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Actualités - CHRONOLOGIE

DOCUMENT - Le texte intégral du rapport du secrétaire général de l’Onu Annan : Les exigences de la résolution 1559 n’ont pas été satisfaites

Comme prévu, le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a rendu public hier le rapport qu’il a rédigé autour des suites de la résolution 1559 du Conseil de sécurité, quasiment à la fin du délai de trente jours fixé par ce texte approuvé par neuf voix et six abstentions le 2 septembre dernier. Un constat s’impose en premier lieu. Contrairement aux diverses affirmations qui ont émané de diverses sources au cours des derniers jours, le rapport se contente dans sa version définitive de rapporter, point par point, ce qui a été appliqué ou non des diverses clauses de la résolution, sans se prononcer sur les mesures à prendre ou à ne pas prendre à l’égard des parties concernées. En somme, Kofi Annan a fait son métier, laissant au Conseil de sécurité, qui doit incessamment se pencher sur ce rapport, le soin de faire le sien en décidant de prendre les mesures qu’il jugerait utiles. Et éventuellement adopter une nouvelle résolution créant une commission de contrôle sur l’application de la 1559, comme cela a été évoqué ces derniers jours, y compris par le vice-président du Conseil, Issam Farès. Après un historique de la situation libanaise, M. Annan expose dans son texte les données en sa possession au sujet de chacune des clauses de la 1559. À ce sujet, il relève que « les exigences présentées aux différentes parties par la résolution 1559 n’ont pas été satisfaites ». Sans mentionner nommément la Syrie, la résolution la visait bel et bien puisque elle est désormais considérée par la communauté internationale comme étant le seul pays à avoir encore des troupes en territoire libanais. M. Annan rappelle d’ailleurs à cet égard le désaccord existant entre le Liban et l’Onu au sujet des fermes de Chebaa. « À part la Finul (Force intérimaire de l’Onu au Liban), les seules forces étrangères significatives déployées au Liban à la date du 30 septembre 2004 sont syriennes », relève le secrétaire général de l’Onu, ajoutant que la Syrie a refusé de fournir un calendrier pour son retrait définitif. Peu après la publication du rapport, un haut fonctionnaire de l’Onu, parlant à la presse sous couvert d’anonymat, a précisé que la Syrie n’avait manifesté « aucune volonté de donner (à l’Onu) le moindre plan » de retrait de ses forces du Liban. Affirmant qu’une large partie de l’opinion libanaise est d’avis que l’application complète de la résolution 1559 serait « non seulement dans l’intérêt du Liban, mais aussi de la Syrie et de la communauté internationale », M. Annan a appelé, en termes diplomatiques, Beyrouth et surtout Damas à passer à l’acte. « Il est temps pour toutes les parties concernées, 14 ans après la fin des hostilités et quatre ans après le retrait d’Israël du Liban, de se débarrasser des derniers vestiges du passé. Le retrait des forces étrangères et la dissolution et le désarmement des milices mettraient fin à ce triste chapitre de l’histoire du Liban », écrit-il. Voici le texte intégral du rapport publié hier par Kofi Annan: Rapport du sécrétaire général préparé conformément à la résolution 1559 (2004) du Conseil de sécurité I. Introduction 1. Le présent rapport est soumis conformément à la résolution 1559 adoptée le 2 septembre 2004 par le Conseil de sécurité. Dans le paragraphe 7 de la résolution, le Conseil a demandé que je rapporte dans les trente jours sur l’exécution par les parties de cette résolution. II. Historique 1. De 1975 à 1990, le Liban a connu une guerre civile tragique et sanglante qui a eu comme conséquence la mort de 120 000 personnes environ. Une grande partie des combats a été le fait de milices qui représentaient les communautés confessionnelles du Liban. Les divers groupes militants palestiniens ont également participé à la violence. Au cours des années, à des périodes différentes, la France, l’Italie, la Libye, le Yémen, l’Arabie saoudite, le Soudan, la Syrie, les Émirats arabes unis, le Royaume-Uni et les États-Unis ont déployé des forces au Liban à la demande de son gouvernement pour mettre fin aux combats et stabiliser la situation. Israël a effectué des opérations militaires fréquentes pendant cette période, y compris des bombardements, des attaques aériennes, deux incursions à grande échelle et une occupation de la partie méridionale du pays. 2. Le Conseil de sécurité s’est impliqué dans le problème depuis 1978 et a adopté 76 résolutions qui ont réclamé entre autres la fin de la violence, la protection des civils, le respect de la souveraineté libanaise, le retrait des forces israéliennes du territoire libanais et la restauration de l’autorité libanaise sur l’ensemble du territoire. 