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Actualités - OPINIONS

Les émigrés nous écrivent

Partir, pour rester Des océans nous séparent du vieux pays ; mais les propos acides et les discours des agités qui nous gouvernent retentissent au-delà des mers, et nous assourdissent. Le président syrien d’abord, qui affirme sans broncher que la Syrie n’a consenti que des sacrifices au Liban et n’a ni intérêt ni intention hégémonistes. Puis Kandil, qui prétend sans ciller que la minorité doit se corriger, et se gargarise des propos d’Assad en reprenant à son compte la menace des foudres syriennes contre ceux qui sont critiques des agissements fraternels. Ensuite, le chef du Parlement, qui critique sans sourciller ceux qui monopolisent des postes politiques. Enfin, le vice-président du Parlement, qui annonce sans tiquer que le chef de l’État syrien n’acceptera pas de coup d’État contre le rôle syrien. Et voilà que, malgré Nations unies, États-Unis, Europe unie (peu importent les Libanais unis), les hérauts libanais du pays frère ne se donnent plus la peine de déguiser la sujétion, mais la revendiquent au nom de la stratégie et de l’arabité. Et tant pis pour les velléités autonomistes (on n’ose même plus parler d’indépendance) des renégats vendus aux Ricains et aux juifs. L’adjectif « libanais » n’a plus de sens. Et peu importe que le pays s’enfonce dans le marasme économique, s’embourbe dans l’incurie politique, s’enlise dans la corruption systématique. Peu importe l’asphyxie sociale, la paupérisation rampante, le désabusement, la fuite des cerveaux, la sinistrose ambiante. Heureusement qu’il reste l’émir al-Walid ben Talal pour nous donner des leçons de démocratie. Thérèse BAROUDI France Quinze ans de malheur Je suis dégoûté d’être libanais. Je ne regrette pas un instant d’avoir quitté cette terre qui ne m’a apporté que 15 ans de malheur, puis 15 autres d’espoirs gâchés, de regrets et d’amertume. À propos, qui est la lumière qui est supposée gérer le ministère de l’Électricité ? Ce n’est plus un pays du quart-monde, le Liban, c’est simplement un fruit moisi qu’on écrase chaque jour... Que tous les jeunes quittent tant qu’il est encore temps. Vous verrez : le Liban passera rapidement du statut de république bananière à celui de dictature népotique. Sebastien RACHOIN Philadelphia – USA À quoi servent nos députés ? Honnêtement, ils servent à quoi nos députés ? Quel gaspillage pour un petit pays. Nous avons besoin de ministres compétents qui aiment leur patrie (15 ministres tout au plus) et, bien sûr, qui savent le servir et être à l’écoute des compatriotes. Nous n’avons pas besoin de personnalités. Samy FOURZOLI France Un record original À l’heure où le monde vit dans un contexte de psychose face au terrorisme internationnal, le Liban en échappe ou du moins y a échappé après le démantèlement d’un réseau d’el-Qaëda. Pourquoi se plaindre et avoir peur, étant donné que nous échappons à ce contexte précis, et que nous avons des autorités compétentes qui assurent la totale sécurité de ses concitoyens ? La réponse est banale, les maux du Libanais ne viennent pas de l’extérieur, mais tout simplement de l’intérieur, ou du moins de la mauvaise volonté de nos politiciens. Cela dit, le Liban n’est pas très affecté par l’environnement international et ses problèmes se résument en quelques mots : corruption, pauvreté, crise, mécontentement, grogne sociale. Il y a quelques semaines, l’Onu a voté une résolution appelant les troupes syriennes à quitter le Liban, ce qui bien évidemment a été ignoré par le gouvernement (ne soyez pas surpris par les retombées politico-économiques d’ici à quelques semaines) ! Une autre information qui prouve que le système politique, administratif et social de « la Suisse du Moyen-Orient » est le meilleur du monde : Beyrouth ainsi que toutes les villes et tous les villages du Liban ont été soudainement plongés dans le noir. Enfin, si nous sommes inscrits dans le record Guiness pour l’année 2004 et les années à venir, rassurez-vous, ce n’est pas pour avoir la plus haute tour du monde, mais pour notre dette publique qui, jour après jour, dépasse de nouveaux records, atteignant déjà les 35 milliards d’euros. Houssam MROUÉ France Bravo M. Annan ! En tant que Libanais vivant à New York, siège des Nations unies, je tiens à exprimer ma profonde gratitude à M. Annan pour le courageux rapport sur la désormais fameuse résolution 1559 que vous avez eu la bonne idée de publier intégralement. Autant que je me souvienne, c’est bien la première fois que cette organisation (même si ce n’est que par la voix personnelle de son secrétaire général) décrit de manière précise et froide la situation actuelle au Liban, en ayant de plus la bonne idée de la lier à la chronologie des événements antérieurs que nous connaissons. Je doute cependant que les Nations unies fassent leur rapport sans en adoucir grandement les termes. De manière générale, je