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Actualités - REPORTAGE

Ce qu’ils en pensent - SITUATION GOUVERNEMENTALE

Au royaume d’Ubu, chaque partie rejette sur l’autre la responsabilité de la crise actuelle, sur fond d’opacité, due, en partie, au spectre d’une nouvelle crise de l’électricité, si aucune mesure n’est prise d’ici à la fin du mois. Comment, dans une étape aussi cruciale, le pays se retrouve-t-il pratiquement sans gouvernement, avec des ministres qui ont plus l’air de boutiquiers que de détenteurs de portefeuilles nationaux, un Parlement qui semble descendu de la planète Mars et des citoyens écrasés sous le poids d’un quotidien, sans lueur d’espoir ? Député « frondeur », au sein du bloc Hariri, dit bloc de la décision de Beyrouth, le Dr Ghattas Khoury répond aux questions de «L’Orient-Le Jour ». Ghattas Khoury, député de Beyrouth Q : Selon vous, qui est responsable de la non-formation d’un nouveau gouvernement ? R : « Les causes sont désormais connues. Elles sont à la fois externes et internes. Le président du Conseil, Rafic Hariri, ne souhaite pas présenter la démission du gouvernement si elle devait créer unr crise au sein du pouvoir. C’est pourquoi il préfère trouver une plate-forme d’entente avant de prendre la moindre décision. » Q : Certains disent au contraire qu’il exercerait une sorte de chantage, refusant de démissionner s’il n’est pas sûr de revenir à la tête d’une équipe à sa convenance... R : « Écoutez, je ne crois pas du tout à cette version des faits. Le président du Conseil a montré, à plusieurs reprises, sa grande conscience nationale. Il ne veut surtout pas placer le pays dans une situation de crise encore plus grave que celle que nous vivons actuellement. Si ce que vous dites est vrai, pourquoi les nombreux ministres qui lui conseillent de s’en aller, comme Pakradouni et d’autres, ne démissionnent-ils pas eux-mêmes, ce qui entraînerait forcément la démission du gouvernement ? Tout cela, c’est de la polémique stérile. La vérité, c’est que depuis l’amendement constitutionnel, nous sommes face à un problème grave et, surtout, le monde entier nous observe. Le moindre faux pas peut entraîner une véritable catastrophe. C’est pourquoi la nature du futur gouvernement est très importante. Soit cette équipe pourra donner un nouvel élan à la vie politique interne et améliorer l’image du Liban à l’étranger, soit elle sera la continuation des précédentes et n’entraînera qu’une prolongation des six dernières années. Ce qui serait terrible pour le pays. » Q : Comment faire, selon vous, pour sortir de l’impasse actuelle ? R : « Il faut revenir aux lois et à la Constitution et ouvrir la voie à un dialogue véritable, sincère et profond, qui permettrait la formation d’un gouvernement représentatif, capable de sortir le Liban de la crise dans laquelle il se débat. » Q : Comment établir un dialogue avec ceux qui le refusent ? R : « C’est quand même le président de la République qui ne cesse d’affirmer son intention d’entamer un véritable dialogue, tout en se déclarant ouvert à toutes les parties. Alors, soit il s’agit là d’un slogan creux, destiné à la consommation locale, soit il est l’expression d’une volonté réelle et c’est au président de trancher le débat, en mettant en application ses déclarations. Le meilleur moyen de le faire est de procéder à la formation d’un gouvernement représentatif et crédible. » Q : Avez-vous réglé le problème qui vous avait opposé au président du Conseil ? R : « Je suis toujours membre du bloc de la décision de Beyrouth. Il n’y a pas eu vraiment un problème avec M. Hariri. J’ai simplement refusé de voter en faveur de l’amendement constitutionnel, par respect pour la volonté de mes électeurs, puisqu’après tout, je représente une certaine partie de la population de Beyrouth. Le président du Conseil ne pouvait m’en tenir rigueur, conscient qu’il était nécessaire pour moi de garder une certaine marge de manœuvre. Je suis donc toujours membre de son bloc. » Q : Les électeurs que vous représentez ne trouvent-ils pas la situation anormale et ne vous demandent-ils pas d’agir en tant que député pour faire bouger les choses ? R : « Nous savons tous que ce gouvernement n’a plus de légitimité. Quant au Parlement, il a perdu une grande partie de sa crédibilité depuis que la majorité de ses membres a voté en faveur de l’amendement constitutionnel, après des déclarations hostiles à la reconduction du mandat de Lahoud. Toutes les institutions sont donc plus ou moins paralysées. L’espoir, pour nous, viendra des élections législatives du printemps prochain. En attendant, nous devons nous contenter d’un gouvernement à la durée de vie assez courte et nous devons agir pour le pousser à régler les questions sociales urgentes et à préparer une loi électorale satisfaisante. Il ne faut pas oublier que nous vivons une période très critique. » Norma Tohmé, étudiante en marketing Q : Comment vivez-vous le fait d’avoir un gouvernement qui ne fait rien et un Parlement pris par ses propres occupations ? R : « Je suis révoltée. Je ne crois pas qu’il existe au monde un cas de figure comme celui-ci. Rien ne fonctionne et les responsables s’en fichent éperdument, tout occupés par les bras de fer qu’ils engagent entre eux. Je n’ai jamais vu ça de ma vie, même s’il est vrai que je ne suis pas une spécialiste en affaires politiques. Hariri ne veut pas démissionner sans être sûr de former un gouvernement qui lui serait acquis et Lahoud veut un gouvernement homogène, si j’ai bien compris, avec lequel il pourrait travailler. Oubliés la menace internationale, la crise de l’EDL, les prix de l’essence et bientôt ceux du pain. Ce sont apparemment des questions secondaires. Mais ce que je ne comprends surtout pas, c’est l’inertie des citoyens. Pour beaucoup moins que cela, ils auraient dû descendre dans la rue, faire pression sur les députés, réagir quoi. C’est incroyable ! Et ceux qui étaient si soucieux de défendre la Constitution, au moment de l’amendement, pourquoi ne veulent-ils plus la défendre maintenant, lorsqu’il s’agit de pousser les dirigeants à assumer leurs responsabilités, conformément aux textes ? Je vous le répète, c’est insupportable. » Scarlett HADDAD

Au royaume d’Ubu, chaque partie rejette sur l’autre la responsabilité de la crise actuelle, sur fond d’opacité, due, en partie, au spectre d’une nouvelle crise de l’électricité, si aucune mesure n’est prise d’ici à la fin du mois. Comment, dans une étape aussi cruciale, le pays se retrouve-t-il pratiquement sans gouvernement, avec des ministres qui ont plus...