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Actualités - interview

Coopération - Interview conjointe du président hongrois à « L’Orient-Le Jour » et au « an-Nahar » Mädl : Nous sommes présents en Irak pour défendre les valeurs de liberté et de démocratie (photos)

Budapest, de Gebrane TUENI et Michel TOUMA C’est dans un palais présidentiel simple, voire austère, jouxtant le somptueux palais royal de Budapest, transformé en vaste galerie d’art, que le président hongrois, Ferenc Mädl, nous a reçus à la veille de sa visite officielle à Beyrouth. Affable et courtois, cet ancien professeur d’université, auteur d’une vingtaine d’ouvrages de droit et de 200 publications en différentes langues étrangères, fait montre d’une connaissance approfondie de la conjoncture politique de l’Europe, et du monde contemporain en général. Dans une interview exclusive accordée conjointement à « L’Orient-Le Jour » et au « an-Nahar », le président Madl – élu à la tête de la République hongroise le 6 juin 2000 (il a pris en charge ses fonctions le 4 août) – évoque aussi bien les relations avec le Liban que la situation au Moyen-Orient ou la riche expérience de son pays durant la phase de mutation politique et économique qui a suivi la chute du mur de Berlin. Soulignant que le Liban occupe une position unique au M-O, le président Mädl précise que l’un des piliers de la politique de la Hongrie dans la région est de contribuer au règlement du conflit israélo-arabe. Affirmant que son pays participe aux efforts de l’après-guerre en Irak pour défendre les valeurs de la liberté, de la démocratie et des droits de l’homme, le président Mädl déclare que les conceptions européenne d’« Europe élargie-Nouveau voisinage » et américaine de « Grand Moyen-Orient » ont des objectifs identiques et correspondent aux intérêts des pays du M-O. « Il s’agit de combattre le terrorisme, de consolider la stabilité, d’assurer un développement socio-économique durable au M-O et d’approfondir la coopération avec l’Europe et les États-Unis », souligne-t-il. Le président hongrois indique dans ce cadre que son pays croit fermement que les libertés publiques peuvent être appliquées à des sociétés différentes du modèle européen. Question - Vous vous rendez en visite d’État au Liban. Vous êtes le premier chef d’État hongrois à faire ce geste en direction du pays du Cèdre. Quels sont les enjeux ainsi que les espérances du président de la Hongrie quant à cette visite ? Réponse : « Cette visite témoigne de la haute estime que la Hongrie a pour le Liban, pays d’histoire et de culture plusieurs fois millénaires, riche en merveilles de la nature. Le Liban est bien connu par tous les Hongrois, grâce notamment aux tableaux du peintre hongrois Tivadar Csontváry Kosztka. Ma visite consolidera les relations bilatérales établies il y a 39 ans. Elle renforcera une coopération diversifiée, au sein de laquelle les contacts humains, sur le double plan culturel et commercial, ont toujours su jouer un rôle éminent. Mon voyage est motivé par mon intention d’approfondir encore l’amitié entre nos deux peuples, d’élargir notre coopération économique et culturelle. Enfin, cette visite est porteuse d’un message que j’adresse au Liban et aux autres pays du Moyen-Orient : dans les relations extérieures de la Hongrie qui, le 1er mai 2004, adhérera à l’Union européenne, l’importance des liens qui nous lient aux pays de la région ne diminuera nullement. Nous avons bien au contraire la volonté de continuer à bâtir avec eux des relations au service de la sécurité, de la stabilité et de la coopération. » Q. Pensez-vous que l’adhésion de certains pays de l’Europe de l’Est à l’UE aura un impact négatif sur le projet de partenariat euro-méditerranéen ? R. « L’adhésion des pays de l’Europe centrale et de l’Europe de l’Est à l’Union européenne permettra – d’un point de vue politique – de promouvoir le dialogue euro-méditerranéen et d’élargir le cadre de la coopération. La Hongrie ne cherche à dépasser personne. Elle s’intéresse à assurer la participation des pays du Sud de la Méditerranée, avec le plus grand degré possible de préparation, à la mise en œuvre du concept euro-méditerranéen de stabilité, de sécurité et de coopération. » Q. Votre politique étrangère consiste-t-elle, à moyen et long terme, à