3. La Syrie a déployé la première fois des troupes au Liban en mai 1976, à la demande du président libanais Sleimane Frangié. En octobre 1976, la Ligue arabe a établi la Force de dissuasion arabe (FDA) pour maintenir la paix au Liban. Au sein de cette force, la Syrie a été rejointe par la Libye, le Yémen, l’Arabie saoudite, le Soudan et les Émirats arabes unis. Les forces syriennes ont constitué la majorité des troupes au sein de la FDA, soit quelque 27 000 des 30 000 soldats de cette force. 4. Après une attaque palestinienne dans le nord d’Israël qui a entraîné la mort de plus de 30 civils, Israël a mené une opération militaire importante au Liban-Sud en mars 1978. Le Conseil de sécurité a alors adopté la résolution 425 appelant Israël à mettre immédiatement fin à son action militaire contre l’intégrité territoriale du Liban et à retirer immédiatement ses forces de tout le territoire libanais. En outre, en mars 1978, conformément aux résolutions 425 et 426, la Force intérimaire des Nations unies au Liban-Sud (Finul) s’est déployée avec trois objectifs définis dans la résolution 425 : a) confirmer le retrait des forces israéliennes ; b) restaurer la paix et la sécurité internationales ; et c) aider le gouvernement libanais à rétablir son autorité effective dans le secteur. Le mandat de la Finul a été régulièrement renouvelé depuis, le plus récemment le 29 juillet 2004 par le biais de la résolution 1553 du Conseil de sécurité. 5. En juin 1982, Israël a envahi le Liban à la suite d’une tentative d’assassinat de l’ambassadeur d’Israël au Royaume-Uni. Les États-Unis ont pris en main la situation en parvenant à imposer un accord en août 1982 pour l’évacuation des forces palestiniennes de Beyrouth et le déploiement d’une Force multinationale (FM) pour surveiller leur départ. La France, l’Italie et les États-Unis ont fourni des troupes à la FM, et l’évacuation a été achevée en septembre 1982. La FM s’est retirée du Liban ultérieurement en septembre. 6. Après l’assassinat du président libanais élu Béchir Gemayel à la mi-septembre 1982, qui a été suivi d’une incursion israélienne à Beyrouth-Ouest et du massacre criminel des Palestiniens dans les camps de Sabra et Chatila par des milices phalangistes, la FM est retournée au Liban. Des troupes du Royaume-Uni ont rejoint les trois membres originaux de la Force multinationale. Le 17 septembre 1982, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 520 condamnant l’incursion israélienne à Beyrouth, exigeant un retour aux positions occupées par Israël avant le 17 septembre et réclamant le respect strict de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’unité et de l’indépendance politique du Liban sous l’autorité unique et exclusive du gouvernement du Liban par le déploiement de l’armée libanaise sur l’ensemble du territoire libanais. En mai 1983, des représentants d’Israël, du Liban et des États-Unis ont conclu un accord destiné à aboutir au retrait des forces israéliennes et à l’établissement d’une « zone de sécurité » au Liban-Sud. Le 23 octobre 1983, 241 Marines américains et 56 parachutistes français ont été tués dans deux attentats-suicide. Dans un contexte de violence grandissante, le gouvernement du Liban a abrogé son accord avec Israël en mars 1984. La Force multinationale s’est retirée en avril de cette même année. 7. Le 22 octobre 1989, suite aux efforts de la Ligue arabe, des membres de la Chambre libanaise des députés, réunis en Arabie saoudite, sont parvenus à l’accord de Taëf. L’accord a appelé à la réconciliation nationale et à « étendre la souveraineté du Liban sur tout son territoire », par le biais d’un plan étalé sur un an et stipulant la « dissolution de toutes les milices, libanaises et non libanaises ». Les armes des milices devaient être « livrées à l’État libanais dans un délai de six mois ». Dans cet accord, le Liban remercie la Syrie de l’aide fournie par ses forces pour permettre au gouvernement libanais d’étendre son autorité sur l’ensemble de son territoire « au cours d’une période définie n’excédant pas deux ans ». À la fin de cette période, les deux gouvernements étaient censés décider du redéploiement des forces syriennes dans la région de la Békaa jusqu’à la ligne Hammana-Mdeirej-Aïn Dara et, en cas de besoin, à d’autres sites à déterminer par un comité militaire commun libano-syrien. Les deux gouvernements devaient également signer un accord « déterminant la taille et la durée de présence des forces syriennes dans ces secteurs et définissant les relations entre les autorités libanaises et ces forces là où celles-ci sont présentes ». Le Traité de coopération libano-syrien de mai 1991 a réitéré cette disposition. 