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Actualités - ANALYSE

ÉCLaIRAGE L’implication française pour la souveraineté du Liban dynamise la synergie internationale

«J’ai avancé la date de la séance parlementaire pour contrer la campagne internationale. » Qui Nabih Berry entend-il encore leurrer ? Du pronom personnel de la première personne du singulier à l’absence du mot « simulacre » pour évoquer la séance préfabriquée et télécommandée de demain, 18 heures, en passant par « campagne internationale », tout est bancal dans la phrase du président de la Chambre. Devenu bon gré, mal gré, le très zélé metteur en scène constitutionnel du scénariste-producteur syrien, déterminé à faire octroyer à Émile Lahoud une rallonge de trois ans, envers et contre les marées déferlantes de « non », purement libanais soient-ils, ou alors internationaux. Les États-Unis et la France (même en plein bourbier des otages en Irak) ont coparrainé le projet de résolution appelant sans ambages au respect de la souveraineté du Liban, et qui a été présenté hier soir au Conseil de sécurité des Nations unies, puis discuté en primeur dans la nuit. Que dit ce projet, qui sera sans doute voté ce soir à New York ? Il appelle la Syrie à « un strict respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’unité et de l’indépendance politique » du Liban, et au retrait « sans délai » de ses forces armées. Tout est clair, encore faudrait-il relever l’allusion à l’« unité » du pays, comme une mise en garde aux fantasmes inacceptables de certains fédérationnistes, ainsi qu’à son « indépendance politique », qui démontre, si tant est qu’il le fallait, que la communauté internationale est parfaitement consciente que tous les retraits possibles et imaginables ne signifieront rien tant que la décision locale n’est ni libre ni libanaise. Le projet de résolution mentionne également les nécessaires « démantèlement et désarmement de toutes les milices », quelle que soit leur nationalité. Nulle allusion – et l’influence de la France est évidente – à ces organisations « terroristes » estampillées Syria Accountability Act. Le projet évoque enfin « l’extension du contrôle du gouvernement libanais sur l’ensemble du territoire » national, en écho à la résolution 1553 du 29 juillet dernier, qui demandait en termes à peine voilés le déploiement de l’armée libanaise le long de la ligne bleue. Totalement inédit « c’est une première dans l’histoire des relations politiques à l’Onu », a soulevé l’ambassadeur russe au Liban – ce projet de résolution pourrait ressembler, de prime abord, à de « l’ingérence » dans les affaires intérieures d’un pays membre des Nations unies. C’est ce qu’auraient relevé des personnes ayant hiberné depuis 25 ans ; c’est ce que n’ont pas manqué de marteler, depuis deux jours, les hommes politiques libanais prosyriens. Pourquoi cette résolution ne ressemble pas à de l’ingérence ? Parce qu’il y a la France, et que, pour la première fois, cette France ne s’est plus contentée d’ânonner, avec la régularité d’un métronome, le nécessaire respect de la souveraineté du Liban. Si l’appréhension de (très) nombreux Libanais, leur déception, leur désillusion concernant non les États-Unis mais la politique de l’Administration Bush restent on ne peut plus légitimes pour certains – tant à cause de leur équipée sauvage en Irak que pour leur caution scandaleuse et aveugle à l’égard de l’insensée et souvent criminelle politique sharonienne dans les territoires palestiniens –, aucune insinuation, aucun doute ne pourrait être émis en ce qui concerne la France. Alliée indéfectible du Liban – et, surtout, des Libanais –, que ce soit politiquement, économiquement, financièrement, socialement, culturellement, etc., la France de Jacques Chirac aurait pu être accusée d’immixtion ou d’intrusion si elle n’avait pas montré à quel point elle avait écouté les Libanais. Non seulement l’a-t-elle fait, mais elle a entendu, et depuis des semaines, le patriarche Sfeir ; entendu le cinquième appel des évêques ; entendu Walid Joumblatt, ses dix commandements pour le choix du successeur d’Émile Lahoud ; entendu l’ami intime du patron de l’Élysée, Rafic Hariri ; entendu le communiqué sunnito-chiite, même censuré ; entendu les centaines de voix, « de Sleimane Frangié à Samir Frangié », appelant au respect de la Constitution et à la sauvegarde du peu de démocratie libanaise qui reste. Et parce que Damas a démultiplié, au cours de la semaine écoulée, son refus de dialoguer avec des Libanais convaincus à 99 % de la nécessité d’établir les relations libano-syriennes les plus équilibrées et les plus respectueuses qui soient ; parce qu’un peuple sous tutelle et des responsables qui ne scieront jamais la branche sur laquelle ils ont été installés « n’ont pas le choix », la France, emmenée, dit-on, par une « détermination présidentielle » sans failles aussi bien que par ses propres intérêts, a pesé d’un poids certain sur une communauté internationale, Chine comprise, acquise (presque) d’avance à la nécessaire souveraineté libanaise. D’autant que la volonté de régulariser la scène libanaise entre dans un cadre bien plus large, régional, d’une volonté des grandes puissances – USA en tête – d’un processus de normalisation, réel ou supposé, mais déjà enclenché, à différents degrés : en Irak après le 30 juin, au Yémen, en Arabie saoudite, en Libye, au Soudan, en Iran, etc. La Syrie, elle, pour des raisons qu’un jour l’histoire dévoilera, a décidé de mettre la présidentielle libanaise au cœur d’un inéluctable bras de fer avec les États-Unis hier, la communauté internationale aujourd’hui. Il s’agit désormais, parce que tous les observateurs, où qu’ils soient, assurent que la résolution sera votée, de ne pas en arriver à l’inimaginable : mettre le Liban au ban de la planète. Pire encore : lui faire payer, une nouvelle, une énième fois l’exorbitant prix de la guerre (ou de l’épreuve de force) des autres. Pas besoin d’aller bien loin pour trouver la parade : Bkerké, Moukhtara, ou la rue libanaise suffiront. Ziyad MAKHOUL

«J’ai avancé la date de la séance parlementaire pour contrer la campagne internationale. » Qui Nabih Berry entend-il encore leurrer ? Du pronom personnel de la première personne du singulier à l’absence du mot « simulacre » pour évoquer la séance préfabriquée et télécommandée de demain, 18 heures, en passant par « campagne internationale », tout est bancal dans...