privilégier vos rapports avec les autres pays de l’Europe de l’Est, ou avez-vous, malgré tout, un quelconque intérêt à développer vos relations avec les pays du sud de la Méditerranée ? Dans ce dernier cas de figure, quel type d’intérêt ou de facteur vous pousse-t-il à renforcer vos liens avec les États du Sud ? R. « Traditionnellement, la Hongrie a entretenu des liens historiques et culturels étroits avec les pays du sud de la Méditerranée. Notre pays ainsi que les pays du sud de la Méditerranée appartenaient au même empire, et les traces de cette cohabitation se manifestent toujours dans notre langue, notre culture, notre musique, et même dans la façon avec laquelle nous épiçons nos plats. Beaucoup de nos orientalistes ont contribué à la diffusion de la culture arabo-islamique dans le monde entier. Outre les liens traditionnels, il est de notre intérêt national d’aider à l’instauration de la paix, la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient. » Q. Quel bilan peut-on dresser de vos rapports avec le Liban au niveau des principaux domaines qui marquent ces relations bilatérales ? Votre gouvernement a-t-il des projets spécifiques pour développer davantage ces relations, à la lumière, notamment, du partenariat euro-méditerranéen ? R. « Le Liban occupe une position unique au Moyen-Orient. Il est un facteur important dans le processus de paix, et la nature particulière de sa structure démocratique est exemplaire. En vertu d’un accord d’association, le pays entretient des relations avec l’Union européenne et participe activement au Processus de Barcelone. À la lumière de ces circonstances et de l’histoire de nos relations bilatérales, la Hongrie s’est engagée à promouvoir la coopération aux niveaux multilatéral et euro-méditerranéen, c’est-à-dire bilatéral. À notre avis, il est important de poursuivre le dialogue politique et de développer une nouvelle forme de coopération économique et politique. Nous attachons une grande importance au renforcement des liens culturels et humains entre les deux pays, tout en prêtant une attention particulière au développement du secteur touristique qui a été mis en veilleuse jusqu’à présent. » Q. Des liens économiques solides lient nos deux pays. Pensez-vous que l’on puisse les projeter vers le politique, en l’occurrence les questions « chaudes » du Moyen-Orient, c’est-à-dire la cause palestinienne et le processus de paix ? R. « L’un des piliers de la politique équilibrée de la Hongrie dans la région est de contribuer au règlement de la question du Moyen-Orient, du conflit israélo-palestinien. Sur la base de cette position politique, la Hongrie établit des relations constructives aussi bien avec Israël qu’avec l’Autorité palestinienne. Elle prend aussi des initiatives à l’égard des pays arabes. Nous estimons que les bienfaits d’une coopération économique et commerciale fructueuse ne se limitent pas à la sphère économique, mais ils se répercutent également dans les domaines de la politique et de la sécurité. Les échanges commerciaux libano-hongrois sont significatifs. À titre d’exemple, à partir des années 1970 et jusqu’en 1995, la valeur des exportations hongroises vers le Liban s’élevait à quelque 35 à 40 millions de dollars par an. Au lendemain du changement de régime politique en Hongrie, il y a eu une “restructuration” dans notre coopération économique. Nos relations extérieures avec les États du Golfe sont devenues équilibrées, de sorte que les échanges de commerce extérieur basés sur le commerce intermédiaire ont diminué. Mais en même temps, on a vu arriver sur le marché hongrois des investissements libanais. La valeur des investissements libanais en Hongrie s’élève aujourd’hui à quelque 15 millions de dollars. Ceux qui, au Liban ou dans les États du Golfe, achètent du fromage “kashkaval” consomment, à coup sûr, du fromage produit en Hongrie. » Q. La Hongrie a soutenu la guerre en Irak. Des policiers irakiens s’entraînent dans votre pays. Avec le recul, estimez-vous avoir pris la bonne décision en vous rangeant derrière les États-Unis, même à l’encontre des positions des grands pays européens comme la France et l’Allemagne ? Et pensez-vous que ce différend entre Européens fasse bel et bien partie du passé ? R. « Sur la base des informations reçues de ses alliés, le gouvernement