8. Au cours des années, le Conseil de sécurité a maintenu son engagement à l’égard de l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance du Liban. Le secrétariat général a travaillé pour persuader Israël de se retirer du Liban-Sud. En avril 2000, j’ai reçu l’acte de notification du gouvernement israélien qu’il retirerait ses forces du Liban durant le mois de juillet 2000. Le 25 mai 2000, le gouvernement d’Israël m’a informé que l’État hébreu avait redéployé ses forces conformément aux résolutions 425 et 426 du Conseil de sécurité. Le 16 juin, j’ai rapporté au Conseil de sécurité qu’Israël avait retiré ses forces selon les résolutions 425 et 426 et avait répondu aux exigences présentées dans mon rapport du 22 mai au Conseil de sécurité. J’ai informé le Conseil que le Liban avait commencé à rétablir son autorité dans le secteur et considérait déployer ses forces armées au Liban-Sud. Le 18 juin, le Conseil de sécurité a accueilli favorablement mon rapport et a confirmé mes conclusions. III. Résolution 1559 (2004) du Conseil de sécurité 10. Le 2 septembre 2004, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1559 qui réitère le soutien du Conseil à l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance politique du Liban. La résolution invite toutes les parties concernées à coopérer entièrement et instamment avec le Conseil pour la pleine exécution de ceci et d’autres résolutions appropriées du Conseil de sécurité au sujet de la restauration de l’intégrité territoriale, de la pleine souveraineté et de l’indépendance politique du Liban. En outre, la résolution 1559 : a. invite toutes les forces étrangères toujours présentes à se retirer du Liban ; b. réclame la dissolution et le désarmement de toutes les milices libanaises et non libanaises ; c. soutient l’extension de l’autorité du gouvernement du Liban sur tout le territoire libanais ; d. déclare son soutien à un processus électoral libre et juste dans le cadre de l’élection présidentielle qui était alors à venir, conformément aux règles constitutionnelles libanaises sans interférence ou influence étrangère. Le Conseil de sécurité a également réitéré son appel au strict respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’unité, et de l’indépendance politique du Liban sous l’autorité unique et exclusive du gouvernement du Liban sur l’ensemble de son territoire. 11. Les gouvernements du Liban et de la Syrie ont soumis au président du Conseil de sécurité et à moi-même les lettres (A/58/879 - S/2004/699 et A/58/883-S/2004/706, respectivement) concernant la résolution. a. Forces étrangères déployées au Liban 12. La résolution 1559 appelle au retrait de toutes les forces étrangères toujours présentes au Liban. Hormis la Finul, et autant que nous puissions en juger, les seules forces étrangères significatives déployées au Liban, au 30 septembre 2004, sont syriennes. 13. Ainsi que je l’ai décrit, la Syrie a maintenu des forces au Liban depuis 1976. Les troupes ont été initialement déployées à la demande du président Frangié. Ce déploiement a été transformé en une FDA avalisée par la Ligue arabe, à la demande du gouvernement du Liban, à laquelle se sont jointes des troupes d’autres pays arabes. Les gouvernements du Liban et de la Syrie m’ont dit que les forces syriennes présentes au Liban – qui, à un certain moment s’élevaient à 40 000 hommes, selon le gouvernement libanais – y sont à l’invitation du Liban et que leur présence est donc d’un commun accord. Elles seraient déployées conformément à l’accord de Taëf de 1989 et au Traité de coopération libano-syrien ratifié par les deux pays en 1991. Autant que je puisse en juger, les deux gouvernements n’ont pas jusqu’ici signé l’accord supplémentaire visant à « déterminer la taille et la durée de la présence des forces syriennes » qui avait été prévu dans les deux instruments précités. 14. En plus des forces armées en uniforme que la Syrie a déployées au Liban, le gouvernement syrien a informé les Nations unies de la présence importante de fonctionnaires en civil des services de renseignements militaires, présentés comme étant des composantes ordinaires des unités militaires. Ces fonctionnaires, ainsi que les forces en uniforme, constituent l’ensemble des forces syriennes. 