pense que la pression US, qui est la plus forte et la plus déterminante dans cette affaire, risque de s’effriter : n’oublions pas les tractations et les discussions entre Washington et Damas, et le récent renforcement des contrôles à la frontière syro-irakienne. Cependant, le rapport Annan aura eu le mérite de constituer un précédent ; espérons qu’il ne pourrira pas dans les immenses rayons de l’Onu consacrés à l’archivage des démarches inutiles. Chafik BOU ANTOUNE New York – USA Ne soyons pas racistes Je suis de près ce qui se passe au Liban depuis qui j’ai quitté le pays, il y a 25 ans. Beaucoup de choses sont choquantes : les pressions étrangères, la conduite de la classe politique libanaise, etc. Mais ce qui m’a choqué le plus dernièrement, ce sont les commentaires xénophobes qui ont été formulés à l’égard d’un politicien libano-saoudien, le prince al-Walid ben Talal. Je ne connais pas l’émir, mais il est comme beaucoup de Libanais, dont moi-même qui suis libano-français et à qui le système politique et démocratique français permet de jouir du droit à l’expression et à l’acte politique. Nous avons le droit de ne pas être d’accord avec al-Walid pour ses opinions politiques pro-Lahoud, mais nous n’avons aucunement le droit de susciter un débat sur ses origines. Ne soyons pas racistes et xénophobes. Ailleurs, dans d’autres pays, les personnes ayant formulé ces commentaires auraient été poursuivies pour racisme. Nasser HOTEIT Expert européen dans le domaine de l’environnement et le développement humain – Paris Découvrir les Libanais Née d’un père Libanais et d’une mère espagnole, j’ai eu l’envie pour mes 24 ans (et oui ! pas avant...) de découvrir non seulement le Liban, mais aussi toute une famille et une histoire familiale jusqu’alors méconnue.... Sachez que pour moi, ce fut un enchantement de voir le Liban, en reconstruction accélérée et terriblement occidentalisée avec sa touche orientale indispensable.... C’est ainsi que j’ai compris ma véritable identité et mes racines étaient enfin révélées au grand jour. Les Libanais sont un peuple courageux, volontaire, doté d’un admirable sens de l’hospitalité. Merci. Sophie C. France Laissez-nous émigrer... S’il est parfois amusant d’observer le ramdam résultant des dernières magouilles politiques (pour ne se limiter qu’à celles-là), il est encore plus intéressant de constater, au-delà des visages scandalisés que tout le monde s’évertue à prendre, le vrai fond du problème. Le Liban. Il n’est d’étranger interrogé qui ne se soit répandu en compliments sur la qualité du spécimen peuplant cette contrée. Et là, je les rejoins. Savez-vous pourquoi ? Parce qu’ils ont raison : le Libanais est ambitieux. Et là, vous mettez le doigt sur le problème. Prenons notre Européen : lui voit l’ambition, d’une manière générale, comme une vie réussie. Il s’investira dans le savoir, dans la découverte de l’autre, dans la culture d’une civilisation lointaine et pourtant riche par rapport à la sienne, s’attachera à se constituer sa propre idéologie. Lui est ambitieux, parce qu’il sait que son ambition le mènera à un enrichissement personnel, par- delà l’aspect matérialiste et autres façades superficielles de la vie en société. Mais ne vous avisez pas de tenir ce discours à un Libanais d’aujourd’hui : il vous répondra, à mi-chemin entre condescendance, pitié et dédain, que vous n’avez rien compris. Car en matière de réussite personnelle au Liban, les exemples les plus éclatants sont là, devant vous. Cet homme politique, croyez-vous vraiment qu’il se soit trouvé là par pure conviction idéologique ? Non. Il devait réussir sa vie « à la libanaise » : les millions, la villa, la voiture. Et il les a. Vous vous interrogez sur son absence de remords ? C’est que vous n’avez rien compris : il l’a réussie, sa vie ! Du moins, colle-t-elle à sa vision de l’ambition. Alors, rassurez-vous : le Libanais est plus ambitieux que jamais. À une différence près par rapport à la définition qu’ont nos frères de l’étranger : son ambition est personnelle. Même si cela signifie manger à tous les râteliers, et même si cela compromet l’ambition collective, celle du Liban tout entier, celle où la première règle, c’est de se serrer les coudes. Alors, de grâce, cessez de prendre un air faussement scandalisé et cessons de tenter de raisonner les dirigeants par la politique ou le civisme : utilisez plutôt la logique du tiroir-caisse. Comprenez la définition libanaise de l’ambition libanaise, et vous aurez les rênes du pays. Mais surtout, par pitié, laissez-nous émigrer. Boutros KARAM
Partir, pour rester
Des océans nous séparent du vieux pays ; mais les propos acides et les discours des agités qui nous gouvernent retentissent au-delà des mers, et nous assourdissent.
Le président syrien d’abord, qui affirme sans broncher que la Syrie n’a consenti que des sacrifices au Liban et n’a ni intérêt ni intention hégémonistes.
Puis Kandil, qui prétend sans...