hongrois a rejoint la coalition dans l’hypothèse de la présence d’un danger présenté par des armes de destruction massive, la terreur et la dictature. Nous avons élevé notre voix pour défendre des valeurs universelles, celles de la liberté, de la démocratie et des droits de l’homme. C’est dans cet esprit que nous avons décidé de contribuer, par l’envoi d’un contingent de 300 personnes, à la cause de la stabilisation et de la reconstruction en Irak. Nous attachons une grande importance au fait que l’on reconnaisse de plus en plus largement, y compris au sein de l’Union européenne, que le règlement de la question irakienne et la mise en place d’un Irak stable et démocratique sont de l’intérêt de la communauté internationale. Le rôle de plus en plus important qu’accepte de jouer l’Onu dans le règlement du conflit est sur ce plan un indice significatif. » Q. Les États-Unis viennent de lancer le projet du « Grand Moyen-Orient » qu’ils soumettront aux instances internationales (G8, Union européenne). Quelle est la position de la Hongrie quant au principe qui consiste à exporter la démocratie vers le monde arabo-musulman ? R. « La Hongrie salue et étudie attentivement les conceptions européenne d’“Europe élargie – Nouveau voisinage” et américaine de “Grand Moyen-Orient”. Les objectifs de ces deux conceptions sont fondamentalement identiques et correspondent, à notre avis, aux intérêts des pays concernés du Moyen-Orient. Il s’agit, en effet, de mettre fin aux conflits israélo-arabe et israélo-palestinien, de combattre le terrorisme, de consolider la sécurité et la stabilité, d’assurer un développement économique et social durable au Moyen-Orient, ainsi que d’approfondir la coopération avec l’Europe et l’Amérique. La réalisation de ces objectifs doit aller de pair avec la mise en œuvre des droits de l’homme, universellement reconnus par la Charte des Nations unies, et le respect rigoureux des traditions historiques, culturelles et morales. La Hongrie ne pense pas à l’exportation de la démocratie. Elle est plutôt partie prenante dans une réflexion, une action commune responsable à long terme, menée par des générations, à laquelle participeraient nos partenaires arabo-musulmans d’égal à égal. Les délibérations du G8 et de l’UE pourraient marquer des étapes importantes de cette réflexion et nous nous attendons à ce que le sommet de Tunis de la Ligue arabe prenne position à ce sujet avec empathie et une attitude constructive. » Q. Dans quelle mesure est-il possible, à votre avis, de stimuler une démocratisation véritable des pays du Moyen-Orient ? Le tissu social des pays arabes est-il compatible avec l’établissement d’une démocratie de type ocidental, fondée sur les droits de l’homme et une réelle alternance au niveau du pouvoir ? R. « Nous n’avons pas été les initiateurs des théories qui affirment la présence de conflits de civilisations et de religions. Nous ne croyons pas que les sociétés arabes doivent être transformées selon les principes des démocraties occidentales. Néanmoins, nous croyons fermement aux libertés civiles qui pourraient être appliquées à des sociétés différentes du modèle européen. Le processus de la démocratisation ne doit pas être détaché des traditions historiques et religieuses. Tout au contraire, il s’agit d’un processus qui va de pair avec le progrès culturel, économique et social qui laisse indubitablement son empreinte sur la spiritualité et la mentalité des gens. En même temps, la démocratisation implique l’ouverture aux autres et au monde qui nous entoure. Par conséquent, la démocratisation des pays arabes nécessite le perfectionnement des traditions et la création de conditions préalables pour leur intégration dans le monde. Le fait de penser et de travailler ensemble pourrait promouvoir ladite intégration, mais il est insuffisant pour sa réalisation. » Q. En 1989, le démantèlement du bloc soviétique commence par la Hongrie, la frontière austro-hongroise étant la première à permettre la libre circulation des personnes. Le 23 octobre 1989, la Hongrie abandonne le titre de République populaire et proclame la nouvelle République. Cette transition s’est-elle effectuée en douceur, sachant que la Hongrie présentait au sein du bloc soviétique un caractère singulier, plus libéral, qualifié par certains