15. L’appareil militaire et de renseignements de la Syrie au Liban n’a pas été retiré au 30 septembre 2004. Cependant, selon des annonces faites par les gouvernements libanais et syrien, la Syrie a, au cours des dernières semaines, redéployé approximativement 3 000 de ses soldats présents auparavant au sud de Beyrouth. Il n’est pas clair aux yeux des Nations unies si ce redéploiement a été confiné aux troupes régulières ou bien s’il a inclus des fonctionnaires des services de renseignements en civil et si tous les soldats redéployés ont regagné la Syrie. Selon les parties, c’est le cinquième redéploiement depuis la signature de l’accord de Taëf. 16. Le gouvernement syrien m’a indiqué qu’ au total, quelque 14 000 militaires syriens sont toujours présents au Liban. Il a affirmé qu’une majorité de ces forces se trouve maintenant basée près de la frontière syrienne et qu’elles ne sont pas présentes en profondeur au Liban. Les gouvernements libanais et syrien m’ont dit que le timing de retraits ultérieurs serait déterminée par la situation de la sécurité au Liban et dans la région et par le comité militaire commun établi conformément à l’accord de Taëf. 17. Le gouvernement du Liban m’a informé de plus que la situation fragile actuelle dans la région, et son souci concernant des risques potentiels pour par la stabilité intérieure du Liban, rendent difficile l’établissement d’un calendrier pour un retrait total des forces syriennes. Le gouvernement du Liban m’a déclaré que son but ultime était le retrait total de toutes les forces étrangères du territoire libanais. De plus, les deux gouvernements m’ont dit qu’ils discutaient activement de la nature et de l’ampleur de l’actuel déploiement des forces syriennes au Liban. Dans ce contexte, le gouvernement syrien m’a informé qu’il ne peut pas me fournir des chiffres et des calendriers pour un quelconque retrait futur. b. Milices libanaises et non libanaises 18. La résolution 1559 du Conseil de sécurité prévoit la dissolution et le désarmement de toutes les milices libanaises et non libanaises. Depuis la fin de la guerre civile, le gouvernement du Liban a fait de grands pas en réduisant de manière significative le nombre de milices présentes au Liban. Néanmoins, au 30 septembre 2004, plusieurs éléments armés demeurent au Liban-Sud. Le gouvernement du Liban m’a dit qu’il prévoyait que tous les groupes armés irréguliers soient en fin de compte dissous et désarmés. 19. Le groupe armé le plus significatif est le Hezbollah. Le gouvernement libanais s’oppose à la définition du Hezbollah comme étant une milice libanaise et se rapporte à elle en tant que « groupe de résistance nationale » qui a pour but de défendre le Liban face à Israël jusqu’au retrait des forces israéliennes du sol libanais, à savoir des fermes de Chebaa. Le Liban maintient que les fermes de Chebaa sont un territoire libanais, non syrien. Cependant, dans mon rapport du 16 juin 2000, j’avais confirmé qu’Israël avait rempli à cette date les exigences des résolutions 425 et 426 du Conseil de sécurité réclamant « le retrait immédiat de ses forces de tout le territoire libanais ». Le 18 juin 2000, le Conseil de sécurité avait approuvé cette conclusion dans la déclaration faite au nom du Conseil par son président. Tout en maintenant sa position selon laquelle les fermes de Chebaa sont libanaises, le gouvernement libanais avait confirmé qu’il respecterait la ligne bleue telle que définie par les Nations unies. Le Conseil de sécurité a noté cela dans la déclaration faite par son président le 18 juin 2000, et a invité le Liban, dans cette déclaration et dans les résolutions ultérieures, à respecter l’engagement qu’il a donné pour le respect total de cette ligne. 20. Au 30 septembre 2004, le personnel des Nations unies sur le terrain n’avait décelé aucun changement du statut du Hezbollah depuis l’adoption de la résolution 1559. À cet égard, le gouvernement du Liban m’a informé que la situation fragile de la sécurité dans la région, le risque pour la stabilité du Liban et l’absence d’un processus global de paix dans la région rendraient difficile la mise en application de la résolution immédiatement et entièrement. 