence d’un atelier de teinture, n’offre pas un très large éventail de choix.» Artistes et artisans, une collaboration nécessaire À Aubusson, tout un ensemble de métiers est relié à la production de tapisseries. Cela va des producteurs et filateurs de laine à l’artisan lissier, en passant par le teinturier, le peintre-cartonnier (qui crée le motif de la tapisserie)... Évidemment, les possibilités ne sont pas les mêmes à Zouk. Bernard Petit relève que «la chaîne des métiers est ici assez différente. Une des différences vraiment marquantes avec Aubusson est qu’il n’y a pas à Zouk de collaboration entre artiste et artisan. L’artisan-lissier crée lui-même ses motifs ou alors reproduit un tableau préexistant. Alors que ce qui a contribué à la pérennité de la tapisserie à Aubusson est cette étroite collaboration qui a toujours existé entre artiste et artisan». De grands noms de la peinture, de la sculpture et même de l’architecture se sont intéressés à la tapisserie: Lurçat, Braque, Picasso, Le Corbusier, Calder... Et les plus grands artistes contemporains continuent à créer des œuvres spéciales pour les ateliers d’Aubusson. «C’est à ce niveau-là qu’il faut commencer par agir, estime le spécialiste. Il faut à tout prix enclencher une collaboration avec les artistes qui, d’une part pourront renouveler le style un peu académique du tissage à Zouk et, d’autre part, pourront par leur réseau de distribution (galeries, collectionneurs, etc.) revivifier ce secteur. Car il faut savoir que la grande majorité du chiffre d’affaires se fait par ce biais-là. À Aubusson, la clientèle de passage et le tourisme ne rapportent pas plus que 2 à 5% du chiffre d’affaires.» Développer des idées marketing afin d’augmenter les débouchés commerciaux mais aussi essayer de trouver des domaines d’échanges entre Zouk et Aubusson, voilà ce à quoi s’est attelé Bernard Petit tout au long de son séjour libanais. Le plan de sauvetage de l’artisanat du «nôl» à Zouk devrait, selon lui, se faire sur plusieurs étapes. «Dans un premier temps, il faudra donner un nouvel élan à cet art en contactant les artistes libanais, puis faire une mise au point couleur à Aubusson, pour pouvoir envoyer la matière première. Petit à petit, comme cela se fait dans tous les ateliers d’Aubusson, un stock sera créé, en attendant le lancement sur place d’une formation et d’un atelier de teinturier. Il pourrait également y avoir une possibilité de sous-traiter ici la fabrication de tapisserie d’Aubusson. Et, évidemment, mettre en place différents ateliers de formation, ou encore habituer les artisans à faire de petits formats, plus faciles à acheter par les touristes...» Une collaboration qui donnera lieu peut-être, plus tard, à la mise en place d’un protocole d’échanges entre les deux villes. Z.Z.

Aubusson – Zouk Mikael. Leurs métiers à tisser sont presque similaires, leurs techniques ancestrales également. Mais l’une est célèbre dans le monde entier pour ses tapisseries et l’autre se bat pour préserver une tradition qui périclite.
Anciennement réputé dans la région pour son tissage au «nôl» de vêtements, de tissus d’ameublement et de tapis,...