de « modèle hongrois » ? R. « Ce “caractère libéral”, terme qui doit s’entendre, évidemment, dans les cadres d’un régime d’oppression, a été le résultat d’une longue et complexe évolution historique et psychosociologique. Après la répression qui a suivi la révolution de 1956 et qui a duré jusqu’au milieu des années 1960, le dirigeant du régime, János Kádár, et le parti-État régnant dans le pays ont proposé à la société un “marché”. Pour l’essentiel, cela se résumait ainsi : la société prendra tacitement note de la légitimation du régime et, en contrepartie, celui-ci lâchera du lest. Le pouvoir en place à l’époque a bien défini les limites politiques que l’on ne devait pas dépasser, mais, à l’intérieur de ces limites, une marge de manœuvre plus grande a été assurée. Cela n’était certes pas la liberté, et aucune trace de démocratie n’était présente dans le pays. Il n’y avait aucun choix possible d’alternatives politiques. Publications censurées, dissidents et autres opposants au régime surveillés, passés sur table d’écoute par la police politique... Le “marché” qui, finalement, a été bel et bien conclu était en réalité un moyen de briser l’opposition d’un peuple après sa révolution. L’effet de ce marché se fait sentir jusqu’à ce jour, car certains affirment que ceux qui vivaient, étudiaient, travaillaient dans la dictature, donc tous les citoyens du pays restés en Hongrie, ont pris note et ont même accepté ou légitimé la situation. Cela est évidemment faux. Mais il est certain, malgré tout, que par rapport à la plupart des pays socialistes, la Hongrie avait une marge de manœuvre plus large. Avec d’autres facteurs de politique internationale, cela a certainement contribué aussi à ce que, à la fin des années 1980, après une longue érosion, le pouvoir de l’État-parti s’est irrémédiablement affaibli en Hongrie, et cela a été suffisant pour que les organisations de l’opposition, créées entre-temps grâce à un vide juridique tardivement identifié, imposent des négociations pacifiques au parti-État. À partir de là, le chemin était relativement facile, mais pas toujours pavé de bonnes intentions par le pouvoir, et ce jusqu’à la proclamation de la république. » Q. Du communisme vers le libéralisme. Comment a réagi la société civile à ce changement ? Quels sont les points forts de l’expérience hongroise ? R. « L’acquis le plus important de la transition négociée a été de poser les fondements stables de la démocratie, de notre système institutionnel de droit public qui fonctionne toujours. Bien que, de temps en temps, on assiste à des tentatives visant à les modifier pour divers motifs politiques non justifiés, l’expérience montre que ces voix finissent par s’affaiblir assez vite. La meilleure preuve de la stabilité de notre système de droit public est que tous les gouvernements des quinze dernières années sont restés au pouvoir pendant toute la durée de leurs mandats, chose unique parmi les pays ex-socialistes. C’est aussi grâce à cette stabilité que la Hongrie a réussi à sortir d’une situation économique tragique et à se placer dans le peloton de tête des pays candidats à l’adhésion à l’Union européenne. Ceci dit, pendant la dernière décennie, nous avons “oublié” de débattre, dans un esprit d’ouverture et de franchise, un grand nombre de questions relatives au changement du système politique et qui sont importantes du point de vue de l’état d’âme de la société. À titre d’exemple, dans un cas “normal”, la distinction claire entre un ordre démocratique d’un État de droit et un système totalitaire, dictatorial, ne prêterait pas à discussion, ne poserait pas de problème. Or, en Hongrie, c’est l’un des thèmes principaux dont on parle aujourd’hui. Puisque, par pudeur, nous l’avons tu pendant plus d’une décennie, aujourd’hui les gens, se retrouvant affiliés tantôt à la gauche, tantôt à la droite politique, abordent le problème avec beaucoup d’émotions. Néanmoins, je suis confiant qu’il n’est pas encore trop tard, et que, à terme, le débat débouchera sur la clarification nécessaire et produira une vie politique moins exaltée. » Q. Quel est le degré d’implication de la jeunesse hongroise dans la vie politique du pays ? R. « Depuis les dernières élections, l’activité politique des citoyens est très importante en Hongrie. Du point de vue de