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Actualités - OPINION

Aggravées par l’amendement, les désunions risquent d’affecter lourdement la vie politique locale

Des clivages, des divergences, des différends, il y en a toujours eu. Mais l’amendement de l’article 49 de la Constitution a provoqué dans le pays une césure, une déchirure d’une gravité maximale. D’autant qu’elle est intervenue à un moment où on semblait s’approcher d’une détente facilitant l’entente. Brusquement, les Libanais se retrouvent emmurés dans un carcan d’hostilité virulente opposant les partisans de la prorogation à ceux que le fait accompli révolte. Le mal qui a été fait, note un ex-présidentiable, se répercute bien évidemment sur les institutions. Et sur la formation du nouveau gouvernement. Naguère, l’opposition aurait peut-être pu songer à participer, à tenter l’expérience pour faire bouger les choses de l’intérieur. Maintenant, il n’en est plus question. Les radicaux vont jusqu’à réclamer que la faute commise soit réparée, c’est-à-dire que le chef de l’État démissionne. Pour eux, en effet, à partir de la fin de son mandat initial, le 23 novembre prochain, sa présence au pouvoir deviendra tout simplement illégale. Cette personnalité souligne que les méfaits des divisions provoquées par l’amendement se répercutent sur l’attitude à adopter par rapport à la 1559. Les militants de la démocratie hostiles à la prorogation estiment qu’il ne faut pas tenter d’aller contre cette résolution. Car cela coûterait beaucoup au pays, économiquement mais aussi politiquement et peut-être même sécuritairement. Sans l’amendement, relève la même source, il y aurait eu élection d’un nouveau chef de l’État. En même temps, on aurait préservé l’unité des rangs internes qui se serait traduite par un cabinet d’entente. Nul n’aurait songé à l’internationalisation et la 1559 n’aurait sans doute jamais été promulguée. Car s’il est vrai qu’elle évoque la présence de forces étrangères, elle s’articule autour de l’échéance présidentielle. De plus, un cabinet d’entente nationale, soutenu par la majorité du peuple, aurait eu beaucoup plus de crédibilité. Pour négocier, avec Annan et avec les grandes puissances, sur le retrait et sur le désarmement des milices, en misant sur le facteur temps. Il y aurait eu, assez facilement, un arrangement global sur les délais pour satisfaire aux conditions posées. En liant le processus à un accord de paix syro-libanais avec Israël. Dans les faits, poursuit cette personnalité, un gouvernement formé après l’élection d’un nouveau président aurait été d’union. La Rencontre démocratique de Joumblatt y aurait participé. L’Assemblée des évêques maronites n’aurait pas haussé le ton, le patriarche Sfeir ne se serait pas montré tranchant et Kornet Chehwane ne se serait pas braqué aussi résolument. Mauvaise trajectoire Rien que vu sous l’angle purement intérieur, l’amendement se confirme donc comme une lourde faute, un péché même, à l’encontre de l’intérêt national. Sans compter que les parties qui guettent au-dehors la Syrie comme le Liban ont trouvé dans cette péripétie de la prorogation un tremplin idéal pour rebondir et intensifier leurs pressions. Auxquelles seul un gouvernement libanais solide aurait pu faire face efficacement. Dès lors, le président Rafic Hariri se retrouve devant un dilemme. Les deux choix qui s’offrent à lui sont mauvais, la question étant de savoir quel serait le pire. Son retour au pouvoir signifierait pour lui une prise de risque énorme, car l’échec est sûrement au bout. Avec les retombées que cela impliquerait en termes de popularité, à l’orée des législatives du printemps prochain. Surtout qu’il s’est déjà mis sur une mauvaise pente en se soumettant, sous la contrainte, à l’amendement et à la prorogation. Mais se récuser n’est guère mieux, du moment qu’il lui est interdit, par la même contrainte, de rejoindre les rangs de l’opposition afin de rester populaire. Il pourrait se retrouver privé d’un bloc parlementaire consistant. Il n’aurait alors du pouvoir que les désavantages et ne serait plus, en termes d’influence, que l’ombre de lui-même, puisqu’il serait relégué à un rôle mineur de suiviste. Cependant, il y a également problème pour le régime. Si le président Lahoud devait de nouveau cohabiter avec le président Hariri, il pourrait se trouver dans l’incapacité de réaliser le programme qu’il annonce pour les trois prochaines années. En raison du fait que le chef du gouvernement aurait adopté une autre ligne, un autre plan. Et si le président Hariri se récusait, son remplaçant risquerait de n’avoir pas assez d’assises, de n’obtenir à la Chambre qu’une majorité étriquée et de ne pas du tout inspirer confiance à la population. Et encore moins aux grandes puissances occidentales. Il reste que selon nombre d’observateurs, les partisans du régime préféreraient que le président Hariri, qu’ils ne portent pas dans leur cœur, ne puisse pas former le prochain gouvernement. Et se trouvent tentés de lui mettre des bâtons dans les roues. Sans réaliser que sans lui un gouvernement serait encore plus faible et exposerait le pays à bien des déboires, économiques ou autres. Sans compter que, très certainement, les pressions extérieures seraient encore accrues, l’équipe en place n’étant pas en mesure d’y faire face. Émile KHOURY
Des clivages, des divergences, des différends, il y en a toujours eu. Mais l’amendement de l’article 49 de la Constitution a provoqué dans le pays une césure, une déchirure d’une gravité maximale. D’autant qu’elle est intervenue à un moment où on semblait s’approcher d’une détente facilitant l’entente. Brusquement, les Libanais se retrouvent emmurés dans un...