21. Concernant les groupes armés palestiniens, le gouvernement du Liban m’a donné des assurances que les militants palestiniens n’étaient pas autorisés à quitter leurs camps de réfugiés avec des armes. Le personnel des Nations unies dans la région a indiqué que le gouvernement du Liban a placé des forces armées libanaises en dehors des camps, dans le but apparent d’appliquer cette politique. Le gouvernement m’a dit que vu la situation de la sécurité dans les camps, il est déconseillé aux forces armées libanaises d’y pénétrer pour désarmer les militants. Le gouvernement du Liban exprime une préoccupation particulière concernant la présence d’une grande population de réfugiés palestiniens sur son territoire et le débat public libanais soulève régulièrement des craintes d’une implantation permanente de cette communauté au Liban. Le gouvernement insiste sur le fait qu’un règlement final au Proche-Orient devrait comprendre des dispositions pour le retour de ces réfugiés. c. Extension du contrôle du gouvernement libanais sur l’ensemble de son territoire 22. La résolution 1559 du Conseil de sécurité déclare son soutien à l’extension du contrôle du gouvernement du Liban sur l’ensemble de son territoire. Depuis la fin de la guerre civile, le Liban a déployé des forces de sécurité dans la partie méridionale du pays, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité sur ce sujet et à l’accord de Taëf. Cependant, au 30 septembre 2004, le gouvernement du Liban n’avait pas encore étendu son contrôle sur tout le territoire. 23. Bien que le Liban ait tenu des élections municipales dans le sud du pays en mai 2004, la situation dans le secteur autour de la ligne bleue demeure tendue. Le calme qui a suivi le retrait (israélien) a été trop souvent perturbé par des actes de violence. L’armée libanaise ne s’est pas déployée le long de la ligne bleue. La Finul a signalé des violations des deux côtés de cette ligne ; du côté libanais, le Hezbollah et les groupes palestiniens en sont responsables. Les opérations du Hezbollah ont fréquemment violé la ligne bleue. On affirme généralement que les opérations du Hezbollah se font en dehors du contrôle ou des sanctions du gouvernement libanais. J’ai précédemment pressé le gouvernement du Liban de contrôler l’utilisation de la force sur son territoire, afin d’empêcher toutes les attaques à partir de son sol le long de la ligne bleue. 24. Plus de quatre ans après le retrait israélien du Liban-Sud, l’activité dans la région demeure limitée. Le Hezbollah a établi des points de contrôle dans cette portion du territoire. Les activités des fonctionnaires libanais, du personnel de la Finul et des diplomates sont parfois entravées par les éléments armés. 25. Le gouvernement du Liban m’a déclaré que sa capacité à déployer ses forces dans les régions du Liban-Sud est limitée par l’accord d’armistice israélo-libanais en date du 23 mars 1949, qui a défini le nombre et le type des forces militaires qui pourraient se déployer dans la région frontalière entre les deux pays. Selon le gouvernement, il a déployé dans la région la totalité des 1 500 militaires que lui permet l’accord. d. Processus de l’élection présidentielle 26. La résolution 1559 proclame l’appui du Conseil de sécurité à un « processus électoral libre et juste pour la présidentielle du Liban qui doit s’effectuer selon les règles constitutionnelles libanaises sans interférence ou influence étrangère ». Le mandat du président Lahoud devait expirer en novembre 2004. Selon la Constitution libanaise, la Chambre des députés doit se réunir au moins un mois avant l’expiration du mandat présidentiel pour élire un successeur. La Constitution fixe une limite de six ans pour le mandat présidentiel, avec la possibilité d’une réélection après une alternance de six ans. 27. Le 3 septembre 2004, moins de 24 heures après l’adoption de la résolution 1559, la Chambre des députés a approuvé la loi constitutionnelle 585 par 96 voix contre 29, et trois abstentions, qui prévoit une prorogation de trois ans du mandat de M. Lahoud. La loi en question précise que « pour une fois et exceptionnellement, le mandat du président actuel de la République sera prorogé de trois années et devrait se terminer le 23 novembre 2007 ». Le gouvernement du Liban m’a informé que cette loi a été adoptée selon les règles constitutionnelles libanaises. En 1947 et 1995, la Chambre des députés a voté pour permettre des prorogations des mandats des présidents en exercice. Cet amendement a été largement contesté au Liban et on a dit aux « sponsors » de la résolution 1559 que la prorogation du mandat du président Lahoud était le résultat d’une intervention directe du gouvernement syrien. Dix députés ont préparé un recours contre la prorogation du mandat du président Lahoud. Mais les gouvernements libanais et syrien ont nié l’influence syrienne dans l’adoption de l’amendement. e. La souveraineté, l’intégrité territoriale, l’unité et l’indépendance politique du Liban 28. Dans la résolution 1559, le Conseil de sécurité a réaffirmé son appel au respect strict de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’unité et de l’indépendance politique du Liban, sous l’autorité unique et exclusive de son gouvernement, sur l’ensemble de son territoire. 