la démocratie, c’est un point positif, car cela signifie que les gens s’intéressent aux affaires publiques. Selon les sondages, au moment des élections, soixante pour cent de ceux appartenant à la tranche d’âge de 18 à 30 ans, représentant un cinquième des citoyens en âge de voter, avaient l’intention de se rendre aux urnes. C’est un phénomène remarquable. Si des organisations de la jeunesse mises en place par le pouvoir fonctionnaient à l’époque de l’État-parti, celles-ci ne constituaient pas des ateliers politiques démocratiques. La transition a ouvert la voie à l’engagement politique pour les jeunes aussi. Aujourd’hui, chaque parti représenté au Parlement dispose de sa propre organisation de jeunesse ou entretient des rapports privilégiés avec des organisations de ce genre. L’engagement politique des jeunes affiche donc une tendance positive. Il montre que les générations qui grandissent souhaitent intervenir dans les décisions déterminant leur propre destin et l’avenir du pays. » Q. Au cours de votre parcours politique, vous avez toujours lutté pour la liberté de la presse et de l’information. Qu’en est-il aujourd’hui de cette liberté et, au-delà, quel est l’état des lieux des libertés en général en Hongrie ? R. « Votre question est d’une actualité particulière, puisque le 15 mars est la journée de la presse libre en Hongrie. En commémorant notre révolution de 1848, nous fêtons à la fois la liberté de la presse. Sándor Pet_fi, éminent poète de la révolution, la formula ainsi : “La liberté hongroise est née aujourd’hui, car c’est aujourd’hui que la presse hongroise a perdu ses menottes”. Et cette joie, nous l’avons vécue nous-mêmes au moment de la transition pacifique de 1990. Depuis, la presse en Hongrie est de nouveau libre : chacun est libre de son choix entre les divers organes de la presse, au gré de son goût, de ses valeurs. Les problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui sont d’un ordre différent, et ils peuvent avoir des répercussions sur la liberté de la presse. L’un de ces problèmes réside dans la structure de l’actionnariat, l’intérêt des propriétaires. Comme la presse est aussi une entreprise commerciale, il faut reconnaître le fait que les intérêts des propriétaires se reflètent sous forme de certaines attentes. L’autre facteur est celui des liens avec les forces politiques qui peuvent se traduire par une attitude portant préjudice à l’information objective et au respect du principe de la représentation sans condition de la publicité. » Q. De par sa composition démographique, la Hongrie est considérée comme un État-nation homogène. Pensez-vous qu’avec l’intégration de structures supranationales, l’UE par exemple, les nations peuvent garder leurs spécificités ? R. « Le présent montre que oui. Les membres de l’Union sont capables de préserver leurs spécificités nationales. Les communautés nationales ne se dissolvent pas dans une communauté fondée sur des intérêts politiques et économiques. Au contraire, elles enrichissent celle-ci de leurs cultures, de leurs histoires. Dès le XIXe siècle, l’auteur de notre hymne national a lancé la mise en garde suivante : le seul moyen pour la multitude de subsister en tant que nation est de suivre sa trajectoire bien définie, mais d’avancer dans un système universel, partagé avec les nations auxquelles elle est liée. À vrai dire, elle n’a pas le choix. Comme aucune autre nation ne l’a. Il nous revient de cultiver nos traditions, nos valeurs, nos rites constitutifs de communauté, et de faire preuve de force créative et de compétitivité. De prouver, dans tous les domaines de la vie, que notre contribution enrichit la culture européenne prise au sens le plus large du terme. D’autre part, la façon la plus sûre de nous faire accepter et d’être compétitifs dans ce monde est de connaître la culture d’autrui, et ainsi d’être sensibles et réceptifs à l’égard des traditions des nations partenaires. »

Budapest, de Gebrane TUENI et Michel TOUMA

C’est dans un palais présidentiel simple, voire austère, jouxtant le somptueux palais royal de Budapest, transformé en vaste galerie d’art, que le président hongrois, Ferenc Mädl, nous a reçus à la veille de sa visite officielle à Beyrouth. Affable et courtois, cet ancien professeur d’université, auteur d’une vingtaine...