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Actualités - REPORTAGE

Social - Interactivité, discussions et activités communes au menu de cette initiative Objectif des camps de jeunes : insérer les handicapés dans la vie publique (Photo)

L’intégration des handicapés dans la société, beaucoup de gens en parlent, mais peu d’entre eux mènent des actions efficaces sur le terrain. L’Union des handicapés du Liban organise depuis deux ans des camps d’été destinés aux jeunes et dédiés au thème de la participation de la jeunesse à la vie publique, sous tous ses aspects : la famille, le village ou le quartier, la municipalité, la société... La méthode s’appuie sur l’initiative et le sens de créativité des jeunes, une façon de les aider à se découvrir ou se redécouvrir, et à puiser en eux une confiance que l’isolement au sein d’institutions spécialisées ou au sein de la famille, bien souvent, a étouffé en eux. Pour cette seconde édition des camps, l’Union des handicapés du Liban a collaboré avec l’Association de la jeunesse non-voyante, l’Association du développement de l’être humain et de l’environnement, et l’Organisation suédoise pour la protection de l’enfance. Afin de favoriser l’échange avec les autres, la moitié seulement des participants aux camps étaient des handicapés. Les camps ont eu lieu à Saghbine (Békaa) : le premier, destiné aux enfants de 9 à 15 ans, s’est déroulé du 17 au 22 août. Le second, pour la tranche d’âge entre 15 et 25 ans, s’est étendu du 22 au 27 août. Enfin, du 28 au 31 août, des cadres des associations se sont réunis au même endroit. Chacun des camps a englobé une soixantaine de personnes. Hassan Mroué, organisateur des camps, explique que « ce sont les jeunes eux-mêmes qui, après avoir tenu les premières réunions, ont décidé des sujets de discussions ». L’accent est mis, d’ailleurs, sur l’esprit d’initiative des jeunes et sur l’encouragement à l’expression avec, pour ultime objectif, l’amélioration de la confiance en soi. La priorité est donnée aux exercices pratiques qui donnent le coup d’envoi des thèmes de discussion, comme des sketches, des chansons... Qu’en était-il des échanges entre les handicapés et les autres ? M. Mroué a parlé d’une « expérience très réussie ». « Le premier jour, les jeunes ne s’étaient pas mélangés entre eux, se contentant de s’asseoir près de leurs connaissances, explique-t-il. Mais dès le second jour, ils ont appris à se connaître et ils ont même eu du mal à se quitter après la fin du camp. » M. Mroué se souvient de ces trois jeunes filles qui, le premier jour de leur arrivée, ont été tellement « choquées » de se trouver au sein du groupe qu’elles se demandaient comment allait se passer le reste de la durée du camp. « Au moment des adieux, elles s’étaient tellement attachées à leurs nouveaux camarades qu’elles pleuraient plus que tous les autres, se souvient-il. C’est certainement un problème d’éducation qui a déclenché chez elles cette réaction première. L’intérêt d’un tel camp, c’est qu’il pousse les jeunes à connaître l’autre et renvoie la vraie image du handicapé. Beaucoup de personnes se sont déclarées surprises du sens de l’humour et de l’amour de la vie qu’on ressent chez les handicapés. » Une loi restée lettre morte M. Mroué considère que ces camps se sont avérés très importants, et il souhaiterait que l’expérience se renouvelle l’été prochain pour une durée plus longue et avec un plus grand nombre de participants. Mais y a-t-il un suivi dans la période qui sépare les camps d’été, pour conforter l’avancée faite par les jeunes handicapés dans leur estime de soi et dans la maîtrise des moyens de communication ? Sylvana Lakkis, présidente de l’Union des handicapés du Liban, assure que les jeunes handicapés ne sont plus livrés à eux-mêmes et qu’un suivi est effectué régulièrement. « Après la tenue, cet hiver, d’un festival du cinéma où des films traitant du thème du handicap ont été visionnés, nous avons créé un noyau baptisé “ Notre voix ”, au sein duquel 25 jeunes souffrant de différents handicaps se sont engagés à se réunir régulièrement pour discuter de leurs problèmes durant huit mois puis en faire un film, raconte-t-elle. C’est ce genre d’initiatives que nous tentons de mettre sur les rails. » Mme Lakkis confirme que l’accent sera dorénavant mis sur la jeunesse, qui est davantage porteuse de promesses que