29. Au Liban, beaucoup déclarent que la présence militaire syrienne, y compris celle des agents des renseignements en civil, permet à la Syrie d’exercer une influence considérable sur les affaires internes libanaises. Les gouvernements du Liban et de la Syrie ont toutefois nié, devant moi, ce fait, précisant que la Syrie n’intervient pas dans les affaires internes du Liban. 30. En dépit de l’étroitesse des liens officiels entre le Liban et la Syrie, on note que les deux pays n’ont jamais eu de relations diplomatiques officielles. Il n’y a aucune mission diplomatique libanaise à Damas ni une mission diplomatique syrienne à Beyrouth. 31. Depuis octobre 2000, l’aviation israélienne a régulièrement violé la souveraineté libanaise en dépassant parfois la ligne bleue. Elle pénètre fréquemment en profondeur dans le territoire libanais et effectue des bangs supersoniques au-dessus des zones habitées. Le gouvernement israélien affirme que ces survols sont effectués pour des raisons de sécurité. La riposte antiaérienne du Hezbollah est tombée au-delà de la ligne bleue, en Israël, y faisant des blessés. 32. Avec mes représentants dans la région, nous avons invité les parties à cesser les violations de la ligne bleue dans l’une ou l’autre direction et de s’abstenir de toute escalade qui pourrait faire des victimes des deux côtés de la frontière. Comme nous l’avons déclaré, une violation ne doit pas servir de prétexte à d’autres. IV. Observations 33. La résolution 1559, sur base de laquelle ce rapport est rédigé, exige des actions spécifiques de la part des différentes parties. Ainsi qu’il ressort de ce rapport, je ne peux pas certifier que ces conditions ont été remplies. Alors que les critiques de la résolution sont bien connues, les gouvernements du Liban et la Syrie m’ont assuré de leur respect pour le Conseil de sécurité, et que, par conséquent, ils ne contesteront pas la résolution. Les parties concernées m’ont fourni des informations et m’ont donné certaines assurances précises. Je les ai notées et j’attends leur réalisation. J’ai demandé aux parties un calendrier pour leur exécution totale. 34. En ce qui concerne le processus électoral, je suis depuis longtemps convaincu – et je l’ai rappelé dernièrement au sommet de l’Union africaine, en juillet de cette année – que les gouvernements et les chefs d’État ne devraient pas rester en fonction au-delà des limites prévues dans leurs Constitutions. 35. L’opinion publique libanaise semble divisée au sujet de la présence militaire syrienne sur son territoire et au sujet de l’amendement constitutionnel lié à l’élection présidentielle. Elle semble aussi divisée sur l’existence de groupes armés qui ne sont pas sous le contrôle direct du gouvernement. Mais beaucoup de Libanais estiment que l’exécution totale de la résolution 1559 serait dans l’intérêt non seulement du Liban, mais aussi de celui de la Syrie, de la région et de la communauté internationale en général. Il est temps, 14 ans après la fin des hostilités et quatre ans après le retrait israélien du Liban, que toutes les parties concernées se débarrassent des derniers vestiges du passé. Le retrait des forces étrangères, la dissolution et le désarmement des milices pourraient clore définitivement ce chapitre triste de l’histoire libanaise. 36. Comme je l’ai noté plus haut, les exigences prévues dans la résolution 1559 n’ont pas été encore satisfaites. À cet égard, je reste prêt à aider, si cela s’avère nécessaire, les parties qui doivent exécuter cette résolution du Conseil de sécurité dans sa totalité. Et, s’il y a lieu, je suis aussi prêt à tenir le Conseil de sécurité régulièrement informé des développements dans ce domaine. 37. Je continue à œuvrer dans le sens de la conclusion d’une paix juste, durable et globale au Proche-Orient.
Comme prévu, le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a rendu public hier le rapport qu’il a rédigé autour des suites de la résolution 1559 du Conseil de sécurité, quasiment à la fin du délai de trente jours fixé par ce texte approuvé par neuf voix et six abstentions le 2 septembre dernier.
Un constat s’impose en premier lieu. Contrairement aux diverses...