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Actualités - OPINION

Un style ondoyant, souple, consensuel

Côté style, Omar Karamé, égal à lui-même, à sa réputation de finesse courtoise, ne déçoit pas les attentes. Il a manœuvré avec diplomatie mais aussi avec beaucoup de patience. Personne, en effet, ne peut recenser l’incroyable nombre de contacts politiques qu’il a établis dès avant sa désignation officielle, pour déblayer le terrain. Prudent, il a opéré sous le sceau du secret, sans confidences publiques inopportunes, sans fuites calculées en direction des médias, sans ballons d’essais, sans rapporter aux uns ce qu’en disent les autres. Il n’a rien voulu précipiter, estimant qu’on ne doit pas contourner les difficultés qui se présentent mais les résoudre. Sans quoi, elles se transformeraient en bombes à retardement. Les conditions posées, il en fait état d’une manière tout à fait générale. En indiquant que lors de la formation d’un gouvernement, chaque partie politique tente naturellement, légitimement, de conforter ou d’améliorer ses positions. Ce qui revient à convenir que l’on a retrouvé les climats d’antan. De cette ère lointaine maintenant un peu oubliée où Damas n’intervenait pas. Des consignes claires ont été données par les décideurs à leurs fidèles : ne rien faire, ne rien dire qui puisse laisser penser que Damas souhaite telle ou telle composition de cabinet, telle ou telle solution aux litiges entre Libanais. Ils ajoutent qu’ils ont pleine confiance dans le président Émile Lahoud mais aussi dans les cadres politiques de ce pays. Cette attitude détachée n’a pas empêché certains d’effectuer la navette entre Beyrouth et Anjar, sans que personne ne les en prie ouvertement. Pour tenter de sonder les intentions, les desiderata, des Syriens. La plupart de ces touristes déclarent en privé agir pour faciliter les choses pour Karamé, servir de trait d’union, en tant qu’amis communs, entre des personnalités diverses. Comme ils ne sont pas désavoués, on peut estimer que, derrière le paravent, la Syrie a su influer sur le cours des choses. Ce qui pousse certains de ses zélateurs, qui n’ont pas peur des contradictions, à soutenir que son attitude est doublement admirable : d’abord parce qu’elle n’intervient pas ; ensuite parce qu’elle aide quand même. Un autre prosyrien, un peu plus porté à la logique, soutient qu’on se plaint aujourd’hui de la non-intervention syrienne encore plus qu’on ne protestait hier contre son immixtion. Et il demande à son propre camp de mieux définir ce qu’il veut de la Syrie. Bien entendu, l’opposition pour sa part n’en démord pas : le péché originel se situant au niveau de l’immixtionnisme syrien, tous les dérapages restent imputables aux décideurs. Les opposants soulignent que les Syriens ont imposé le fait accompli de la prorogation, d’où vient, selon eux, tout le mal. Ils ajoutent qu’il n’est pas exact que la Syrie se soit abstenue pour ce qui est de la formation du gouvernement. Elle tente simplement de faire croire cela aux Américains et aux Français, coauteurs de la 1559. Retour au camp loyaliste. Certains ont voulu se faire récompenser pour leur ralliement à la prorogation. Les lahousistes le leur ont contesté. En observant que leur appui résultait surtout de leur désir de complaire à la Syrie. De plus, la prorogation étant une nécessité stratégique, personne ne peut se vanter d’avoir du mérite en l’adoptant, ont ajouté les lahoudistes. Qui ont maintenu le cap, durant les tractations, sur un objectif : un cabinet représentant le plus largement possible la ligne dite nationale. Ils ont même soutenu que cette formation mériterait le label de gouvernement d’union nationale, polychrome et non monochrome. Il est difficile d’en convenir. Mais Omar Karamé a un peu mieux réussi dans l’ouverture sur l’opposition que Hariri. Il a en effet, naturellement, pu parler avec son alliée de toujours au Nord, Nayla Moawad, et aussi avec l’autre Nordiste, Boutros Harb, qui sont tous deux membres de Kornet Chehwane. Il a pu aussi parler avec Bkerké, qui lui a du reste envoyé Mgr Aboujaoudé. Il a prôné le dialogue général, répétant que toutes les forces pourraient accéder à son équipe. Mais il a aussi refusé de donner des assurances à l’opposition. Sous le prétexte paradoxal que ce ne serait pas démocratique, du moment que les questions se discutent et se décident en Conseil des ministres, non chez lui. Alors même que ce que l’opposition demande, au fond, c’est le retour à la démocratie... Il reste que par son approche personnalisée, Karamé a certainement arrondi les angles avec l’opposition. En principe, il n’est pas exclu qu’un dialogue s’ouvre, notamment autour de la nouvelle loi électorale, pivot de toute la vie politique intérieure. Philippe ABI-AKL

Côté style, Omar Karamé, égal à lui-même, à sa réputation de finesse courtoise, ne déçoit pas les attentes. Il a manœuvré avec diplomatie mais aussi avec beaucoup de patience. Personne, en effet, ne peut recenser l’incroyable nombre de contacts politiques qu’il a établis dès avant sa désignation officielle, pour déblayer le terrain. Prudent, il a opéré sous le...