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Actualités - interview

Interview - La MTV ne sera rouverte qu’avec le retour de l’État de droit, indique l’ex-député Gabriel Murr : « Il faut recouvrer à tout prix la dignité du pays » (photo)

Il y a bientôt deux ans et demi, en mai 2002, il était porté au Parlement par une coalition de l’ensemble des forces de l’opposition, après une élection partielle très disputée au Metn. Quelques mois après, il y a très exactement un an, le 4 septembre 2002, sa chaîne de télévision, la MTV, était fermée par une décision politico-judiciaire (près de 150 de ses 500 employés restent au chômage). Et, deux mois plus tard, le 4 novembre 2002, une décision du Conseil constitutionnel le destituait de son mandat de député. Autant d’étapes entrant selon lui « dans le cadre d’un coup d’État graduel contre les libertés publiques et la démocratie au Liban ». Aujourd’hui, et malgré tous les revers qui lui ont été infligés, Gabriel Murr n’a rien perdu de sa détermination ou de son franc-parler, qui autrefois a irrité plus d’un responsable. Il affirme d’ailleurs faire partie du club très fermé de ceux qui n’ont pas le droit de s’exprimer sur les ondes des médias audiovisuels. Et il n’a en rien modifié ses convictions, malgré les rumeurs que certaines mauvaises langues répandent dans le pays. « Lorsque je dis que le Liban vit une semaine noire, et que je ne passe que sur la New TV à l’issue de ma rencontre avec Mgr Audeh... Lorsque j’affirme que les convocations en Syrie me font honte, que je me demande tout haut si nous sommes dans un pays où la souveraineté a été annihilée... Quand je dis que nous, libanais, nous ne convoquons pas MM. Chareh et Khaddam pour élire le président syrien... Mon discours peut-il être plus clair ? » dit-il. C’est en des termes toujours aussi virulents que Gabriel Murr dresse un bilan des six dernières années, notamment au niveau des libertés publiques. Il évoque dans ce cadre la visite de la délégation de Kornet Chehwane à Baabda et les tentatives avortées d’aboutir à une réconciliation nationale générale. « La présidence de la République n’a-t-elle pas répondu en fermant la MTV ? Doit-on proroger l’esprit de vindicte qui a mené à la fermeture de la station ? » s’interroge-t-il. Avant de préciser que le sort de la MTV est lié au sort du Liban. « Plus important est le danger d’annihilation de la démocratie auquel nous faisons face actuellement », déclare-t-il. Ce n’est pas normal que la quotidien syrien al-Saoura titre que “la Syrie est le plus grand électeur du Liban”. Il est honteux pour nous, libanais, d’accepter cette prorogation. Il s’agit du comble de la décadence démocratique, une militarisation masquée par des procédés démocratiques. Et tout cela va à l’encontre du cours naturel des choses, au moment où Saddam Hussein a été évincé du pouvoir en Irak... », indique-t-il. Pour Gabriel Murr, la MTV a été fermée « non par une décision judiciaire, mais en raison de la haine que lui vouaient certains responsables ». « Selon mes informations, c’est même l’ancien ministre de l’Intérieur (Michel Murr) qui a avoué avoir fabriqué de toutes pièces l’affaire de l’article 68, dit-il. C’est un triangle qui est à l’origine de la fermeture de la station, formé de la présidence de la République, du ministre de l’Intérieur (Élias Murr) et de l’ancien ministre de l’Intérieur, avec l’accord et la bénédiction de Damas », affirme M. Murr. Concernant la récente affaire al-Manar, l’ex-député déplore qu’il n’y ait pas eu une mobilisation similaire en faveur de la MTV, tout en prenant position pour la défense des libertés publiques quelles que soient les circonstances. L’annihilation de la justice Toujours dans l’optique de son bilan des libertés publiques, Gabriel Murr dresse le constat suivant : « Les six dernières années ont été marquées par le pouvoir des services sous le couvert de la démocratie et par la répression systématique des jeunes qui manifestaient pour les libertés publiques, les 7 et 9 août 2001. Par contre, ceux qui portaient des haches et des coutelas pouvaient protester en paix dans les rues sous la protection du ministre de l’Intérieur. Samir Geagea croupit toujours en prison. Pourtant, plusieurs chefs de milices sont au pouvoir. Mais la justice est inique, arbitraire au Liban. Ce régime a été celui de l’annihilation de la justice. » En ce qui concerne le projet d’amendement de l’article 49 et la prorogation du mandat Lahoud, M. Murr déclare : « On n’amende la Constitution qu’en cas de nécessité nationale. Que veut dire l’expression “relations stratégiques syro-libanaises” ? La convocation des responsables libanais à Damas comme s’ils étaient de vulgaires employés ? C’est un mohafez qu’on veut nous assigner ? La plupart des députés vont prendre leur décision et voter en fonction des desiderata de Damas. C’est la fin de la démocratie au Liban. Il existe un quasi-consensus libanais contre l’amendement constitutionnel, et au lieu d’en profiter pour édifier une nation, le pouvoir a préféré aller vers l’égoïsme et les relations très étroites avec Damas, ajoute-t-il. La MTV n’est plus importante dans ce contexte, à l’heure où l’on tente de fabriquer un pouvoir répressif fondé sur les SR, qui, par la menace, forcent les députés à opter pour la prorogation, comme cela a été le cas pour Élie Ferzli, Mohsen Dalloul, Nicolas Fattouche... ». Gabriel Murr participera aujourd’hui au Congrès pour la défense de la République à l’Ordre de la presse. « Je serai présent pour toute initiative visant à rendre au Liban sa souveraineté et son indépendance. La dignité du pays est perdue, et il faut la retrouver à tout prix », ajoute-t-il. Avant de trancher : « Et la MTV ne sera rouverte qu’avec le retour de l’État de droit. » Michel HAJJI GEORGIOU

Il y a bientôt deux ans et demi, en mai 2002, il était porté au Parlement par une coalition de l’ensemble des forces de l’opposition, après une élection partielle très disputée au Metn. Quelques mois après, il y a très exactement un an, le 4 septembre 2002, sa chaîne de télévision, la MTV, était fermée par une décision politico-judiciaire (près de 150 de ses 500...