Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Fléchettes De l’art opportun de limiter l’imitation

Quand Cocteau est mort, Mauriac, qui avait la dent dure, a persiflé quelque chose dans le genre : c’est bien la première fois qu’on le voit se livrer à une activité si peu concertée ! Entendre si peu mondaine. En réalité, les attitudes peuvent souvent être néfastes, sinon mortelles, en termes de carrière. Sur un plan professionnel, les Américains ont été les premiers à le comprendre, elles sont pire que déplacées : antiproductives. Ainsi, un acteur qui refuserait de jouer n’importe qui, pour ne pas faire n’importe quoi, peut tout de suite s’inscrire au chômage. Il est malsain, généralement, de lustrer en public son ego, de cultiver un sens bizarre du quant-à-soi. De prétendre qu’on est si grand, si au-dessus de tout, qu’il faut que tout vienne à vous, sans que vous alliez à rien. Tout le monde, en effet, n’est pas ce Wagner dont la devise était : le monde me doit ce dont j’ai besoin. Quand on soutient qu’on ne sollicite rien, on risque d’être pris au mot. De se piéger soi-même, par vaine gloriole. Surtout quand, par hasard, on se trouve claquemuré dans un écran analogique. C’est-à-dire que l’on doit soutenir la comparaison avec un modèle plus ou moins récent, offrant d’innombrables similitudes de parcours personnel. Que l’on a pris soin de mettre en exergue, parce que l’ancêtre professionnel avait une aura, un prestige extrême. Mais, malheureusement, ce précédent, ce prédécesseur lointain, avait choisi pour lui-même un tout autre épilogue que celui que l’on caresse pour soi. Comment en sortir sans désavouer toute son idéologie de rectitude républicaine ? Comment se dégager de l’étau de ce haut exemple quand on se dit réformateur ? Comment en somme limiter une imitation du meilleur qui, les métaphysiciens le savent, est l’un des chemins du salut ? Exercice ardu ? Pas vraiment. Il suffit d’adopter une attitude nouvelle. De paraître découvrir que rien n’est plus comme avant. Que les valeurs d’antan, pour respectables qu’elles soient, ne collent plus aux réalités d’aujourd’hui. Et de soutenir que le bien du pays, la nécessité d’initier un changement salutaire, justifient le noble sacrifice de sa personne. Comme de l’image que l’on a voulu donner aux autres. Comme fredonnait Vian, à la bonne vôtre, messieurs les bons apôtres. De la renaissance. Changez de veste, on vous reconnaîtra toujours. Avec plus ou moins de reconnaissance. J.I.

Quand Cocteau est mort, Mauriac, qui avait la dent dure, a persiflé quelque chose dans le genre : c’est bien la première fois qu’on le voit se livrer à une activité si peu concertée ! Entendre si peu mondaine.
En réalité, les attitudes peuvent souvent être néfastes, sinon mortelles, en termes de carrière. Sur un plan professionnel, les Américains ont été les...