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Actualités - REPORTAGE

PSYCHOLOGIE - Viviane Matar Touma: «Le TSEA, pour comprendre le fonctionnement relationnel des sujets entendants et malentendants» Une psychologue libanaise lance un test de socialisation de l’enfant et de l’adolescent

Il est désormais possible d’évaluer l’intégration sociale des enfants et des adolescents grâce au TSEA, un test de socialisation de l’enfant et de l’adolescent, créé et développé par deux chercheurs psychologues cliniciens, Viviane Matar Touma, de nationalité libanaise, et Benoît Virole, de nationalité française. Ce test a le mérite d’être adapté aux enfants malentendants, sourds et ceux en passe de recevoir un implant cochléaire. Mais il est aussi le premier test psychologique développé par un psychologue libanais et figure dans le catalogue 2004 de l’ECPA (Éditions du centre de psychologie appliquée), revue professionnelle internationale de référence dans le domaine de l’évaluation psychologique et clinique, et premier éditeur d’outils d’évaluation en France. «Le TSEA est un test projectif destiné à évaluer le vécu subjectif de l’enfant et de l’adolescent (de 6 à 22 ans), en ce qui concerne le contexte relationnel, familial et social. Il est constitué de planches présentant des scènes de la vie, dessinées de façon volontairement ambiguë, de manière à favoriser un processus d’interprétation projective chez le sujet». Cette définition du test émane de son auteur, Viviane Matar Touma, psychologue clinicienne à l’Institut du père Roberts et enseignante à l’USJ. Elle explique les motivations qui l’ont poussée à se lancer dans une telle recherche, ainsi que les grands titres du TSEA et les modalités d’exploration du fonctionnement relationnel de l’enfant et de l’adolescent. Raconter des scènes de la vie quotidienne «Il n’existait jusque-là aucun outil d’évaluation de la socialisation des enfants et adolescents, qu’ils soient entendants ou malentendants», observe la spécialiste dans les problèmes des enfants sourds et les bilans des implants cochléaires, ajoutant qu’il était difficile d’évaluer la capacité de ces derniers à s’intégrer dans un groupe social et d’explorer leur perception subjective des situations sociales. «Il a fallu un an et demi de travail et de recherches pour donner au TSEA sa forme finale, en mai 2003», indique la clinicienne. C’est au terme de plusieurs présentations à l’ECPA, prouvant l’efficacité du test, qu’il a été validé par la maison d’édition, en octobre dernier, et figure désormais dans son catalogue d’évaluation psychologique et clinique. Suite à son intérêt pour les problèmes des sourds, la chercheuse est désormais membre du BIAP (Bureau international d’audiophonologie). Quant au test lui-même, il est constitué d’une vingtaine de planches que le psychologue présente au patient, l’une après l’autre, tout en se plaçant face à lui afin d’observer son comportement et ses expressions durant la passation, d’une durée d’une demi-heure environ. Passation qui doit être précédée d’un entretien avec le sujet, oral ou dans la langue des signes, afin de le mettre en confiance d’une part et d’autre part de collecter certaines informations nécessaires. Dessinées en noir et blanc, ces planches représentent des scènes de la vie quotidienne de l’enfant ou de l’adolescent, dans la cour de récréation, autour de la table familiale, avec la fratrie ou les amis... Elles peuvent être sélectionnées par le psychologue en fonction de l’âge. «Dans les dessins des personnages, le seul détail réside dans l’appareil auditif porté par certains enfants. Détail que seuls les enfants sourds ou malentendants notent», observe Viviane Matar Touma. «Par ailleurs, six planches “spécial implant” sont spécifiquement destinées aux enfants et adolescents qui ont reçu un implant cochléaire ou que l’on prépare à l’implantation», précise la psychologue. Quant à la consigne, elle est simple: à partir d’une observation de la planche, l’enfant doit décrire la scène. «Certes, précise-t-elle, tous les enfants ne racontent pas les choses de la même façon». Si les enfants entendants ont un discours oral élaboré et fourni, les malentendants, eux, qu’ils s’expriment par la parole, par le langage des signes ou par une combinaison des deux moyens d’expressions, sont plus concis et moins prolixes. «Ils arrivent généralement à se faire comprendre, car ils sont scolarisés et connaissent au moins les signes de base», remarque Mme Touma. Mais, dans le cas où ils ont de la difficulté à s’exprimer, que leur langage est déficient ou impossible, un matériel plastifié peut les aider à reconstituer l’histoire. De même, un support imagé leur permet de préciser les émotions qu’ils attribuent aux personnages des planches. Intégration, inhibition, évitement ou conflit Le contenu latent des planches se regroupe en trois grands titres: la socialisation au sein du groupe restreint, comme l’école, la famille et les groupes de jeunes, la socialisation dans les relations duelles, entre une mère et son enfant, ou entre frères et sœurs et, finalement, la relation à soi-même et l’aperception de la solitude. Laisser libre court à l’imagination de l’enfant est indispensable pour lui permettre de se projeter dans les différentes situations. «Ainsi, explique la chercheuse, l’exploration de son fonctionnement relationnel s’effectue selon trois dimensions: l’intégration par l’enfant des situations de socialisation, les défenses par inhibition devant ces situations, ou les défenses par évitement ou conflit». Quant au système d’interprétation du TSEA, il est bâti sur l’analyse de contenu à partir des différents thèmes latents. La cotation, elle, se fait à l’aide d’une grille de notation des réponses. Elle peut se limiter à une note générale, ou comporter une analyse qualitative. Le test TSEA représente une importante étape dans la compréhension du processus de socialisation de l’enfant et de l’adolescent, étranger ou libanais, entendant ou malentendant. «Mais il ne peut prétendre, à lui seul, être significatif», prévient Viviane Matar Touma. «En effet, précise-t-elle, le test fait partie d’un examen psychologique global». La prochaine étape pour la psychologue libanaise? Effectuer une étude comparative entre la population libanaise qu’elle étudie personnellement et la population française qu’étudie son confrère Benoît Virole. Mais elle ne s’arrête pas là et prépare, par ailleurs, une batterie complète de tests cognitifs et affectifs, sur l’intelligence, l’affectivité et la mémoire. Anne-Marie El-HAGE
Il est désormais possible d’évaluer l’intégration sociale des enfants et des adolescents grâce au TSEA, un test de socialisation de l’enfant et de l’adolescent, créé et développé par deux chercheurs psychologues cliniciens, Viviane Matar Touma, de nationalité libanaise, et Benoît Virole, de nationalité française. Ce test a le mérite d’être adapté aux enfants...