la génération plus âgée. Elle ajoute que des textes de conventions sur la jeunesse ainsi que la loi n° 220, qui est un ensemble de mesures pour l’insertion des handicapés au Liban, adoptée depuis quatre ans, ont servi de cadre aux discussions entre les jeunes. Selon elle, d’ailleurs, « cette loi est loin d’avoir été appliquée jusqu’à ce jour, et la discrimination envers toute personne souffrant d’un handicap physique demeure ». Il faut signaler que l’Union des handicapés du Liban se bat depuis de nombreuses années pour consacrer les droits des handicapés. Ceux-ci étaient auparavant fortement désavantagés par la loi qui les excluait de l’éducation (non spécialisée) et des emplois publics. Mais le vote de la loi n° 220, considéré à juste titre comme une victoire, n’a pas été suivi d’une application suffisante sur le terrain, d’où le fait qu’une commission ministérielle a été formée récemment pour tenter de définir la politique devant être suivie par chaque ministère. Elle n’a pas encore présenté son rapport. Par ailleurs, l’Union des handicapés est très concernée par l’insertion des handicapés dans la société, d’où son projet de camps. Elle est également impliquée dans un programme d’insertion national, lancé jeudi dernier, en collaboration avec l’Association de la jeunesse non-voyante, l’Association libanaise pour la trisomie 21 et l’Organisation suédoise pour la protection de l’enfance. C’est, en d’autres termes, une initiative que devrait prendre l’État, mais dont le flambeau est porté par les organisations civiles. Suzanne BAAKLINI Festival de films réalisés par des jeunes de milieux défavorisés Le monde vu à travers une caméra d’enfant Le monde des enfants vu par les enfants, c’est surtout leur caméra qui peut le raconter. Des films réalisés par des enfants (ou plutôt des adolescents et des préadolescents de plus de dix ans) essentiellement de milieux défavorisés font l’objet, pour la troisième année consécutive, d’un festival organisé par al-Jana (Centre arabe de ressources pour les arts populaires), en collaboration avec l’Union européenne, l’Institut Goethe et l’association allemande Diakonia, au théâtre Monnot jusqu’à jeudi. Le festival, qui a été lancé vendredi dans la soirée, propose à un public jeune et moins jeune 99 films qui sont autant de preuves que, quand la chance leur est offerte, les enfants témoignent d’une créativité extraordinaire et d’un regard nouveau sur un monde qui ne leur a pas toujours fait de cadeaux. À regarder certains de ces films, on se rend compte que même l’aspect technique est loin d’avoir été négligé, bien qu’il soit certain que ces jeunes aient reçu l’assistance nécessaire. La centaine de films a été sélectionnée par un jury partiellement composé d’enfants, à partir de quelque 425 courts-métrages, longs-métrages, documentaires... provenant du monde entier. Ceux qui sont actuellement visionnés dans le cadre du festival ont été réalisés au Liban (certains dans les camps palestiniens), en Palestine, en Syrie, en Égypte, en Iran, en Australie, aux États-Unis, en Espagne, en Arménie, en Allemagne, en Italie, en Argentine, en Belgique, en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas, en Croatie, en Hongrie, en Russie, en Inde, en Norvège, en Bulgarie et au Danemark. Selon Hicham Kayed, coordinateur du festival au sein de al-Jana, l’objectif de celui-ci « est de permettre aux enfants du monde de se rencontrer et à nos jeunes Libanais de prendre connaissance des problèmes, joies, us et coutumes d’enfants d’autres pays ». Il poursuit : « Il est possible qu’ils trouvent dans ces films des préoccupations communes, qu’ils se rendent compte que leur vision d’une certaine société était erronée. Ce festival constitue donc un forum culturel à la portée de ces jeunes. D’un autre côté, nous avons formé un comité de rédacteurs parmi les adolescents de 13 à 19 ans, dont les articles concernant les films ont été publiés dans une revue distribuée lors du festival. » M. Kayed soutient que la participation de ces jeunes à la rédaction de cette revue les encourage à faire partie d’activités culturelles éducatives, qui viendraient, selon lui, combler une lacune dans les cursus scolaires qui demeurent souvent loin de l’interactivité. « Nous tentons, à travers ce genre de festivals, d’introduire dans les écoles l’idée d’activités complémentaires, comme, à titre d’exemple, en Norvège où l’animation est enseignée à l’instar des langues et des mathématiques », souligne-t-il. Quel public est attiré par ces films ? M. Kayed explique que le festival compte deux horaires : le premier dans la matinée, de 10h à 13h30, pour les écoles et les associations, et le second dans la soirée, de 20h à 23h environ, pour toute personne intéressée à découvrir de nouvelles cultures telles que décrites par des jeunes de milieux défavorisés. Environ 90% des films visionnés ont été réalisés par des enfants, quelquefois sous la supervision d’associations ou d’organisations diverses dans le cadre de programmes culturels, d’autres fois sous l’impulsion d’initiatives personnelles. Seulement 10 % sont l’œuvre de professionnels sur des enfants, mais ils ont été jugés assez significatifs pour figurer dans le cadre d’un tel festival à thème. Est-Ouest : différences fondamentales Quelle importance pour les jeunes de réaliser leurs propres films ? « Nous autres professionnels, nous avons souvent tendance à présumer de ce que les jeunes ressentent, vivent ou veulent, explique M. Kayed. Dans ce cadre, ce sont eux qui expriment leur opinion sur ce qu’ils veulent, à quoi ils aspirent... sans l’intervention des adultes. Cela aide aussi les jeunes de différents pays à mieux se comprendre. À titre d’exemple, nous avons des films réalisés par de jeunes Américains, qui sont très critiques envers la politique actuelle de leur gouvernement. Nos jeunes pourront ainsi se rendre compte que le peuple américain n’est pas uniforme et que les opinions dans ce pays sont multiples, parfois rejoignant les leurs. » Il rappelle également que le simple fait de réaliser un film développe chez le jeune des compétences nouvelles, l’encourageant à lire davantage, à écrire, à découvrir le monde qui l’entoure, à prendre part aux activités sociales. À la question de savoir quels points communs et quelles différences principales caractérisent les films issus de différentes cultures, il estime que « les films produits dans le monde arabe mettent davantage l’accent sur la pauvreté et les besoins essentiels, alors que ceux réalisés en Occident traitent de sujets autres comme l’environnement, et font preuve de plus d’imagination, parce que les préoccupations ne sont pas les mêmes ». Il ajoute que, hormis le Liban, les pays arabes n’ont participé que très faiblement à ce festival. Cette même constatation est relevée par des jeunes ayant participé à la rédaction de la revue sur les critiques de films, comme Adnane qui déclare : « On sent que l’enfant occidental est plus ouvert au monde que nous, parce que les moyens modernes et la technologie lui sont plus accessibles. Chez les Arabes, c’est la survie qui prime toujours. Cela m’a quelque peu troublé. » Interrogé sur l’impression que lui ont laissé ces films, il répond : « Ce que j’ai surtout appris, c’est qu’il est possible de compter sur soi pour faire des réalisations. J’ai aussi apprécié le fait que ces jeunes réalisateurs reflètent l’image exacte de leur société et de leurs problèmes, avec l’espoir qu’elle pourrait contribuer à façonner une solution. » Tout comme l’un de ces camarades, Firas, Adnane déclare sa préférence pour un film qui met en scène les souffrances des Palestiniens dans leur vie quotidienne, Loqmat Aïch. « Honnêtement, je n’aurais jamais pu deviner que leur vie quotidienne était aussi dramatique », admet Firas. Il faut signaler que le festival compte aussi une exposition de photos prises par des enfants en Inde, et montrant différentes facettes de leur vie et de la société qui les entoure. La séance inaugurale, vendredi dernier, a pratiquement fait salle comble, avec six courts-métrages très différents, mettant en scène les difficultés de la vie quotidienne et les aspirations des jeunes dans les camps palestiniens au Liban et en Inde, les angoisses dans un film espagnol, le conflit de génération (dépeint de manière très amusante) dans une réalisation norvégienne... S. B.
L’intégration des handicapés dans la société, beaucoup de gens en parlent, mais peu d’entre eux mènent des actions efficaces sur le terrain. L’Union des handicapés du Liban organise depuis deux ans des camps d’été destinés aux jeunes et dédiés au thème de la participation de la jeunesse à la vie publique, sous tous ses aspects : la famille, le village ou le...